24 - Crise

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Je rentre au lycée deux jours après le reste de l'équipe. Le professeur, qui nous encadrait lors du voyage et qui a dû rester sur place pour attendre que je sorte de l'hôpital, me conduit jusqu'à ma chambre. Tous les dix mètres, il me demande si ça va, si je n'ai besoin de rien, s'il doit faire quoi que ce soit. Je lui répète que je me débrouille. Pourtant, je sais que je m'aventure en enfer. Camille ne veut plus me voir et Lola me déteste viscéralement. Je voudrais que l'année se termine immédiatement. 

Ce n'est qu'en arrivant dans ma chambre que je me rappelle l'existence de Célia. Le professeur, dont la mission est désormais terminé, m'abandonne avec elle. Elle n'a beau ne plus porter son appareil dentaire depuis quelques semaines, elle a toujours cette énergie infantile, cette agitation qui la rend difficilement supportable. 

Apparement, la nouvelle de mon malaise a circulé dans le lycée. Tout comme la défaite. Tout le monde est au courant. Ou, à minima, tous ceux qui s'intéressent à cette équipe amateur. Célia me demande, comme tout le monde, si je vais bien. 

Et comme à tout le monde, je raconte le même mensonge. 

La seule à qui je peux ne pas mentir, c'est Manon. Alors, dès que j'ai réussi à me débarrasser de ma colocataire, je me réfugie dans sa chambre. Elle est en pyjama, étalée sur son lit. Mais dès que je rentre, elle me saute dessus pour m'enlacer, le visage illuminé par un enthousiasme compatissant. 

— Meuf, j'ai rien compris à ce qui t'arrives, va falloir que tu m'expliques. 

— Ça tombe bien, parce que j'ai besoin de te raconter ma vie dans les moindres détails. Mais prépare-toi à m'insulter parce que je suis probablement la pire personne que t'as jamais rencontré. 

— À ce point ? Me dit pas que t'es évanouie exprès pour saboter l'équipe ? Ce serait grave machiavélique comme plan ! 

— Non je... Je sais même par où commencer... Déjà, avant même le match, je t'avais pas dis mais... 

— Mais quoi ? 

— J'ai couché avec Lola. 

Elle écarquille les yeux et se retient de hurler. Elle me scrute comme si elle attendait que je lui avoue que c'est une blague, que je la fais marcher. Sauf que c'est tristement vrai. 

— Mais... pourquoi ? 

— Parce que je suis une merde. Parce que j'étais crevée et que j'avais zéro neurones qui fonctionnaient. Parce qu'elle est trop belle et que j'ai passé l'année à fantasmer sur elle, avant de sortir avec Camille. Parce que je manque tellement de confiance en moi que quelqu'un a envie de m'embrasser, je me dis que je dois sauter sur l'occasion sinon elle me détestera. Parce que... 

— Ouaip, ok... Bah... euh... Je réfléchis attend... Mais c'était bien ? 

— On s'en fout ! C'est même pas le sujet... Même si c'était le meilleur coup de ma vie, ça resterait un truc de connasse. 

— C'est clair, mais bon... foutue pour foutue, autant ça vaille le coup, non ? 

— Justement, c'est le truc : ça peut pas valoir le coup. Parce que du coup, Camille m'a quittée. Et elle a raison, je me serais quittée aussi à sa place. 

— Attend, quoi ??? Comment elle est au courant ? 

— Je sais pas... Apparement, elle nous a vues. Mais peu importe, de toute façon je lui aurai avoué. Je pouvais plus assumer d'être une telle merde. 

— Mais euh... et avec Lola... c'était sérieux ou vous avez juste baisé une fois ? 

— C'était pas vraiment sérieux, c'était... bizarre. On se voyait le matin, on s'entraînait ensemble, on parlait un peu, mais ça ressemblait pas à une vraie relation. C'était juste... une sorte de respect mutuel... Sauf que maintenant que j'ai ruiné son match, elle me déteste encore plus que Camille. 

Dans la même équipe [girlxgirl]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant