Nichée sur une falaise escarpée, la demeure d'Arturo Cesareo domine la Méditerranée. Sa façade blanchie à la chaux se fond parfaitement dans le paysage côtier, tandis que les volets bleus rappellent les différentes teintes de la mer sous le soleil et de l'île .
Comme chez Francesco, le portail en fer forgé affiche une imposante Gorgone, cette fois-ci d'un blanc éclatant, veillant sur l'entrée avec son regard perçant.
Dès que nous pénétrons dans la maison, l'atmosphère est plus festive que dans celle de Francesco. L'intérieur, lumineux et aéré, est décoré dans un style traditionnel sicilien, avec des carreaux de céramique colorés, des meubles en bois sombre avec des touches de fer forgé, conférant une luminosité chaleureuse et naturelle.
Des cris et des rires raisonnent dans toute la maison. J'aperçois vite deux garçons qui se chamaillent et courent vers nous mais s'arrêtent tout d'un coup à la vue de Francesco. Leurs yeux s'agrandissent de surprise, ignorant totalement ma présence avant de s'enfuir par où ils sont apparus.
- Il Lupo, il Lupo !, crient-ils en chœur.
Sur le moment, je crois avoir mal compris. Il lupo ? Le loup ? Je tourne un regard perplexe vers Francesco, dont les yeux mystérieux se plissent légèrement.
- Ca suffit! ordonne Paola en tentant de calmer ses enfants, non loin de nous. On ne parle pas comme ça, murmure-t-elle avec fermeté.
Après quelques secondes, Paola se rapproche de nous.
- Lucinda ! Bienvenue, ma fille, s'exclame-t-elle avec un enthousiasme sincère avant de me faire la bise. Puis, elle se tourne vers Francesco avec plus de réserve.
- Francesco, je suis heureuse que vous ayez pu venir, lui dit-elle, un peu plus formellement.
Ce dernier se contente de hocher la tête et de se diriger tout droit, toujours aussi peu loquace, en particulier avec Paola, qui semble en être habituée.
Paola porte une jolie robe fuchsia qui met merveilleusement en valeur sa peau dorée et un sourire éclatant. Elle me prend par le bras, et nous dirige dans un grand salon pas aussi moderne et aseptisé que celui de Francesco. Des jouets et des dessins, sur un grand tapis persan, ajoutent d'une touche particulièrement chaleureuse.
- Je suis désolée pour tout ça, dit Paola en montrant du doigt le tapis, j'avais tout rangé, mais mes petits monstres ont commencé à s'amuser...
Cette maison respire la vie familiale, avec le bonheur qui l'accompagne. Cela me fait rappeler soudain les rires de mes propres frères et sœurs et une mélancolie me gagne, la même, depuis quelques mois, depuis mon départ précipité de New York.
Je n'arrive plus à sourire sincèrement. Alors je colle sur mon visage un sourire de circonstance. Paola ne remarque pas mon changement d'humeur mais je sens un regard lourd sur moi. Francesco, debout à la porte-fenêtre du salon ouverte, me fixe alors que Paola m'invite à m'asseoir sur un immense canapé blanc.
- Les garçons, venez dire bonjour à Lucinda.
Deux bambins, sûrement âgés d'une dizaine d'années, entrent dans le salon et s'approchent de nous, hésitants. Tous les deux portent une jolie chemise blanche impeccable avec un joli pantalon beige. Le premier ne cesse de tirer sur son col, apparemment trop serré, tandis que le deuxième gesticule dans son pantalon. Après un troisième regard appuyé de leur mère, les enfants cessent enfin de gigoter. Ils ont des cheveux roux et des yeux bleus malicieux. Je constate alors une certaine ressemblance avec leur mère, un nez légèrement retroussé, et des hautes pommettes.
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Vœu sicilien, Le Clan Cesareo
Roman d'amourJeune fille de Little Italy, ma vie devait suivre un chemin tracé : études, travail, et peut-être un mariage avec quelqu'un que j'aurais choisi. Mais tout a basculé lorsque mon père, pour rembourser une dette colossale, m'a vendue à la famille Cesar...