Je rentre chez moi, les yeux plein de larmes.
Il m'a fallu faire preuve d'une grande force d'esprit pour ne pas éclater en sanglot dans le métro. Pierre et Zoé ont passé leur temps à commenter la vidéo, se demandant qui était cette fille et si le « pudique » Léon Marchand, celui qui ne dévoile presque rien de sa vie privée, à part cette histoire de bénévole déjà oublié (qu'ils n'ont jamais associé à moi), sortait avec cette fille.
Je n'ai pas eu le temps de dire quoi que ce soit que de nombreuses personnes s'interrogeaient déjà autour de moi. En voyant la vidéo, et en entendant les commentaires de Zoé et Pierre, d'autres personnes ont ouvert l'application Tiktok. La vidéo n'avait été postée qu'une heure plus tôt, mais elle tournait déjà partout, partagé et repartagé.
Vraiment, je déteste Tiktok !
« C'est vraiment Léon Marchand ? »
« Tu crois que c'est sa copine ? »
« C'est qui cette fille ? »
« Elle s'appelle Axana Merckx, c'est une nageuse ».
« Elle est belge et canadienne ! Étrange comme association... »
« D'où tu critiques les belges toi ? »
« Je ne critique personne, mais je dis juste que sirop d'érable et gaufre au chocolat liégeois, ça ne va pas ensemble »
« ?????? »
« Pas compris »
« Je crois qu'elle étudie l'informatique avec lui à Phoenix »
« Elle fait aussi de la natation ?».
« Non, elle a arrêté cette année. »
« Mais ils se connaissent d'où ? Ils sont amis ? »
« Bah, plus qu'amis apparemment ! Ça doit être sa meuf ».
Je n'ai pas eu le temps de m'interroger sur la pertinence ou l'imbécilité de certains commentaires. Le rame de métro s'est arrêtée, je suis descendue et me suis enfuie sans même dire au revoir à Zoé et Pierre. Une fois dans la rue, j'ai éclaté en sanglots. Sur le chemin, je n'ai pas pu m'empêcher de repasser cette vidéo.
À croire que j'aime me faire du mal.
En arrivant chez moi, j'étais décidée à me calfeutrer dans ma chambre et disparaître sous la couette, mais Jacks, mon plus jeune frère, est arrivé au même moment. Je venais à peine de passer la porte de ma maison, lui retirait ses chaussures. Il a aperçu mes larmes, et avant même que je ne dise quoi que ce soit, il a tendu ses bras. Si mon frère Marius est un attardé des sentiments, Jacks s'est toujours montré très sensible, voir hypersensible. Il m'a serré contre lui un moment, puis a relevé mon visage pour essuyer mes larmes, avant d'embrasser mon front.
— Viens, on va prendre un goûter, ça ira mieux après.
J'étais presque tentée de réclamer une gaufre au chocolat ET au sirop d'érable, pour prouver aux commentaires stupides qu'on pouvait très bien marier les deux, quand je me suis souvenue que cela faisait référence aux parents de cette fille.
Axana.
Mais c'est QUI elle ?
Pendant que Jacks me prépare un chocolat chaud et sort des gaufres au sucre d'un vieux paquet plastique (nous n'avons malheureusement que ça), je pose mon téléphone sur ma table, m'attendant presque à ce qu'il me saute dessus pour m'attaquer.
— Tu veux en parler ? demande-t-il.
— Je ne sais pas.
— C'est à cause de Léon ?
Comment peut-il être aussi pertinent ? Ne sachant quoi dire, je lui montre simplement la vidéo. Jacks la visionne jusqu'au bout, avant de déclarer :
— Ça ne veut rien dire.
— Ah bon ? T'es sûr ? Il te faut quoi de plus comme preuve ? Une vidéo d'eux deux dans un lit en train de...
Je ne finis pas ma phrase. Cette vision cauchemardesque de mon copain, dans un lit et dans les bras d'une autre, me rend fébrile. J'ai envie de me remettre à pleurer. Jacks dépose deux gaufres sur une assiette et un chocolat chaud, ainsi qu'un mouchoir. J'essuie mes larmes, me mouche. Je ne dois ressembler à rien.
— En plus, elle est jolie.
Cela fait déjà dix fois que je vois cette vidéo. Cette fille est vraiment jolie. Plus jolie que moi en tout cas. Jacks pousse un profond soupir, tout en croquant dans sa gaufre.
— T'as fini de faire la drama queen ?
— Il m'a trompé, Jacks.
— Tu n'en sais rien, rétorque-t-il. OK, tu as vu une vidéo où il embrasse une fille. Et encore, à bien y regarder, c'est plutôt elle qui l'embrasse. Comment sais-tu qu'il est consentant ?
— Il l'a laissé mettre ses mains dans son dos.
Et sur ses fesses.
Je l'ai vu !
— OK, mais la vidéo dure à peine 30 secondes, tu ne sais pas ce qu'il s'est passé après. Donc, au lieu de te faire des nœuds au cerveau, tu devrais plutôt appeler Léon.
— J'ai aucune envie de l'appeler, je le déteste à l'heure qu'il est. Je le ferai plus tard.
Jacks termine sa gaufre, puis en prend une autre, avant de tendre son doigt dans ma direction.
— Hors de question. C'est complètement con d'attendre, tu vas te faire des nœuds au cerveau toute la soirée, tu vas pas arriver à réviser pour ton épreuve de demain et tu vas te monter la tête toute seule alors qu'il ne s'agit peut-être que d'un malentendu.
— ELLE AVAIT SA BOUCHE SUR LA SIENNE !
Désolée de crier, mais cela me paraît plutôt clair comme message. Jacks soupire encore. Qu'est-ce qu'il peut m'agacer quand il fait ça.
— Écoute Apo', la communication, c'est la clef du succès dans un couple. Tu peux choisir de quitter Léon maintenant, et de croire cette vidéo. OU, tu peux lui demander sa version des faits et une explication. N'oublie pas ce qu'il s'est passé durant les JO. N'oublie pas que les gens sont prêts à tout pour inventer des conneries, surtout dans le monde d'aujourd'hui. Ne laisse pas une simple vidéo détruire une relation que tu t'efforces de préserver depuis six mois.
— Depuis quand es-tu devenu si sage ?
Depuis quand Jacks me tient-il de si grands discours ? On dirait mon père. À ce moment-là, je me rends compte que le petit garçon qu'il était à bien grandi. Depuis que Maman n'est plus là, il a changé. Il est plus mature, plus sûr de lui. Il est entré en dernière année au lycée, il s'en sort bien malgré ses difficultés, et il tient le coup...
Beaucoup mieux que moi en tout cas.
Je médite ses paroles, tout en buvant mon chocolat chaud.
Puis finalement, je déclare :
— Tu as raison, je vais appeler Léon.
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L'océan qui nous sépare : Léon Marchand et Apolline, la bénévole
FanfictionRésumé : Les jeux olympiques de Paris sont terminés. Six mois sont passés, et malgré la distance, Apolline Estanguet et Léon Marchand sont bien décidés à poursuivre leur relation amoureuse. Loin des paparazzis et des journalistes, ils s'écrivent...