L'écho de mes pensées

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Bardella, à présent abandonné par ses propres lèvres qui étaient restées tues, incapable de confesser ce dont son cœur demeurait perpétuellement ignorant, n'avait d'autre choix que de se retirer une nouvelle fois silencieusement du lieu où sa présence n'était plus que futile.

Chaque pas qu'il effectuait effaçait davantage la lumière d'une foule exaltée, laissant la faible luisance de la lune éclairer l'incompétence avec laquelle Jordan avait asphyxié l'idylle envoûtante qu'il avait utilisée pour finement parfumer ses paroles.

Devant Gabriel, il n'avait été qu'un homme prêt à trahir ce qu'il pensait fermement être inébranlable, poussé à renier de la symphonie de ses pensées, sa loyauté, ses convictions et son propre sens de l'honneur. Et pourtant, c'était à présent plongé dans l'égoïsme de son désir qu'il se retrouvait réprimandé à laisser échapper de son regard la douceur des traits de celui qu'il avait égaré de son mutisme.

Il n'avait plus que sa piètre imagination comme guide à travers l'inconnu sombre de sa propre volonté, une quête vaine afin de ne serait-ce qu'oser poser une once de sens à la tourmente impétueuse dans laquelle il n'était qu'un misérable naufragé.

Une recherche qui ébranlait peu à peu un jeu où les yeux de Bardella offraient la réflexion de ses propres cartes à celui qu'il ne pouvait que prétendre détester. Abandonné à la dérive de ses sentiments et noyé par le flot de son questionnement, pourquoi avait-il décidé de sauter, la raison et l'absurdité liées, du navire de sa connaissance ?

Le jeune homme se fondait d'une façon terriblement parfaite dans la noirceur de la nuitée, tel le reflet de son esprit malade qui errait vers le lieu où celui-ci avait été condamné. Lorsque Jordan se trouvait submergé par les flots de la rudesse du monde, contraint de ne pouvoir succomber au liquide vacillement doré, il n'avait pour seul choix de divaguer en direction de l'endroit qui anéantissait tout ressenti de la lourdeur de son conditionnement.

À cette heure aussi tardive, il n'était qu'une entité isolée, l'ombre de sa peine déambulant dans les couloirs froids d'un bâtiment construit des briques de l'héritage de son parti. Chaque seconde qui le rapprochait du lever du soleil expirait un souffle glacial sur l'ardeur de sa peau.

Jordan ne savait pas clairement ce qu'il comptait faire, une fois dans le bureau qui lui avait été attribué, sûrement poursuivre son absence de paroles, après tout, ses pensées étaient assez bruyantes, un vacarme traduisant l'incertitude de qui il était en train de devenir. Bardella se réduisait à n'être qu'une simple décoration dans son propre bureau, dépourvue de sens moral, mais d'une praticité sans faille à ceux qui le manipulaient de leurs mains pécheresses.

Tel un déjà-vu déplaisant, une lumière chaude s'évadait du dessous de la porte qui renfermait la promesse d'un bonheur troublement incertain. Le corps de Bardella se crispa d'une anticipation craintive en envisageant la confrontation précipitée de sa vulnérabilité sentimentale face à la personne qui manœuvrait le navire duquel il s'était échappé le temps d'une soirée.

Bien qu'il eût la possibilité de revenir sur ses pas, il n'avait nul autre endroit où se recueillir, en somme, malgré son scepticisme, ses quatre murs restaient sa maison. Capable de réflexion mais non d'apprentissage.

Ainsi, d'une inspiration, il regroupa le courage nécessaire pour pousser de ses doigts la poigné de la seule protection qui l'épargnait de la noyade. Sous ses yeux, se dérobait la familiarité de cette pièce, mais également celle de la personne qui se trouvait assise à sa place, là où ses espoirs avaient été gravés d'une écriture différente de la sienne.

« Que fais-tu ici ? »

demanda Bardella, laissant à chacun de ses mots la pression qui congestionnait ses muscles s'évaporer à travers la chaleur de l'intimité dans laquelle il venait de quitter la froideur du couloir.

Coup de politique (Attal x Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant