En terrain connu

Chapitre 12 - Rafael

Los Angeles - 08 Octobre 2024

Je me tiens là, juste à côté de Jay, prêt à affronter ce dernier point comme si ma vie en dépendait. Le score est à 24-23, et on mène, mais ce n'est pas assez. Il nous faut ce dernier point pour sceller la victoire. Mon souffle est court, mes muscles tendus comme des cordes prêtes à se rompre. Le gymnase est plongé dans un silence pesant, à peine perturbé par les murmures du public et les respirations des joueurs. Je peux presque sentir le poids de chaque regard fixé sur nous. L'air est épais, chargé d'électricité. Jay se prépare à servir, et je le sens se concentrer, rassemblant toute son énergie. Il fait quelques pas en arrière, la balle entre ses mains, ses doigts la caressant presque avec une délicatesse trompeuse.

Je ne peux pas quitter des yeux l'équipe adverse, les Spikes de Denver. Ils sont postés, prêts à bondir sur le moindre signe de faiblesse. Chaque joueur en face de moi est une menace, chaque mouvement un piège potentiel. La sueur perle sur mon front, glissant le long de mes tempes, mais je l'ignore. Tout ce qui compte, c'est ce moment. Je jette un coup d'œil à Jay. Je sens son regard se durcir, et une fraction de seconde plus tard, il lance la balle en l'air. Tout semble se dérouler au ralenti. La balle monte, atteint son apogée, et puis Jay bondit. Je l'entend frapper le ballon avec une force qui résonne dans tout le gymnase. Le claquement sec du cuir contre sa main me fait l'effet d'une détonation.

Nous nous dispersons, chacun retrouvant sa place, nos mouvements rapides et synchronisés, presque instinctifs. Le ballon file de l'autre côté du filet avec une vitesse incroyable, mais les Spikes ne se laissent pas impressionner. Ils ripostent immédiatement, renvoyant la balle avec une précision redoutable. Le ballon traverse l'air, menaçant, mais Alex, notre libero, se jette en avant, son corps fendant l'air pour intercepter la trajectoire. Il effectue une manchette parfaite, le ballon s'élevant de nouveau, comme s'il défiait la gravité.

Ethan s'empare de la balle avec une agilité surprenante. Il la maintient en l'air juste assez longtemps pour que Adonis se positionne. Nos regards se croisent, un échange muet qui en dit long. Ce n'est pas la première fois que nous nous retrouvons dans cette situation, et ce ne sera sûrement pas la dernière. Sans un mot, je comprends ce qu'il attend de moi. Je prends une profonde inspiration et m'élance dans les airs. Le monde entier semble se figer, tout autour de moi se fond dans une sorte de flou, sauf le ballon. Je le vois, je le sens. Tout mon être se concentre sur cet instant.

Je frappe la balle avec une force dévastatrice, sentant l'impact résonner dans tout mon corps. Elle traverse le filet à une vitesse fulgurante, échappant aux mains tendues des adversaires. Le ballon frappe le sol avec un bruit sourd, rebondit, et finit sa course contre le mur du fond. Le coup de sifflet final retentit exactement au moment où mes pieds touchent le sol. Le match est terminé. Une autre victoire pour les L.A Titans.

La tension se dissipe en une explosion de cris et d'acclamations. Je suis rapidement entouré de mes coéquipiers, leurs sourires illuminant leurs visages fatigués. Je ressens une vague de satisfaction m'envahir, mais elle est teintée d'amertume. Alors que nous saluons nos adversaires, je n'arrive pas à me débarrasser de cette sensation de vide. Je devrais être heureux, mais une ombre plane sur mon esprit. Leliana.

Depuis Chicago, elle et moi ne nous sommes pas adressé un mot. Chaque fois que je pense à ce qu'il s'est passé, à la façon dont je l'ai traitée, un nœud se forme dans ma poitrine. Ce que j'ai dit ce jour-là, la colère qui m'a consumée... Je m'en veux. Et quand j'ai découvert la vérité plus tard, en surprenant cette conversation entre Lila et une amie, c'était comme un coup de poing en plein estomac. La rage m'a aveuglé. Je l'ai foutue dehors, sans lui laisser une chance de s'expliquer. Je n'ai jamais eu le courage d'aller m'excuser auprès de Leliana, même si l'envie me ronge de l'intérieur. Aujourd'hui, cette envie devient une nécessité.