Entre deux vies

VIII

Alessandra

La poignée de la voiture s'abaisse lentement, et je me fige en voyant qui est à l'intérieur. Mon père. Son costume noir parfaitement taillé, ses cheveux grisonnants peignés en arrière, le visage impassible. Comme à son habitude, Stefano incarne le contrôle, la froideur, et surtout, le pouvoir. Ce pouvoir qu'il a toujours exercé sur moi, même lorsque je croyais m'en être échappée.

Mon cœur bat la chamade. Je reste immobile, hésitant à monter dans cette voiture. Chaque fibre de mon être me hurle de faire demi-tour, de fuir avant qu'il ne soit trop tard. Mais son regard ne me lâche pas, et je sais que dans ce jeu de pouvoir, je suis encore la proie.

— Monte, Alessandra, dit-il d'une voix sèche, un ordre plus qu'une invitation.

Je ne bouge pas, mon corps en alerte. Tout en lui me répugne, et pourtant, je sens cette emprise familière se refermer sur moi. Cette sensation que je ne peux jamais échapper à son contrôle.

— Ne fais pas l'enfant, ajoute-t-il, un brin d'impatience perçant dans sa voix. Je sais tout. Où tu vas, qui tu fréquentes. Je sais que quelqu'un te suit, et je sais exactement qui c'est. Je l'ai retrouvé. Si tu veux des réponses, monte dans cette voiture.

Mes muscles se tendent, la panique grimpe dans ma gorge. "Je sais tout." Ses mots résonnent comme une cloche dans ma tête. Il sait pour Livia ? Mon cœur rate un battement. S'il est au courant de ma relation avec elle... Non, je ne peux pas lui laisser cette arme. Mais je dois comprendre, je dois savoir jusqu'où il a fouillé.

Après une dernière hésitation, je prends une grande inspiration et me glisse sur le siège passager. Le claquement de la porte résonne, étouffant mes doutes, et je me retrouve prisonnière de cette situation. Une fois de plus. Le silence pesant envahit l'habitacle alors que la voiture démarre.

Mon père fixe la route devant lui, impassible.

— J'ai retrouvé celui qui te suit, reprend-il, sa voix froide me glaçant le sang. Il sait que je n'accepte pas qu'on touche à ma famille. Je vais t'emmener le voir, et ensemble, on va obtenir les réponses que tu cherches.

Je tourne la tête vers la fenêtre, mes pensées tourbillonnant. Mon père se présente comme un protecteur, mais je connais trop bien ses jeux de manipulation. C'est une nouvelle manière pour lui de me contrôler. Toujours.

— Pourquoi tu fais ça ? murmuré-je, plus pour moi-même que pour lui.

— Parce que tu es ma fille. Et personne ne menace ce qui m'appartient, lâche-t-il sèchement.

Le poids de ses mots m'écrase, et je sens mes mains trembler légèrement. Il n'a pas changé. Et je suis toujours coincée dans cette toile qu'il tisse autour de moi.

Livia

J'attendais Nolan, après l'appel paniqué que je lui avais passé. Il ne devrait plus tarder. La rue était calme, trop calme, alors que l'angoisse ne cessait de monter en moi. Où était Alessandra ? Pourquoi ne répondait-elle pas ? Tout cela ne faisait aucun sens.

Quelques minutes plus tard, je vis Nolan arriver en courant. Il semblait aussi inquiet que moi.

— Livia, qu'est-ce qu'il se passe ? Pourquoi tu m'as appelée ?

Je tentai de calmer ma voix tremblante en lui expliquant la situation.

— Alessandra a disparu. Il y avait une voiture garée en bas de chez elle, puis elle est partie, et elle ne répond pas. J'ai essayé plusieurs fois de l'appeler, mais... rien. Je suis sûre que quelque chose ne va pas.