33 - « Stupid girl » (partie 1)

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« Stupid girl » - Garbage


Charly





D'habitude, je ne me pose pas de question, je choisis une fille, je la baise et elle se barre, point final. Aujourd'hui avec Cassiopée c'est différent. Et alors qu'elle s'éloigne, seule dans cette rue, déçue par mon attitude fuyante, mon estomac se tord dans tous les sens.

Trahison, me souffle ma conscience.

Hier soir, aux abords de la plage, j'ai en quelque sorte passé un pacte d'honnêteté avec elle en lui demandant de m'accorder sa confiance. Et là, j'ai l'amère impression de la bafouer.

En démarrant ma Corvette et comprends que ma parenthèse d'insouciance avec elle est bel et bien terminée.

Peut-on dire que je lui ai menti ? Un peu, par omission. Mais je n'ai pas vraiment choisi cette situation, elle m'est tombée dessus.

Si elle savait...

Je secoue la tête pour me débarrasser de l'écœurement que j'éprouve tout à coup. Arrêté à un feu rouge, j'attrape mon portable et relis les messages qui sont venus troubler la sérénité de ma matinée avec elle.

[Fais-toi beau pour moi. Je t'attends impatiemment]

[Alors Charly, on a perdu sa langue ? J'espère bien que non...]

Je redémarre, bien décidé à régler cette stupide situation, à l'aplanir avant qu'elle ne devienne irrécupérable. Et je compte dès à présent m'occuper du premier problème, l'expéditeur des deux SMS : Addison.


Flashback :

Les premières lueurs du jour éclairent la chambre d'hôpital. Cette nuit avec Cassiopée était — si l'on occulte la panique causée par l'accident — hors du temps. Nous n'avons jamais été si proches. À vrai dire, je ne me suis jamais autant senti en osmose avec quelqu'un... Le message qui arrive sur mon téléphone vient rompre ce moment, il me replonge sans ménagement dans la dure réalité de ma vie.

[Dans mon bureau dès que tu reviens de San Francisco. C'est urgent! ]

Qu'est-ce que je disais? Mon père...

Pas de «bonjour» ni de «s'il te plait» et encore moins de «merci». J'y suis habitué et pourtant je peine à supporter cette attitude glaciale qu'il m'impose.

Remarquant mon changement instantané, Cassiopée s'empresse de m'interroger. Je lui affirme que tout va bien. Un piètre mensonge. La nécessité de prendre l'air devient trop forte, alors je quitte la pièce et fonce tout droit au rez-de-chaussée avec le besoin absolu de me griller une clope. Ce matin, les bouffées de nicotine ne parviennent pas à détendre mes nerfs, car je sens que l'intransigeant qui me sert de paternel va encore venir tout gâcher et que je serais obligé de céder sans broncher...

Arrivé à l'entreprise, je me rends immédiatement dans les quartiers de Charles Jenkins. Lorsque je pénètre dans la grande pièce, aussi rustique et austère que l'homme qui trône derrière le bureau en chêne, il ne prend pas la peine de se lever ni de me saluer, il se contente de m'indiquer la chaise face à lui pour que j'y prenne place, comme il s'adresserait à un employé lambda. J'obtempère en gardant pour moi mes pensées assassines. Les coudes en appui sur le plateau en bois sombre, les mains jointes sous son menton, il me fixe en poussant un long soupir d'exaspération. Il a sa tête des mauvais jours, comme à l'accoutumée lorsque nous nous rencontrons.

BEHIND - Tome 1. The Wicked GameOù les histoires vivent. Découvrez maintenant