Chapitre 14 - Une cure de désintox (Gabriel)

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– Je ne sais plus où j'en suis, Joyce.

Je fixe mon amie, indécis. Perdu. Comme toujours lorsque je vais mal, et que ma vie ressemble à un champ de ruine, je me réfugie dans les bras de mon amour de jeunesse. Joyce est toujours là pour moi. Elle sait comment me consoler, à coup de verres de vin, de phrases bien placées et de remontants. En ce moment, elle tapote mon épaule et me tend un mouchoir.

– En effet, tu m'as l'air bien perdu.

– Je suis amoureux d'Emmanuel, je le sais, mais Jordan...

Joyce lève la main, m'interrompant avant que je prononce ces mots que je pourrai regretter. Je trempe mes lèvres dans mon verre et déglutis avec difficulté.

– Cette histoire est allée trop loin, Gab. Tu ne peux pas chauffer Jordan Bardella, lui envoyer des photos de toi, ou plutôt, de ta bite, lui susurrer des mots doux par vocaux...

– Je ne lui susurre pas des mots doux, répliqué-je.

–  D'accord, lui susurrer des mots crus...

– Joyce !

Elle lève les mains, taquine. Au moins,elle a le mérite de me faire rire et de me détendre.

– Ce que je veux dire, c'est que cette histoire a pris trop d'ampleur. Tu voulais provoquer la tête du RN pour protéger ta romance secrète avec le président, et tu te retrouves pris à ton propre piège, désormais.

– Qu'est-ce que tu racontes?

– Tu commences à éprouver des sentiments pour Jordan, je comprends, il est charismatique, mais...

– BIEN SÛR QUE NON ! C'est Manu que j'aime.

Oh la ! Oh la ! Oh la ! Oh la ! Minute. Je n'éprouve aucun sentiment pour Jordan Bardella. Tout cela n'est qu'un jeu. Un jeu stupide, dangeureux et très bandant, mais un jeu seulement. J'aime le président. C'est clair, limpide comme de l'eau de roche. Il n'y a pas de débat. Je l'aime, et j'attends juste que son mandat présidentiel s'arrête pour qu'il quitte enfin sa prof, divorce et m'épouse (OK, je sais, ça n'arrivera pas, mais laissez moi de l'espoir!). Ce qu'il se passe avec Jordan n'est qu'un fantasme qui a un peu dégénéré. Je n'ai même pas envie de lui. C'est juste la tension qu'il y a entre nous. Juste une histoire de politique.

Joyce soupire.

– Tu aimes peut-être le président, mais lui ne t'aime pas. Ouvre les yeux, Gabriel, il ne se passera jamais rien de plus entre vous. Alors que Jordan...

– Je rêve ou tu m'encourages à aller dans les bras de Bardella?

Je n'en crois pas mes yeux. Elle a pété un câble ou quoi?

– Je ne t'encourage à rien. Je dis juste que Macron joue avec tes sentiments et que tu dois mettre fin à tout ça. Je ne te demande pas de tomber amoureux de Bardella, mais peut-être que si tu couches avec lui, ça te fera oublier le président.

– C'est une sorte de thérapie?

– Exactement ! Prends ça comme une cure de désintoxe.

Je médite une seconde ces paroles. Elle n'a peut-être pas tort ! M'envoyer en l'air avec Bardella pourrait me faire oublier Manu. Voire le rendre jaloux. C'est peut-être une solution. Un jeu encore plus dangereux que le précédent, certes, mais il faut avouer qu'il y a longtemps qu'Emmanuel ne m'a plus pris sauvagement. Avec son emploi du temps, il n'a jamais le temps de rien. J'ai à peine cinq minutes pour le sucer entre deux réunions, alors que j'ai envie de plus. Je suis en manque et Jordan a réveillé mon appétit.

Mais pour cela, encore faut-il que Bardella ouvre les yeux sur ses désirs et accepte de céder à la tentation.

Une tentation que je compte bien représenter.

Je prends mon portable et lui envoie un nouvel audio sans équivoque. J'ai dans l'espoir de réussir à le faire bander et je me plais à l'imaginer en train de se caresser. Joyce m'observe, un petit sourire aux lèvres.

– N'empêche, t'as vraiment des goûts de merde. Bardella, Macron. Au moins, Stéphane était beau, lui.

Certes, mais il m'a quitté comme une merde lorsque j'ai été nommé ministre de l'Éducation Nationale. Je pense que déjà, à cette époque, il soupçonnait ce qui se passait entre Manu et moi. Nous couchions ensemble de temps en temps, depuis quelques mois lorsqu'il m'a offert le poste. On a beau dire, dans le milieu politique, la meilleure façon d'atteindre ses objectifs est toujours la même depuis des années : il suffit de s'agenouiller.

Gabriel & Jordan - Une romance politique et interdite [Fanfiction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant