Chapitre 4

12 2 0
                                    

Nous pénétrâmes dans un vaste hall d'accueil aux murs lambrissés de chêne précieux. De lourdes tentures de velours grenat pendaient aux hautes fenêtres, tamisant la lumière d'une aura tamisée et feutrée. Un lustre en cristal étincelant projetait mille reflets scintillants sur le parquet ciré. L'atmosphère feutrée et l'opulence des lieux me coupaient presque le souffle.

Vittoria ne sembla nullement impressionnée, sûrement habituée, avançant d'un pas décidé sur les riches marches parsemées de motifs orientaux complexes. Deux domestiques nous saluèrent d'un bref mouvement de tête respectueux avant de s'effacer sur notre passage.

– Par ici, me souffla Vittoria en me guidant d'une main ferme dans le dos.

Nous empruntâmes un couloir dérobé, aux murs couverts d'antiques fresques religieuses d'une beauté saisissante. Des statues d'anges nouées de vignes semblaient nous observer d'un air désapprobateur au détour de chaque alcôve.

Soudain, des éclats de voix rocailleuses me parvinrent au loin, se répercutant en échos sourds le long des murs de pierre. Vittoria me lança un regard entendu, les traits légèrement crispés, avant d'accélérer le pas.

Nous débouchâmes sur un vaste salon d'aspect monastique, aux épais murs nus rehaussés de poutres apparentes. Une cheminée monumentale en constituait le point central, ses âtres désormais froids. Trois hommes d'un certain âge y conversaient d'un ton animé, certains postillonnant avec de grands gestes de la main.

A notre entrée, un lourd silence s'abattit, toutes les têtes se tournèrent d'un même mouvement de curiosité dans notre direction. Les deux hommes les plus âgés me dévisagèrent avec une lueur désapprobatrice au fond du regard.

Alors c'est elle la fameuse universitaire ? gronda soudain le plus petit de stature, un grincheux à la moustache grisonnante et au crâne dégarni.

La tutrice pour mes petits frères et sœurs oui ! lança joyeusement Vittoria d'un ton peut-être un peu trop enjoué pour masquer sa nervosité palpable. Je vous présente Ornella Tarducci.


Un profond soupir agacé accueillit ses paroles, venant du troisième homme présent. Un colosse d'au moins une trentaine d'années mon aîné, à la barbe broussailleuse et au regard de braise m'étudia de la tête aux pieds avec une extrême lenteur.

– C'est une plaisanterie j'espère ? gronda-t-il à l'adresse de Vittoria. La fille de l'ennemi pour remettre Gianni et Chiara dans le droit chemin ? Hors de question ! Et puis Gianni la remettra à sa place alors qu'elle n'aura même pas ouvert son puttana de bouquin de maths !

Le souffle me manqua à ces paroles insultantes, une bouffée de colère m'envahissait soudainement. Qui était donc cet homme pour me juger de la sorte ? Il est donc comme tous les autres, juger sans connaitre la personne et son passé ! Vittoria sembla anticiper ma réaction puisqu'elle se raidit d'un coup. Son bras m'enserra fermement le coude comme pour me supplier du regard de garder mon calme.

– Peu importe ce dont elle a l'air padre ! contra-t-elle d'une voix suppliante. Ornella est une prodige en mathématiques, une des meilleures élèves de son université ! Accordez-lui seulement une chance de montrer ce qu'elle a dans le ventre et vous verrez que...

– Silence ! tonna l'homme d'une voix tonitruante qui me fit tressaillir d'effroi avant de reporter son attention sur moi, les yeux brillants d'une lueur de défi. Allons bonne femme, détrompe moi ! Fais-moi la démonstration de tes prétendus talents d'enseignante !

D'un geste brusque, il fouilla dans les vastes poches de sa veste de velours avant d'en extraire un livre d'aspect poussiéreux qu'il me lança avec une dextérité surprenante pour un homme de son âge.

The Price of SilenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant