Un bruit qui n'aurait pas dû se faire entendre sous terre résonna dans les galeries jusqu'à leur cellule. Ellist sortit la tête d'entre les jambes, et Meven se leva un grand sourire aux lèvres. Ce qui irrita la jeune femme, perdue dans son brouillard noir.
Un bruissement d'aile, puis un oiseau couleur de nuit fusa à travers la prison, se stoppa avec sec battement d'ailes juste devant Meven. Elle pensa d'abord à une chauve-souris. Un courant d'air souleva les cheveux noirs du voleur. L'animal prit les barreaux entre ses serres, pour se maintenir à hauteur de tête. L'ambre de ses prunelles brilla.
Un familier.
L'aigle de Meven poussa un cri joyeux à la vue de son maître et gratta les barreaux de ses serres provoquant un crissement horrible.
— À moi aussi, tu m'as manqué Isirann, rit Meven. En retard, mais mieux vaut tard que jamais. Désolé de ne pas pouvoir vous accueillir autrement, lança-t-il à l'obscurité.
Ellist comprit à qui il s'adressait avant de se retourner. Ailill, s'approchait de sa démarche féline et silencieuse. Ses cheveux rouge prenant des reflets tour à tour volcaniques puis cuivre au jeu des ombres.
Pour la première fois depuis qu'elle était dans le secret, toutes ces choses sur les hôtes et les titans élémentaires originels, tout ça était bienvenu dans sa vie. L'Elfe fit fondre les barreaux et les fers qui les retenaient prisonniers sans incanter. D'après lui, les Titans étaient bien trop anciens et puissants pour être soumis à l'emprise du métal des géants. Le fer d'Himlya ne mit pas longtemps avant de s'avouer vaincu.
Reprenant vie, elle trépignait sur place tant se retenir s'avérait difficile. Par chance, Ailill commença par Meven, sinon elle les aurait plantés là tous les deux. L'Elfe avait voulu délivrer Ellist en premier, galanterie oblige, seule l'insistance de Meven l'avait fait changer d'avis. Plus pour le faire taire que par persuasion l'Elfe rendit les armes. Elle mourrait de s'élancer dans les galeries, de venger la mort de son ami. La vengeance la redressait.
Elle voulait sentir son cœur s'arrêter sous ses doigts.
Rien d'autre que la mort ne comptait.
Quand vint enfin son tour, que ses fers tombèrent au sol, inerte, elle se précipita vers la sortie sans que l'Elfe ne puisse réagir.
Meven en décida autrement, il se mit sur son passage, lui bloquant la voie de tout son corps. Sa volonté vacilla. Meven était loin d'égaler la corpulence intimidante des gardes Tulks, pourtant à cet instant, il lui parut plus imposant que l'imperator d'Omois.
— Laisse-moi passer, lui ordonna-t-elle s'obstinant à ne pas lever la tête, à ne surtout pas le regarder dans les yeux de peur de ce qu'elle pourrait y lire de la pitié.
— Non. Tu vas faire une bêtise.
— Ça ne te regarde pas !
— Que s'est-il passé, demanda l'Elfe roux, il s'approcha lentement, inquiet.
Deux options s'offraient à elle. Il fallait qu'elle avance, avancer ou tomber. Avec Meven lui bloquant la voie, elle se sentit de nouveau en cage. Elle réagit comme un animal. Elle sortit les griffes.
— Tu ne comprends rien ! Isirann est toujours avec toi !
— Ce n'est pas le moment, remettez ça à plus tard ! les prévint l'Elfe, essayant de calmer le jeu. Il sentait que la situation risquait de tourner au vinaigre. Quoi de plus étrange qu'un Elfe prêchant la paix sur Autre-Monde ?
Si étrange qu'il fut purement et simplement ignoré.
Ellist lança son poing vers la mâchoire de Meven, elle sentit le regard stupéfait d'Ailill dans son dos. Ce ne n'était rien comparé à son propre étonnement, non pas qu'il avait encaissé le coup, mais aurait facilement pu l'arrêter comme on chasse une bzzz. Figée dans son geste, le poing toujours en l'air, elle n'osait ne serait-ce cillé. Ses yeux d'un noir de vin plongés dans les siens, le calme qui y régnait l'apaisa, elle savait à cet instant qu'il resterait droit quoi qu'il arrive.
Elle ne réagit pas lorsque doucement, sa main entre la sienne, il baissa son poing et l'attira vers lui. Ignorant pourquoi, le vide dans la poitrine d'Ellist lui parut plus supportable, comme une piqure lointaine. Elle ne se reconnaissait plus, ou était donc passée Ellist Ill'or, voleuse solitaire au maintien d'acier que seul l'appât du gain intéressait. Celle-là même qui n'avait plus envie de quitter le confort de ces bras.
Une réputation, une rumeur, ce n'était pas elle.
— Je sais ce que c'est de perdre un être cher. Crois-moi. Murmura-t-il à son oreille. Tu ne pourras rien faire de bon dans cet état.
Une main se posa sur son épaule.
— Ne restons pas là. Quelqu'un peut surgir à tout moment.
Aillil la ramena à la réalité. Elle quitta à regret le cocon dans lequel elle s'était réfugiée, se demandant si Meven avait ressenti la même chose. Non, mais elle s'entendait penser ? Si elle pouvait se mettre des claques sans avoir l'air démente elle l'aurait fait. S'enticher d'un voleur ! D'un vampyr ! Bon, un demi-vampyr. C'était la fin.
Quand ils s'engagèrent dans l'obscurité du tunnel, Meven la rattrapa par le poignet, elle ne ressentit pas le besoin pas de se dégager. Et lui demanda ce qu'elle comptait faire maintenant. Lorsqu'elle répondit, elle sentit dans son cœur, une détermination implacable, et le calme traître de l'eau, prête à tout engloutir sur son passage.
— Je vais le trouver et l'empêcher de recommencer. Gwyford sera le dernier à qui il ôtera la vie.
Ce qu'il entendit dans sa voix dut le rassurer, car le jeune homme libéra sa main avec un hochement de la tête.
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Voltige - dans l'univers d'AutreMonde
FanficEllist Ill'or, voleuse sans ordre ni allégeance, éprise de liberté et amatrice de sensations, commet le vol de trop. Simple, comme d'habitude, sauf que sa route croise celle d'un voleur patenté, qui n'hésitera pas l'attirer là où elle ne voulait sur...