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La pluie battait le sol en une cadence implacable, comme si le ciel entier déversait sa colère sur cette île isolée. Le tonnerre grondait au loin, et un éclair illuminait par à-coups la silhouette imposante du portail de fer forgé, érigé comme une barrière infranchissable.

Soudain, dans un craquement sonore qui résonna comme une déchirure dans la nuit, deux silhouettes apparurent brusquement devant un vieux portail de fer forgé. Un homme et un garçon.

L'homme, aux traits sévères, tirait le garçon par le bras. Sa main tremblait légèrement, mais son regard était ferme, presque glacé. Ses cheveux noirs, grisonnants aux tempes, étaient plaqués par la pluie qui s'abattait sur lui sans relâche. Sa stature imposante, renforcée par un manteau noir tombant jusqu'aux chevilles, masquait à peine l'inquiétude dissimulée dans ses yeux sombres. Une amertume se lisait dans ses traits, comme s'il portait le poids d'une décision qu'il ne pouvait éviter.

À ses côtés, le garçon frissonnait sous la pluie froide. À 11 ans, son visage encore rond d'enfant était encadré de cheveux bruns ébouriffés qui collaient à son front sous l'effet de l'averse. Ses yeux, d'une teinte oscillant entre le gris et le marron, reflétaient la peur et la confusion alors qu'il fixait le portail massif devant lui. Ses vêtements, un simple t-shirt en tissu fin et un short en lin léger, collaient à sa peau, trempés et glacés. Il était pieds nus, ses orteils blanchis par le froid et couverts de boue. Son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine, tandis que l'angoisse montait en lui comme un brouillard épais.

— P... Père ? Bredouilla-t-il.

Mais l'homme le tira et l'obligea à avancer droit devant le haut portail.

Le portail en question, imposant et sinistre, semblait sorti d'un autre temps. Ses lourds battants de fer forgé, rouillés et couverts de lierre grimpant, se dressaient dans la nuit comme des ombres vivantes. Chaque barreau de fer, orné de pointes acérées, était tortueux, sinueux, se croisant en motifs complexes qui donnaient l'impression d'un piège mécanique, prêt à se refermer sur tout intrus. Les piliers de pierre qui soutenaient le portail étaient noircis par le temps et la mousse humide, et des éclats de pierre manquaient par endroits, révélant l'âge avancé de cette entrée.

Un chemin étroit, à peine visible sous la lumière défaillante de la lune cachée, s'étendait au-delà du portail, serpentant vers un brouillard épais qui semblait engloutir tout sur son passage. De chaque côté du chemin, des arbres tordus et décharnés dressaient leurs branches comme des griffes cherchant à attraper ceux qui osaient passer. Tout autour, la végétation était sauvage, indomptée, comme si la nature elle-même cherchait à avaler cet endroit et à l'effacer du monde extérieur.

L'homme poussa le garçon plus près du portail, leur présence envahissant l'espace sous la pluie incessante. Une odeur de terre mouillée et de végétation en décomposition flottait dans l'air, donnant l'impression que ce lieu était aussi éloigné du monde vivant que de tout espoir.

Il s'arrêta devant la grille et s'agenouilla, tirant le garçon plus près de lui. Son visage se durcit, et sa voix, rauque, se perdit presque sous le rugissement du vent et de la pluie.

« Écoute-moi bien, » commença-t-il, son ton à la fois pressé et solennel. « Tu dois être fort ici, tu dois obéir à tout ce qu'on te dira. Cet endroit est fait pour te soigner... tu comprends ? »

Le garçon hocha la tête, mais ses yeux trahissaient la peur et l'incertitude.

« Mais... pourquoi ? Et... nous sommes où ? Père ? Qu'est-ce qu'il se passe ? Qu'ai-je fait ? Pourquoi ? »

Sa voix tremblait, brisée par le froid et l'inquiétude.

L'homme détourna le regard, comme pour masquer son propre tourment.

Les OubliésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant