La fragrance de notre pacte

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Cela faisait déjà quelques jours depuis l'échange que Gabriel avait eu avec Bardella, et il essayait tant bien que mal de ne pas être rongé par les remords que provoquait son choix. Il s'était ajouté une nouvelle source d'angoisse qui le gardait éveillé la nuit, et ce n'est pas le peu de vitamines qu'il prenait qui allait effacer ses heures de sommeil manquantes.

C'était donc à cause de cela qu'il se retrouvait dans le couloir du plateau de tournage où allait se dérouler le débat de ce soir, à se ronger une nouvelle fois les ongles d'une main pendant que l'autre tenait fermement ses dossiers. Sans vraiment le vouloir, il voyait cette confrontation comme un moyen d'honorer la confiance que Macron lui avait donnée.

Chaque débat était également son moyen de se rapprocher de son but et de pouvoir s'adresser directement aux personnes par lesquelles il voulait être écouté.

« Gabriel, ne te ronge pas les doigts, ça va rendre mal à la caméra des ongles à moitié mordus », s'exclama sa collègue qui l'accompagnait à chacun de ses déplacements politiques.

Attal avait essayé de nombreuses fois de trouver des alternatives à cette mauvaise habitude, mais rien ne pouvait l'empêcher de traduire ses angoisses par ce geste anodin.

« Mon visage contrebalancera cela », rigola Gabriel, chassant comme il le pouvait son stress de son expression faciale par un sourire.

« On va pouvoir vérifier cela, c'est l'heure », répondit son accompagnatrice, qui pointa de son menton les journalistes qui commençaient à s'installer sur les sièges en face des trois pupitres.

« Souhaite-moi bonne chance », souffla Gabriel alors qu'il s'apprêtait à faire son premier pas sur le plateau qui allait dans quelques secondes ressembler à un ring de boxe.

À peine venait-il d'entrer sur la scène que sa vision fut éblouie par la lumière des projecteurs, essayant tant bien que mal de trouver la place qui lui avait été attribuée. Et bien qu'il eût gardé les yeux plissés, il vit clairement Bardella entrer à son tour sur le plateau, portant sur son visage une des trois expressions qu'il semblait capable d'exprimer.

Celui-ci s'approcha d'Attal avant de lui tendre la main, et contre toute attente, lorsque Gabriel rencontra son regard, la flamme qui y brûlait il y a peu semblait s'être éteinte, laissant une obscurité glaçante et pourtant si habituelle du jeune homme.

« Bonjour, Monsieur Attal. »

Pendant que leurs deux mains se touchaient, de nombreux non-dits flottaient autour d'eux, à cause d'un contrat tacite, ce qui rendait l'atmosphère bien plus pesante qu'il y a quelques minutes. Celle-ci était comme un poids sur la poitrine de Gabriel, qui devait déjà porter la lourdeur de son angoisse, presque prête à s'effondrer, victime de sa propre culpabilité.

« Bonjour. »

Il ne pouvait s'empêcher de se demander s'il s'agissait d'une simple commodité ou d'un rappel caché du fil par lequel ils étaient tous deux liés. Attal n'eut pas le temps d'avoir la réponse à sa question que la main de son adversaire s'échappa de la sienne.

« Bonjour, mesdames et messieurs, et bienvenue au premier débat de ces élections législatives, une élection historique. Ce soir, les trois partis majoritaires vont débattre sur les points principaux qui intéressent les Français. »

Cela sonnait le début d'une soirée qui, comme annoncé, était chargée d'une tension palpable. Après tout, des hommes criant tout en se coupant la parole en parlant de politique représentaient parfaitement ce qu'était censé être un débat.

« C'est ainsi que mon parti assurera une hausse du pouvoir d'achat », s'exclama Bardella, appuyant son propos en plaçant ses mains l'une contre l'autre.

Coup de politique (Attal x Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant