Lucinda. 6

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Marier, ce mot ne cesse d'aller et venir dans mon esprit engourdi. Je n'ai jamais pensé au mariage. Après mon diplôme, j'ai travaillé pour mon père pour le soulager un peu. Quitter ma famille, mes frères et sœur, quitter mes cousines, cela sera impossible pour moi pour une terre que je ne connais pas du tout avec de parfaits inconnus. Je ne survivrai pas.

Je ne connais rien à ce Francesco, hormis que c'est un sicilien. L'angoisse comprime ma poitrine. Les siciliens ne sont pas connus pour leur commodité. Conservateurs, taciturnes et assez soupçonneux, ils ne sont pas faciles à vivre.

Le regard dans le vide, la réalité de la situation commence à s'installer, quand quelqu'un toque à ma porte. Je réussis à peine à répondre.

- Oui ?

- Salut Lucinda. 

Maria, ma cousine et l'une de mes meilleures amies, pénètre dans la pièce, s'apercevant très vite de mon état. Avec ses cheveux indisciplinés, Maria est souvent l'incarnation de la rebelle dans notre groupe de cousines.

- Salut, je murmure à peine ma réponse.

- Qu'est-ce qui se passe ? C'est encore à cause de ta mère ?, demande-t-elle en faisant la moue.

Si c'était le cas, je saurais comment gérer la situation.

- Non, juste un peu fatiguée. Le mensonge est difficile à articuler. Avec mes cousines, nous partageons tout, même les plus petits secrets, car il y en a toujours une qui trouve une solution.

- Fatiguée, ce n'est pourtant pas ta période, me dit-elle alors qu'elle sort un chewing-gum de sa poche de jean. Allez, accouche.

Je ne me fais pas prier plus longtemps, j'ai besoin de me confier, c'est trop lourd à porter.

- Mon père a arrangé un mariage pour moi .

- Quoi ? C'est quoi cette histoire ? C'est une blague !, rie-t-il dans un éclat.

- Non, c'est sérieux, lui dis-je en détournant mon regard.

Après quelques secondes de silence, Maria prend un air sérieux, comprenant alors la gravite de la situation

- Mais quelle idée ! Et pourquoi ?, demande-t-elle les yeux froncés.

Je ne veux pas parler de la situation financière du magasin, alors je brode.

- Une famille a demandé ma main, et mon père a accepté.

- Mais c'est quoi cette folie, on se croirait au siècle dernier !, s'exclame-t-elle outrée. Et qui est l'heureux élu ?, ironise-t-elle.

- Un certain Cesareo, Francesco Cesareo .

Je m'attends alors à une moquerie, une critique de la part de Maria, mais au lieu de cela, elle me fixe étrangement.

- Qu'y a-t-il ?

- Et bien, je ne pensais pas que ton père était proche de la Famiglia sicilienne, me dit-elle, les yeux légèrement froncés.

- Quoi ? Tu veux dire la.... Je n'arrive même pas à prononcer le mot, trop abasourdie et effrayée par cette nouvelle. Mon père est un homme intègre et sans lien avec la pègre, qu'elle soit de New York ou de la Sicile.

- Francesco Cesareo, si c'est bien le même homme, est un chef de famille en Sicile.

Sa déclaration est comme une bombe qui explose dans ma tête. Ce n'est pas possible, Maria se trompe.

- Tu as sans doute confondus ce Francesco avec un autre homme, espérant secrètement que ça soit le cas.

- J'en doute fortement, il n'existe qu'un seul Francesco Cesereo. Sa famille est très respectée au sein de la Famiglia, m'informe-t-elle comme si elle me donnait la météo, alors que je commence à sentir un froid glacial engourdir mon corps.

Vœu sicilien, Le Clan CesareoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant