Mourir d'amour enchaîné

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Anna allait vomir, ou s'évanouir, ou les deux en même temps, elle ne savait pas trop.

Devant elle se tenait l'homme avec qui elle avait ri, avec qui elle avait pleuré. L'homme qu'elle avait profondément aimé et qui l'avait brisé en si petits morceaux qu'elle n'avait pas encore réussi à tout recoller.

Ses yeux bruns, qu'elle avait trouvés si doux la première fois qu'elle s'y était plongée, détaillaient son visage devenu livide sans gêne.

Anna observait, impuissante, Jonquille enlacer l'homme avec qui elle avait un jour envisagé de se marier, avec qui elle avait passé des nuits à discuter en se tenant la main, refusant de dormir pour pouvoir profiter de chaque minutes ensembles. L'homme qui lui avait dit droit dans les yeux qu'il l'aimait à la folie, qu'il la trouvait belle, intelligente, drôle. Plus drôle que n'importe qui. Celle qui illuminait ses jours, avant qu'il ne décide qu'il ne l'aimait plus, qu'elle le dégoutait et que, finalement, il regrettait d'avoir un jour croisé son chemin.

Elle allait vomir, c'était sûr.

- Bonsoir Anna, lui dit Gabriel de cette voix grave qu'elle avait tant adoré. Ça fait longtemps.

Ça faisait longtemps oui. Depuis la fois où il l'avait largué sans prévenir par SMS, la laissant pleurer sur le tapis de son salon durant des jours sans plus jamais prendre de ses nouvelles.

- Vous vous connaissez ? demanda Jonquille qui n'avait pas du tout perçu le malaise de Anna.

- On était... ami, lui répondit Gabriel qui avait l'air déterminé à bien choisir ses mots.

Anna voyait flou à présent. Elle ne voulait pas pleurer. Elle avait déjà pleuré toutes les larmes qu'elle avait en stock pour lui, et bien plus encore.

Maintenant, ses yeux étaient secs et brûlants, mais son cœur, bien que soigneusement barricadé derrières de nombreuses couches de fer blindé, venait de se fendre un peu plus. Complètement sonnée, elle observait d'un œil hagard le joli couple que formait son ancien petit ami et la meilleure amie de sa sœur.

Anna ne respirait plus, sa tête tournait dangereusement. Elle replia les bras sur sa poitrine, comme pour se protéger des mots qui allaient venir la heurter de plein fouet. Son corps commençait à trembler.

- Je... balbutia-t-elle, incapable de parler. Je...

Elle allait s'effondrer.

- Ça va ma belle ? lui demanda Jonquille de sa voix haut perchée. Tu as froid ? Tu trembles !

- Je... repris Anna.

Pourquoi n'arrivait-elle pas à parler ? Les mots se chevauchaient dans son esprit comme des milliers de fourmis prisent de panique, mais aucuns d'entre eux n'arrivaient à franchir ses lèvres closes.

Parle. Dit quelque chose, n'importe quoi, se supplia Anna qui ne ressentait rien d'autre à présent qu'un gigantesque vide dans la poitrine.

La tête baissée, elle ne voyait que le bras de Jonquille entourant fermement celui de Gabriel.

Soudain, quelque chose lui toucha l'épaule, et Anna sursauta.

- Anna, tout va bien ?

La personne avait parlé en anglais, si bien que Anna, qui était passée en mode pilotage automatique histoire de ne pas tomber dans les pommes, lui adressa un regard complètement vitreux. Elle n'avait pas compris la question, si la personne lui avait seulement posé une question.

- Je crois que Anna a bu un peu trop de champagne, minauda Jonquille d'une voix sucrée.

- Vous êtes ?

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