XVI

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Alessandra


Le silence pesait comme une chape de plomb alors que Stefano poursuivait son récit, chacun de ses mots infusant dans l'air une violence insidieuse. Mon regard rivé sur lui, je ne savais plus si je redoutais ce qu'il allait dire ou si une part de moi y voyait une confirmation abjecte de ce que j'avais toujours craint sans l'admettre. L'air autour de moi devenait étouffant, comme si le poids de ses paroles m'étreignait.

— Je vais commencé, lâcha-t-il, sa voix dégoulinant d'une indifférence glaciale. Elle a quitté sa famille d'accueil, se retrouvant seule dans la rue, sans ressources, sans personne. C'est là qu'elle a rencontré un homme qui lui a offert ce qu'elle cherchait : une porte de sortie, des illusions de stabilité... et un nouveau nom. Axelle Fauvel.

Ce nom... il sonnait comme une déchirure dans mes veines, une blessure lente et profonde, un coup de poignard empoisonné. Mon corps entier se tendit. Axelle Fauvel, pourquoi n'avait-elle jamais rien dit, même pas une trace d'hésitation ? Je l'avais vue dans ses moments les plus vulnérables, j'avais cru voir toute sa vérité.

Stefano, comme s'il sentait mon trouble, reprit.

— Et c'est ainsi qu'Axelle Fauvel s'est lancée dans des... activités moins respectables. Il marqua une pause, calculée, pour envenimer la tension. Elle suivait des gens, pour des personnes peu scrupuleuses, en échange de quoi, d'après toi ? Un semblant de confort, une sécurité illusoire.

Mon souffle se bloqua. La colère montait en moi, une vague écrasante, cherchant à dissiper la douleur. Je sentais mes doigts trembler légèrement, les poings fermés pour contenir ce tourbillon intérieur. Mes pensées tourbillonnaient, cherchant un point de repère dans cet océan de mots douloureux, dans cette révélation brutale.

— Arrête, répétai-je, les mots jaillissant comme un réflexe. Tu as tout calculé, tu veux me briser, Stefano.

Mais il ne m'entendait pas. Il continuait, chaque mot pesant comme un couperet.

— Il m'a fallu du temps pour comprendre toute l'étendue de ses actions, reprit-il. Axelle Fauvel, ta précieuse Livia, a fait pire que ça. Elle n'a pas seulement surveillé des gens. Elle a pris part à quelque chose de bien plus tragique... Ta mère, Rosa, elle ne s'est pas suicidée. Elle a été assassinée.

Mes jambes vacillèrent. Rosa... assassinée ? Ma mère, la seule personne à m'avoir jamais aimée sincèrement, celle qui avait tout sacrifié pour moi, pour me protéger... assassinée ? La pièce se mit à tourner légèrement autour de moi, et une sensation de nausée s'insinua dans mon ventre. Je fixai Stefano, en quête d'un signe de mensonge dans ses yeux, d'une faille dans son masque.

— Qu'est-ce que tu dis... Ma voix se brisa, effacée par un murmure douloureux. Qu'est-ce que tu oses dire ?

Stefano m'ignora, savourant l'effet de son récit. Sa satisfaction perverse était visible dans son sourire froid.

— C'est Axelle Fauvel, ta chère Livia, qui a permis ce meurtre. Contre de l'argent, elle a transmis les informations qui ont permis de localiser Rosa, de la faire taire. Elle le savait, Alessandra. Depuis le début.

Le monde autour de moi s'effondrait. Mon cœur battait si fort que cela en devenait douloureux, chaque battement un rappel de la trahison qui semblait si ancrée en moi. Je me sentais impuissante, piégée par les doutes et la rage qui me dévoraient de l'intérieur. Comment... comment pouvait-elle m'avoir fait ça ?

— Tu veux détruire ce qu'il reste de moi, c'est ça ? l'accusai-je, la voix étranglée. Tu veux m'anéantir ?

Il resta impassible, ses bras croisés, imperturbable.

Entre deux viesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant