Mais à chaque fois que je suis déprimé, mes pas me menent à cette petite balançoire en face de la maison de mes parents. C'est pour cela que, sans m'en rendre compte, je me retrouve assis là, à me balancer de bas en haut. Il n'y a pas grand monde pour me juger, ni même me déranger. Je ne sais pas depuis combien de temps je suis là, ni pourquoi.
Depuis cette vieille balançoire rouillée, je peux observer calmement ma maison. Elle apparaît si normale et inoffensive de l'extérieur, avec sa façade propre et ses volets bleus, comme une image tirée d'un magazine de vie parfaite. Mais je sais trop bien ce qui se cache derrière ces murs, ces fenêtres propres et ce jardin bien entretenu. Cette maison renferme tous les traumatismes de mon enfance, des souvenirs empreints de douleur et de peur, causés par un couple dont l'amour est destructeur.
Il y a d'abord mon père, un homme impulsif, colérique et alcoolique. Je me souviens de ses éclats de voix, de ses colères qui éclataient sans prévention, transformant chaque instant de calme en un orage imprévisible. Les murs de ma chambre ne pouvaient pas étouffer les bruits de ses disputes avec ma mère, les éclats de verre brisé et les cris. Sa présence était une ombre constante, un rappel de l'instinct.
Et puis il y a cette femme, ma mère, ma génitrice. La femme qui m'a donné la vie et qui, en même temps, m'a ôté tout goût pour elle. Elle m'a tout donné, y comprend sa dépression, une sorte d'héritage empoisonné. Je me souviens de ses yeux éteints, de ses journées passées dans le silence, recroquevillée dans son fauteuil. Elle était là sans vraiment l'être, emménurée dans une tri. Pourtant, elle a su rester douce avec moi. Je crois que j'aimerai lui prouver qu'elle a des raisons d'être fière de moi.
Je sais qu'elle est là, à la maison. Depuis ma position sur la balançoire, j'observe un instant la façade vieillissante de cette demeure qui contient tant de souvenirs. Mes pensées tourbillonnent, mais je prends une profonde inspiration et me lève, mes pas quittant doucement le confort de la balançoire pour me diriger vers la porte.
Le chemin pavé me semble étrangement familier, chaque pierre portant l'empreinte de mes allers-retours d'antan. J'arrive devant la porte d'entrée, hésitant un instant avant de poser la main sur la poignée froide. Je ne sonne pas, préférant entrer directement comme si rien n'avait changé, comme si je revenais d'un.
L'odeur familière de la maison m'envahit immédiatement, un mélange de vieux bois, de café et de ce parfum particulier qui m'a toujours enveloppé ici. C'est un mélange réconfortant et douloureux à la fois, ramenant à la surface une vague de souvenirs et d'émotions enfouis.
Je la vois alors, assise sur le canapé du salon, le regard perdu dans un livre qu'elle tient entre ses mains. Ses cheveux sont légèrement ébouriffés, et elle porte ce pull gris qu'elle affectionne tant. Elle n'a pas changé, ou du moins, c'est l'impression que j'ai.
Je fais quelques pas en avant, mes mouvements hésitants mais déterminés. Le froissement de mes vêtements semble résonner dans le silence de la maison. Elle lève les yeux, et nos regards se croisent. Son visage s'éclaire d'un sourire, mais avant que je puisse dire quoi que ce soit, elle m'interpelle :
– Kaiis... Ça me fait plaisir de te voir. « Ne t'en fait pas, ton père n'est pas là. » Dit-elle avec un sourire triste et doux.
– Salut maman. « Ça va ? » Je réponds d'un air le plus détendu possible.
– Je suis tellement désolé que tu te sois senti obligé de quitter la maison... Je me rends compte à quel point j'ai laissé faire ton con de père. Comment ça se passe avec Owen et sa maman ? »
Je suis totalement sidéré par les excuses de ma mère. Jamais je n'aurais pensé qu'elle se remettra en question comme ça.
— « Je vais, ça se passe bien. » Valérie est vraiment adorable et j'aide pas mal pour faire à manger. »
Des larmes perlent aux bords de ses yeux, mais elle garde un sourire qui se veut rassurant. J'avance alors de quelques pas afin de la prendre dans mes bras. Mon menton se pose sur le haut de son crâne alors qu'elle enfouit son visage dans mon coup ; comme je la dépasse d'une bonne vingtaine de centimètres. Elle sanglote silencieusement avant de marmoner quelque chose d'incompréhensible. On s'écarte pour qu'elle puisse prendre la parole calmement :
« Kaiis, il faut qu'on parle. »
Cette phrase me glace le sang immédiatement. Je commence alors à stresser et je sens mon cœur palpiter.
– « Non, je ne reviendrai pas vivre ici. » Pas temps que Papa sera là ; cet environnement est trop toxique pour moi.
Elle semble assez confuse en reprenant la parole.
– « Non, euh... » « Je ne voulais pas te parler de ça, je ne vois pas de problème à ce que tu vives chez ton ami, au contraire. » Elle s'interrompt, prenant une profonde inspiration avant de continuer. « J'ai trouvé quelque chose dans ta chambre. »
Mon cœur rate un battement.
— « Quoi ? »
Elle sort de sa poche un petit carnet de cuir et une boîte de lames de rasoir, les posant délicatement sur la table entre nous. Ses yeux se remplissent de larmes.
– « Ces lames... et ton carnet de poèmes. » Sa voix tremble légèrement. « Pourquoi, Kaiis ? » Pourquoi tu fais ça ?
Je sens une boule se former dans ma gorge, luttant pour trouver les mots.
– « Maman, je... »
– « Je veux savoir où sont tes cicatrices. » Ses larmes commencent à couler librement maintenant.
– « Je veux comprendre, Kaiis. »
Je détourne les yeux, fixant ma tasse de café.
– « C'est compliqué, maman. » « Je... Je me sens tellement perdu parfois. »
Elle tend la main pour prendre la mienne, ses doigts tremblant légèrement.
– « S'il te plaît, montre-moi. » Je veux t'aider.
Je prends une inspiration profonde, enlève lentement mon pull pour révéler les cicatrices sur mon épaule. Elle laisse échapper un sanglot étouffé, incluant sa bouche de sa main libre.
Elle ferme les yeux un instant, évoque de contenir ses émotions. « Pourquoi tu ne m'as rien dit, Kaiis ? » Pourquoi tu gardes tout ça pour toi ?
– « Parce que... je ne voulais pas t'inquiéter. » Les mots sortent enfin, tremblants mais sincères. « Je ne voulais pas que tu te sentes responsable. »
Elle secoue la tête, ses larmes coulant toujours.
– Je suis ta mère, Kaiis. C'est mon rôle de m'inquiéter pour toi. De te protéger. »
Je baisse les yeux, sentant la culpabilité m'envahir.
– Je suis désolé, maman. Vraiment désolé. »
Elle se lève, contournant la table pour m'enlacer, ses bras me serrant fermement.
« Je t'aime, Kaiis. »
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Une dernière cigarette
RomanceLoan est un garçon autiste, il ne comprend donc pas toujours les sentiments des autres. Son frère, Owen donne son maximum pour lui Et le meilleur ami de Owen, Kaïs, avec une histoire plus sombre qu'on peut l'imaginer, va venir le perturber. Vont-i...