Que la partie commence

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Gabriel se rappelait vivement les événements qui s'étaient déroulés ce jour-là, mais plus particulièrement de comment cela avait marqué le début d'une histoire obsessionnellement interdite. Un face-à-face avec le destin.

Cela faisait au moins une heure depuis les résultats des élections européennes et, à chaque seconde dont elle était composée, cela alourdissait un peu plus l'atmosphère. Les nombres qui s'étaient projetés avaient laissé un silence, preuve d'une déception immense au sein du parti du Président.

Attal avait ressenti une forte déception, debout en face de ces résultats. Contrairement à ses collègues, il n'était pas triste, cette tristesse était depuis longtemps camouflée par une aversion brûlante et un faux-semblant de courage qui nourrissait sa détermination.

Ses yeux étaient rivés sur le nombre qui était rattaché à son parti pendant de longues secondes. Son parti méritait plus que cela, Gabriel devait avoir plus que cela. Pendant que ses pensées étaient brouillées par la noirceur de ses sentiments, les nombres présents sur l'écran avaient disparu pour monopoliser la vision du Premier ministre par le visage représentant sa défaite et une des sources de son aversion. 

Comment cet homme pouvait-il célébrer ? Comment cet homme pouvait-il avoir gagné ? Comment Bardella pouvait-il arborer un sourire pendant que lui ne pouvait que contempler un peu plus longtemps sa défaite ?

Rien ne lui plaisait chez cet homme. Quelques débats en face de lui avaient suffi pour avoir un avis négatif sur cette personne. Et cette hostilité était particulièrement nourrie par la façon dont les médias adoraient mettre en parallèle leurs carrières. Leurs noms étaient comme liés par une force inconnue que certains appelleraient le destin.

En plus d'une opposition de leurs partis, il y avait maintenant une sorte de face-à-face entre les deux hommes. Une compétition forcée aux yeux de Gabriel mais qui, malgré sa réticence, ne pouvait s'empêcher de la voir. Il se trouvait en opposition au RN, en opposition au jeune représentant du RN, mais pire que cela, en opposition à Jordan Bardella.

Une chose était sûre, il serait prêt à tout pour se saisir en premier de ce que les deux hommes souhaitaient, représenter leur parti en ayant le pouvoir.

C'était donc dans ce contexte qu'il se trouvait assis autour de cette table, passant du regard les grandes têtes de la politique française qui l'entouraient, pour finalement poser ses yeux sur le Président. Celui-ci arborait une expression sérieuse, comme à son habitude, mais à cet instant Gabriel sentait que quelque chose dénotait. Bien qu'il attendît plus qu'impatiemment de connaître la raison de cette réunion improvisée, il savait que lorsque Macron ouvrira la bouche, plus rien ne sera pareil.

« Merci d'être venus aussi rapidement » 

s'exclama le Président avant de s'appuyer sur son bureau, donnant une intention grave à sa phrase.

« J'ai décidé d'annoncer la dissolution de l'Assemblée nationale. »

Ces quelques mots eurent un effet assourdissant pour Attal, qui sentit en quelques secondes tout ce qu'il avait construit s'effondrer sur lui, l'asphyxiant davantage à chaque parole qu'ajoutait le Président.

« Je pense qu'avec la victoire du RN et la réaction que celle-ci a provoquée chez les Français, il est temps d'avancer vers un renouveau. »

Renouveau ? C'était ce que Gabriel essayait de faire depuis qu'il avait eu l'honneur de porter le titre de Premier ministre. Tout son travail, tout son soutien, la dévotion de sa vie n'étaient donc pas suffisants ?

« Je pense que nous avons une carte à jouer maintenant, et cela passe par la dissolution de l'Assemblée nationale. »

Il avait suffi d'une phrase pour que son rôle de Premier ministre soit remis en jeu malgré tous les efforts dont il avait fait preuve. Ce qui amplifiait la pression qu'il ressentait sur sa poitrine était le fait que celui qui avait provoqué la chute de ce château de cartes représentant sa carrière et que Gabriel avait méticuleusement construit était également celui qui lui avait tendu en premier temps sa main.

Coup de politique (Attal x Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant