Le Second choix

Beautiful Hangover

Anna se jura de ne plus jamais boire. Et cette résolution prenait effet immédiatement.

Réveillée par un « bip » incessant qui transperçait son crâne endolorie comme un milliers d'épingles à nourrices, Anna essayait d'émerger du brouillard épais dans lequel elle était engluée. Même si elle était à moitié éveillée, ses yeux refusaient de s'ouvrir.

- Bordel, grommela-t-elle en cherchant à tâtons son téléphone qui sonnait, sans prendre la peine d'ouvrir les yeux.

Comme pour toutes ses gueules de bois, Anna avait la bouche pâteuse, comme si elle avait mangé du coton, la peau horriblement sèche, les yeux vitreux et un mal de tête à s'en cogner contre le mur dans l'espoir idiot que ça s'arrête. Elle aurait mieux fait de respecter la règle du « un verre d'alcool, un verre d'eau », comme une adulte responsable.

- Mais tu vas te taire, saloperie de téléphone ! s'écria-t-elle d'une voix de camionneuse habituée à fumer deux paquettes de cigarettes par jour, agacée de ne pas réussir à le retrouver. Anna posait rarement son téléphone sur sa table de chevet, qui croulait déjà sous une tonne de livres qu'elle n'avait pas encore lus. Généralement, il se perdait sous sa couette lorsqu'elle s'endormait alors qu'elle s'abrutissait sur Tik Tok.

Bien décidée à faire taire l'objet de toutes ses souffrances, elle se mit à brasser son lit de la main dans l'espoir de tomber miraculeusement dessus. Malheureusement pour elle, Anna ne trouva pas le téléphone qui continuait de biper joyeusement. Par contre, sa paume entra en contact avec quelque chose qu'elle n'arrivait pas à identifier.

- Aie ! grogna une voix ensommeillée.

Visiblement, le quelque chose pouvait parler.

Bizarre, pensa-t-elle en attrapant fermement avec ses doigts le truc qui venait de crier. Je ne pensais pas que Olly pouvait apprendre à parler. Et en plus avec une voix d'homme.

Puis, se rendant subitement compte que tout ça n'avait absolument aucun sens, Anna décida d'ouvrir enfin un œil.

- Euh Anna, tu peux arrêter de me pincer le nez s'il te plait ?

La jeune fille sursauta, parfaitement réveillée à présent. Pour la deuxième fois de la journée, et elle n'était éveillée que depuis quelques minutes, elle se promis de ne plus JAMAIS boire d'alcool de toute sa vie.

- Désolée, s'excusa-t-elle dans un souffle, éberluée.

Anna réagissait différemment en fonction de ce qu'elle buvait. Si c'était des alcool forts comme du rhum ou de la vodka, elle avait plutôt tendance à rire très fort et à se cogner dans tous les meubles. Si elle buvait du vin, elle devenait rapidement une sorte de philosophe de comptoir qui analysait toutes les personnes présentes en imitant la voix langoureuse de Fanny Ardent.

Mais jamais, au grand jamais, Anna n'avait eu d'hallucinations (à part une fois, mais elle avait plutôt mis ça sur le dos de la forte fièvre déclenchée par la grippe).

Ce qu'elle voyait ne pouvait donc s'expliquer que de deux manière différentes : soit, ça y est, elle était devenue complètement folle, soit elle avait fait une grosse bêtise.

Dans la place habituellement vide de son grand lit était allongé Leon qui avait l'air particulièrement contrarié d'avoir été réveillé en se faisant pincer le nez si violemment.

Anna se redressa vivement en plaçant pudiquement la couette aux motifs de chiots roses devant elle.

Son esprit ralenti commença à s'affoler, s'imaginant toutes sortes de situations, toutes plus incongrues les unes que les autres. Elle se massa les tempes du bout des doigts dans l'espoir de pouvoir se remémorer des bribes de sa soirée.