Dans la même équipe [girlxgirl]

8 - Heures sup'

Comme presque chaque matin, je quitte mon lit à l'aube pour enfiler ma tenue de sport. Les ronflements de Célia couvrent le silence et se mélangent au chant des oiseaux. Avec le temps, je commence à réussir à m'habiller sans faire le moindre bruit. J'abandonne la chambre sur la pointe des pieds et referme la porte le plus délicatement possible. 

À partir de maintenant, ma routine évolue. Au lieu de sortir par l'entrée principale pour aller courir, je me dirige vers le stade. Les entraînement de foot m'ont clairement fait comprendre que j'étais très mauvaise en tir. S'il faut courir, tout va bien, mais dès qu'il est question de faire une passe ou de marquer un but, le ballon a une chance sur deux de s'envoler dans la mauvaise direction. Alors j'ai décidé de travailler de mon côté. 

En approchant du stade, alors que je m'attendais à être parfaitement seule, j'entends un bruit régulier. Un bruit que je connais de mieux en mieux. Celui d'une chaussure de sport qui shoot dans un ballon de foot. Moi qui avais prévu d'être seule, c'est raté. Je continue d'avancer discrètement, juste pour savoir qui a eu la même idée que moi. 

C'est Lola. 

Seule dans le stade, elle a regroupé une petite dizaine de ballons et aligne les tirs au but avec une précision sidérante. Toutes les balles foncent vers le centre des cages. Elle se donne à peine le temps de récupérer entre chaque tir : il lui faut moins d'une minute pour marquer huit fois. Après quoi, elle récupère les ballons qui s'entassent désormais dans les buts et les ramène jusqu'au spot de tir. Et puis elle recommence. 

Je l'observe attentivement, cachée derrière les gradins. Elle porte un jogging gris et un t-shirt ample. Son col très large dénude une de ses épaules et dévoile une bretelle de soutien-gorge noire. Je me laisse hypnotiser par ce morceau de peau laissé à découvert. Tout chez elle est envoûtant. Sa démarche élancée lorsqu'il s'agit d'aller récupérer les balles, son déhanché aérien. La manière dont elle se tend juste avant de tirer, dont son corps se raidit subtilement pour libérer toute la puissance de ses muscles. Et puis les innombrables mèches rebelles que son chignon ne parvient pas à contenir, et qui volettent à chacun de ses mouvements. 

Je pourrais passer la matinée à l'admirer comme ça. D'ailleurs, c'est probablement ce que j'aurais fait si, en ramenant les ballons après une énième série de buts, elle n'avait pas fini par remarquer ma présence. 

— Zoé Fontenas ! Je peux savoir ce que tu fous là ? 

— Je... J'étais venue m'entraîner. 

Maintenant que je suis démasquée, j'ose enfin quitter ma cachette pour la rejoindre sur le stade. Lola a toujours cette même lueur de défi dans le regard, comme si elle voulait provoquer tout le monde. De près, elle est encore plus irrésistible. 

— Il était temps que l'une d'entre vous réalise qu'il faut plus de quatre heures de sport pour atteindre un niveau décent. Mais je m'imaginais pas que tu serais la première à t'en rendre compte. 

En présence de Lola, j'ai le sentiment que ma réparti m'abandonne. Elle a l'art de donner à ses phrases l'allure de vérités générales, absolues, impossibles à remettre en question. La seule chose que l'on peut faire, quand elle vient de parler, semble être d'acquiescer en baissant les yeux. 

— Tu sais au moins à quoi tu veux t'entrainer ? 

— À... euh... à tirer. 

— Bonne réponse. C'est plus possible de rater les trois quarts de tes lancers. Met-toi en place, je vais te montrer comment on fait. 

Je marche jusqu'à l'endroit où Lola tirait quand je l'espionnais. Elle pose un ballon devant mes pieds et puis se glisse derrière moi. Je sens son souffle contre ma nuque. Elle m'attrape par les hanches et déplace légèrement mon bassin pour me donner la bonne position. Sa proximité dans mon dos me provoque une montée d'excitation que je fais tout pour camoufler. J'espère qu'elle n'entend pas mon coeur tambouriner dans ma poitrine tandis qu'elle ajuste l'appui de mes jambes. Une fois que je suis bien positionnée, elle s'éloigne et la distance nouvelle crée une impression de vide, de relâchement.