vos paroles

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Bien que Jordan ait prouvé la souveraineté de son succès couronné une nouvelle fois par la lumière des projecteurs et récompensé par un flot d'acclamations qui n'étaient que l'écho creux de la solitude qui emportait lourdement son être, il se trouvait à continuer sa course, poursuivant la quête d'une victoire bien plus personnelle qui saurait enfin remplir la cavité de son âme par l'étreinte tendre de sa chère libération.

Les rues anxiogènes qu'il s'efforçait de prendre le plongeaient dans une noirceur rythmant ses efforts par la réverbération de sa respiration étouffant toutes les angoisses que sa raison criait inlassablement, essayant de convaincre son hôte que chacun de ses pas l'éloignait de ce qu'il avait tant désiré, soit le vice du pouvoir camouflé par la brillance d'un bonheur promis et qui pourtant était bien plus incertain que celui qui l'attendait à la ligne d'arrivée de cette épreuve d'endurance sentimentale.

Le vent caressait violemment ses joues, emportant sur son passage tout doute, toute résilience qui pourraient de nouveau mettre en péril l'évasion dont Bardella était à présent l'homme coupable. Lui qui avait tant craint le chemin sombre que lui désignait son cœur osait à présent, les yeux fermés, se laisser guider par sa propre passion, tendant inlassablement sa main à la rencontre de celle de Gabriel.

Une euphorie nouvelle enlaçait son corps d'une chaleur que seuls les êtres épris pourraient ressentir, rendant le mal qui le rongeait bien plus agréable. Il y avait un plaisir troublant lorsque les battements de son cœur, de plus en plus oppressants, éjectaient la sève de ses sentiments dans chacune de ses veines, poussant son enthousiasme à un paroxysme jamais égalé.

Il n'avait emprunté cette route qu'une seule fois et pourtant la familiarité surprenante des lieux embellissait davantage sa fuite, le réconfortant dans le choix que lui avait soufflé sa convoitise. Son attention dévouée, pour la première fois, non sur l'homme qui se trouvait sous son propre costume de politicien mais bien sur celui que son regard cherchait éperdument, l'empêchait de ressentir les vibrations de son téléphone qui essayait tant bien que mal de le retenir dans l'accablement du monde duquel il venait de s'échapper.

Jordan ne venait pas de faire demi-tour devant le fruit de son désir, l'absence de regard rétrospectif et regrettable sur le médiocre spectacle qu'il venait de performer était la preuve suffisante que la source de son éloignement adressait le dénouement tragique auquel il ne voulait plus se plier, devenant écrivain de ses paroles ainsi que de ses propres didascalies.

Les minutes filaient assorties au paysage qui défilait sous ses yeux, faisant au fur et à mesure taire la dualité qui avait marqué violemment la peau du jeune homme depuis bien trop de semaines. Le seul lien qui devait à présent teinter sa peau de la rougeur de son ressenti était celui qui, bien qu'invisible, le soudait d'une douceur torride à l'homme qui illuminait la noirceur de son manque par l'addiction nouvelle de sa chair et affection.

Bardella se trouvait ignorant de ce qu'il était réellement, maintenant défait du rôle dont il avait été adoubé. Le titre qu'il portait fièrement jusque-là n'était plus qu'un accessoire dont il s'était défait le temps de trouver la pièce maîtresse à l'œuvre de sa vie. Son être n'était plus qu'une toile vierge et son esprit, le peintre qui attendait de se retrouver au chevet de sa muse afin de pouvoir enfin peindre l'essence de sa propre existence.

À vrai dire, perdu dans la tendresse de ses pensées, il ne s'était pas aperçu que son inconscient lui avait déjà permis de se trouver devant l'entrée de l'appartement de son opposant, haletant d'impatience et pour autant prenant le temps de chercher dans la pénombre, le souffle qui lui permettrait d'avouer à Gabriel le secret que sa peine ne pouvait plus contenir.

La chaleur de son doigt s'heurta au métal froid de l'interphone qui remplissait de ses bips aigus le vide qui entourait le jeune homme. Aucune hésitation ne parfumait son geste, le temps que Jordan avait perdu dans le tourbillon de son indécision lui avait coûté déjà bien trop cher en état d'âme. Chaque seconde d'attente supplémentaire n'était plus qu'un supplice atroce auquel la moindre note de la voix de Gabriel serait la délivrance instantanée.

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Coup de politique (Attal x Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant