Confession en altitude

693 37 53
                                    

Bien que les paroles de Jordan n'étaient que destruction, son toucher en était le contraire. Attal n'avait aucune envie de faire confiance à cet homme, mais, une nouvelle fois perdant, il laissa Bardella replacer sa main. De toute façon, ce serait la première et l'unique fois que les deux hommes se serreraient la main hors d'un contexte politique, pensa Gabriel.

« Vous ne m'avez pas répondu. Est-ce que votre but n'est que de devenir une pâle copie du président ? »

D'une part, Jordan appréciait le fait de lancer une nouvelle fois ce pique dont il était fier, mais d'autre part, c'était le seul moyen qu'il avait trouvé pour que les pensées de son voisin de siège soient fixées sur autre chose qu'un supposé crash imaginaire.

« Bien sûr que non. »

En effet, l'aversion qui enflammait Gabriel lorsqu'il entendit une nouvelle fois cette phrase effaça un peu plus sa peur.

Cette réponse titilla une curiosité inconnue chez Bardella, qui, en plus d'en apprendre un peu plus sur la physionomie des mains de son adversaire, souhaitait maintenant connaître davantage la personne qui était à ses côtés, prêt à remettre en question ou bien valider la vision négative et bornée qu'il avait de celui-ci, le temps d'une autre turbulence.

« Alors pourquoi êtes-vous ici ? »

Demanda Bardella.

Gabriel ferma les yeux, évitant tant bien que mal le regard de l'homme qui, une nouvelle fois, semblait avoir perdu son étiquette d'adversaire. Mais alors que l'avion tremblait une nouvelle fois, il n'avait qu'une envie : perdre sa peur dans la sensation du toucher de Jordan. Et s'il devait répondre à cette question pour y parvenir, le sacrifice était minime.

« Je souhaite juste offrir l'aide que je n'ai pas eue aux gens. »

Ces quelques mots s'étaient échappés dans l'air, une confession qui avait maintenant pour résidence le bleu du ciel et les pensées de Jordan.

Quelques secondes à peine après cet aveu, l'avion se stabilisa, laissant Gabriel plongé dans un regret immense. Il aurait finalement dû être celui qui écoutait ses propres paroles et apprendre à se taire. Attal aurait presque préféré que l'avion se crashe plutôt que de ressentir une once de ridicule qui prenait un peu plus possession de lui.

Il tira rapidement sa main avant de racler sa gorge. Cet acte marqua le début d'un silence qu'aucun des deux hommes n'osa briser, restant ainsi suspendus aux derniers mots prononcés par Gabriel.

Lorsque la vue du jeune homme à travers le hublot fut une nouvelle fois le témoin du béton du tarmac, il sentit enfin ses muscles se détendre. Il n'attendit donc pas une seconde avant de défaire sa ceinture et se lever brusquement, poussant sur son passage les jambes de Bardella.

« Il s'agissait bien d'une bonne surprise, Monsieur Attal. »

S'exclama Jordan dans le dos d'Attal.

Celui-ci ne préféra pas répondre. Tout ce qu'il espérait était que chaque phrase qu'il avait prononcée allait rester là où il les avait dites, soit à plus de 9 000 mètres de hauteur.

Il se précipita d'un pas rapide vers la sortie, au point qu'il rentra en collision avec un autre passager du vol, l'obligeant à se retourner afin de s'excuser convenablement.

« Excusez-moi. »

Prononça Gabriel d'un souffle, ce qui le poussa à tourner son regard de la sortie pour faire de nouveau face à l'homme qu'il essayait de fuir. Bardella arborait une expression que le ministre n'avait encore jamais vue sur son visage, ce qui n'augmentait que son envie de partir loin de cet endroit maudit.

Coup de politique (Attal x Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant