chapitre 7 C✅️

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— J’ai essayé, mais ils étaient trop violents. Je craignais de me prendre des coups.
— Et Lee-Jae et Félix ?
— Ils discutaient dehors, me raconta-t-elle. Ils sont arrivés en même temps que madame Gordon et monsieur Adams.
Elle marqua une pause, puis s’effondra en pleurs. J'entrepris de lui tapoter le dos en lui disant que ce n'était pas très grave. Des bagarres, il y en avait à tout instant dans le Sélectia.
— Le problème, c’est que je m’en veux. C'est de ma faute, c'est à cause de moi qu'il s'est battu, renifla-t-elle entre deux sanglots. Il y a une Mang qui m’a bousculée, j’ai pété les plombs parce qu’elle avait sali ma tunique.
Elle s’arrêta un instant pour me montrer sa tunique tachée de sauce.
— J’étais sûre qu’elle l’avait fait exprès. Ryan s’est interposé entre nous quand j'ai voulu en découdre avec elle. Je pense qu'à ce moment-là, il y a eu un quiproquo, car quand Noah est arrivé dans le réfectoire, il a cru que Ryan s’en prenait à sa petite amie.

Elle éclata à nouveau en sanglots, tandis que c’est moi qui reçus un coup en plein cœur, diminuant mon intérêt pour la situation. Je laissai complètement de côté ma tartine de confiture, ne me préoccupant plus du bruit des cuillères heurtant les bols ni des murmures et discussions des trainees, dont le sujet était sûrement lié à la récente bataille. Tout ce qui m’importait, c’était de me rendre chez moi pour pleurer.
Je me souvenais de la Mang que j’avais surprise assise sur ses cuisses dans le train ; c’était probablement elle, la fameuse petite amie. Mais pourquoi donc me focalisais-je sur ce fait ? Qu’est-ce qui n’allait pas chez moi ? Cela ne me regardait en rien qu'il ait ou non une petite amie. Dans un effort surhumain, je me reconcentrai sur Lee-Soo, qui était encore dans un état second.
— Alors ?
— Ils ont été convoqués à l'administration centrale. Lee-Jae et Félix les ont accompagnés. Ils m’ont demandé de rester pour ne pas envenimer la situation.
Elle se remit à pleurer de plus belle tandis que j’essayais de crucifier du regard ceux qui nous guettaient curieusement depuis tout à l'heure. Au bout de quelques minutes pendant lesquelles j’ai tenté du mieux que je pouvais de consoler la rouquine, le reste de la bande arriva enfin. Lee-Soo se jeta dans les bras de Ryan tandis que je cherchais des yeux Noah, qui passa à côté de moi sans me jeter un regard. Le fait qu’il m’ignore, bien que prévisible, me fit l’effet d’un coup de poignard. Félix s’assit à ma droite, me poussant à reporter mon attention sur le groupe.
-        Qu’est-ce qui s’est passé ?
— Nous avons été dépouillés de trente points pour la bagarre et de cinquante pour les dégâts causés, annonça Ryan.
— Je me sens si mal, commença à se plaindre sa petite amie en portant ses mains à ses lèvres pour retenir un énième sanglot. Je n'aurais pas dû m’emporter pour si peu.
— Si ! Tu as bien fait. Elle avait fait exprès de te pousser, j'ai bien vu.
— Ohh… je… CO…
J’aurais pu trouver cela drôle de voir la petite bavarde perdre ses mots, mais c’était sans compter le regard sérieux que lançait Ryan. Je voyais bien qu’il avait envie de me dire quelque chose.
— Taekook, nous ne voulions pas t’en parler, mais je pense que tu devrais être mise au courant.
— Non, Ryan... intervint tout de suite Lee-Soo en posant sa main sur son bras.
— Au courant de quoi ? demandai-je instantanément, ma curiosité piquée a vif.
— Ce n’est pas la première fois qu’un membre de la clique de Noah s’en prend à nous.
— Je ne comprends pas, dis-je perplexe.
— À Lee-Soo et à Félix.
— Mais pourquoi ? Cette histoire ne concerne que Noah et moi, non ? Qu'est-ce que vous avez à voir là-dedans ?
Lee-Soo prit la parole en voyant que personne ne semblait vouloir répondre :
— En fait, ce qui se passe, c'est que le prince Jin a déclaré juste après notre départ de Jjangu, que quiconque s’en prendrait à toi serait dépouillé de 10 000 points, ce qui équivaut à une élimination totale du Sélectia en fait. Je pense que c’est pour cela qu’ils nous attaquent nous,  plutôt que toi, mais ne t’inquiète pas, ce n'est rien de bien grave.
Je tombai des nues. Ils étaient devenus des souffre-douleurs à cause de moi. Et le pire, c’est que je n'avais même pas remarqué.
— Je... vous... mais...
Je m'arrêtai un moment pour faire le tri dans mes pensées. Trop de choses se bousculaient dans ma tête, et je n'arrivais plus à formuler une phrase cohérente.
— Comment se fait-il que je n’ai pas été informée de la déclaration du prince ? Quand a-t-elle eu lieu ? Je n'ai rien entendu de tel. Pourquoi ne m'avez-vous rien dit ?

Je débitai ces questions d'une voix haletante alors que les pièces du puzzle s’assemblaient lentement.
— Nous avons tous reçu l'information sur nos montres, mais puisque tu es la personne concernée, nous supposons que tu ne l'avais pas reçue. Au début, on pensait que tu jouais simplement l’indifférence et que tu ne voulais pas en parler, donc nous avons voulu respecté ton choix. Ce n’est que bien plus tard, que nous avons commencé à douter que tu sois au courant.
Je regardai la montre à mon poignet, que tous les BT21 avaient depuis notre premier jour au Sélectia. Elle nous servait de moyen de communication direct avec l'administration, entre autres choses. En l’actualisant, je vis que seul le nombre de mes points y figurait.

Je me levai de la table avec un seul objectif : retrouver Noah.

Le geste du Prince m'allait droit au cœur, sachant que les habitants de Bangtan pouvaient devenir rapidement toxiques quand il s’agissait des Princes. Mon affront n'était pas passé inaperçu. Certes, lui, il était passé à autre chose, mais il était clairement naïf de ma part d'avoir crû que tout était rentré dans l'ordre aussi facilement, et qu'il n'y avait pas une raison bien précise à cela. Il était évident qu'il devait y avoir anguille sous roche. Comment avais-je pu me laisser avoir de la sorte ? J'aimais trop les situations simples ; c'était la seule explication. J'avais voulu croire que tout allait bien et je n'avais pas cherché plus loin que le bout de mon nez. Mais maintenant, ce sont mes amis qui en payaient le prix. Je ne pouvais plus rester les bras croisés.
— Où vas-tu ?
Je ne leur répondis pas et me dirigeai d'un pas décidé vers la table de Noah. La Mang du train y était assise, de nouveau sur ses genoux, comme si elle n’avait plus jamais connu les chaises. Malgré le léger pincement que je ressentis au cœur, je continuai d’avancer.
À chaque pas que je faisais, le murmure ambiant se tut peu à peu, jusqu'à ce que le réfectoire soit plongé dans un silence pesant. Les regards se fixèrent sur moi, emplis de curiosité et d'appréhension. Les discussions s’éteignirent, remplacées par une tension palpable qui se répandait dans l'air comme une chape de plomb. Les bruits de couverts et de chaises se turent, laissant place à un souffle collectif, une attente silencieuse et angoissante.
Arrivée devant la table de Noah, je sentis le poids de tous ces yeux braqués sur moi. Le silence était si profond qu’on pouvait presque entendre le battement de mon cœur, résonnant comme un tambour dans cette atmosphère chargée de suspense. Les visages des autres BT21 exprimaient une variété d'émotions, allant de l'excitation à l'inquiétude.
— Il faut qu’on parle, annonçai-je de but en blanc.
Noah leva à peine les yeux de sa petite amie, ses bras serrant fermement sa taille.
— Je suis occupé, dit-il, indifférent.
— J’ai dit... IL FAUT QU’ON PARLE, repris-je, le regard en feu et le ton ferme, pour signifier clairement que je ne rigolais pas.
Il me regarda alors, l’air contrarié, mais acquiesça d’un geste agacé.
— Je t’écoute.
— Ailleurs, répliquai-je, en lui tournant déjà le dos, pour quitter le réfectoire, déterminée à le faire quitter sa place.

Map of the soul : 7Où les histoires vivent. Découvrez maintenant