Mariage arrangé de Aïcha

Chapitre 14: L'Ombre du Passé

La voiture de Nzo filait à travers les routes désertes, les phares déchirant l'obscurité. Le silence entre lui et Aicha était lourd, empreint de peur et d'incertitude. Chaque minute gagnée était une victoire, mais Aïcha savait que Moussa ne renoncerait pas. La liberté arrachée de justesse n'était qu'un répit temporaire.
- Où est Sidi ? demanda-t-elle, le souffle court, le cœur battant à en exploser.
- Je... je ne sais pas, répondit Nzo sans oser la regarder. Il n'avait eu qu'une seule mission : venir la récupérer. Mais la culpabilité serrait sa gorge. Ils avaient laissé Sidi dans la gueule du loup.
Aïcha agrippa la portière, tentant de garder son calme. Le souvenir du regard de son frère, prêt à tout pour elle, lui brûlait l'esprit. Chaque seconde sans lui était une torture.
- On ne peut pas l'abandonner, Nzo, murmura-t-elle avec une lueur de désespoir.
- Moussa te veut. Si tu retournes là-bas, il te brisera.
Les mots de Nzo résonnèrent durement, mais Aïcha refusait de laisser son frère entre les griffes de Moussa.
— Je ne peux pas partir sans lui, dit-elle d'une voix tremblante, mais déterminée.
Alors qu'ils s'engageaient dans une route plus étroite, un véhicule surgit à l'arrière, ses phares les éblouissant. Nzo jura entre ses dents.
— Accroche-toi !
Il écrasa l'accélérateur, et la voiture bondit en avant. Mais le véhicule derrière eux se rapprochait à une vitesse inquiétante. La poursuite était lancée.

Des balles fusèrent, percutant l'arrière de leur voiture dans un bruit de métal tordu. Aïcha cria, plaquant instinctivement ses mains contre ses oreilles. Nzo zigzagua pour éviter les tirs, mais les pneus crièrent sur l'asphalte humide.
— Ils nous rattrapent ! s'écria Aïcha.
- Pas encore, rétorqua Nzo en enfonçant l'accélérateur à fond.
Ils arrivèrent à une intersection. Nzo fit un virage brutal vers la droite, mais la voiture dérapa, manquant de peu de s'écraser contre une barrière métallique.
Derrière eux, le véhicule ennemi les suivait de près, implacable.
Une balle traversa la vitre arrière, éclatant le verre en une pluie scintillante.
- Bordel ! rugit Nzo.
Il tourna brusquement le volant, et ils s'engouffrèrent dans une ruelle étroite bordée d'immeubles abandonnes. Le moteur vrombissait de toutes ses forces, mais le véhicule ennemi n'abandonnait pas.
Soudain, une explosion retentit derrière eux. Une flamme immense jaillit, illuminant la nuit. La voiture ennemie freina en catastrophe, évitant de peu le cratère formé par l'explosion.
— C'était quoi ça ? demanda Aicha, le souffle court.
— Peu importe, on continue ! cria Nzo, profitant de l'accalmie pour filer à toute vitesse.
Ils roulèrent encore quelques minutes, laissant le chaos derrière eux. Enfin, Nzo ralentit et emprunta une route déserte bordée d'arbres.

- On devrait être en sécurité ici, murmura-t-il en essuyant la sueur de son front.
Mais Aïcha savait que la sécurité était une illusion. Moussa ne s'arrêterait pas tant qu'il ne l'aurait pas retrouvée.
Quelques heures plus tard, dans l'entrepôt où tout avait basculé, Moussa avançait d'un pas lent. Ses yeux brûlaient de rage contenue. Les hommes qui l'avaient servi avaient échoué, et l'explosion inattendue avait mis en déroute son plan parfaitement orchestré.
Il se tourna vers Sidi, toujours attaché à un poteau, mais avec un regard de défi brillant dans les yeux.
— Tu pensais vraiment qu'elle pourrait m'échapper ? demanda Moussa d'une voix glaciale. 🥶

Sidi, bien qu'épuisé et couvert de blessures, esquissa un sourire moqueur.
- Aïcha est plus forte que toi, Moussa.
Tu ne la briseras jamais.
Moussa serra les poings. La haine se lisait sur son visage.
- Crois-tu vraiment que tu pourras l'empêcher de revenir ? Elle reviendra, Sidi. Elle n'a pas le choix.
Sidi éclata d'un rire amer, crachant du sang.
— Tu ne la connaîtras jamais assez. Elle se battra, et tu perdras.
Moussa ne répondit pas. Il se contenta de sourire, un sourire sinistre qui promettait mille tourments.
- Nous verrons. Mais en attendant, c'est toi qui paieras pour son audace.

Il fit un signe à l'un de ses hommes, qui sortit un téléphone et composa un numéro. Quelques secondes plus tard,
Moussa reprit la parole :
- Trouvez-la. Elle ne doit pas aller bien loin. Et cette fois, ramenez-la vivante.
Sidi, lui... je n'ai plus besoin de lui.
Un frisson glacial parcourut l'échine de Sidi. Mais il garda la tête haute. S'il devait tomber, il tomberait avec fierté.
Aïcha et Nzo s'étaient arrêtés dans une petite maison délabrée, en bordure d'un bois. À l'intérieur, l'air sentait le renfermé, mais c'était le seul endroit qu'ils avaient trouvé pour se cacher temporairement.
Assise sur le sol, Aicha serra ses genoux contre elle. L'image de son frère, seul face à Moussa, hantait son esprit.
- On doit retourner le chercher, Nzo, dit-elle d'une voix faible.
— Ce serait du suicide, Aïcha. Ils t'attendent là-bas.
Elle ferma les yeux, une larme silencieuse roulant sur sa joue. Elle savait qu'il avait raison. Mais elle savait aussi qu'elle ne pouvait pas abandonner
Sidi.
— Alors je vais y aller seule, chuchota-t-elle.
Nzo la fixa, surpris par la détermination dans sa voix.
- Tu es folle.
- Peut-être. Mais je préfère mourir en essayant plutôt que de vivre avec ce poids.
Un silence pesant s'installa entre eux.
Nzo soupira lourdement, passant une main dans ses cheveux.
- Très bien. Mais si on y retourne, on le fait à ma manière.

Aïcha hocha la tête. Peu importe les risques, elle était prête à affronter Moussa.
Pendant ce temps, Moussa préparait sa prochaine manœuvre. Ses hommes avaient localisé la voiture de Nzo, et il n'allait pas laisser passer cette chance.

- La fin approche, murmura-t-il, un sourire cruel étirant ses lèvres.
Pour Moussa, cette chasse était bien plus qu'une simple vengeance. C'était une question de pouvoir. Et dans son monde, personne ne lui échappait.