Victorieux aux yeux du peuple et dépendant de sa rage insatiable.
Ahvi se tenait comme un roi sur sa monture. Le dos droit, le tissu noir lui collant à la peau, il scrutait de ses yeux verts les avalanches du désert devant lui. Il attendait, attendait et attendait. Il espérait avec désespoir apercevoir un mouvement au milieu de cet enfer du soleil. Un vautour qui se lassait des souris et désirait une proie plus grosse avec plus de chair. Il voulait des cris et des plaintes. L’oiseau guettait un humain.
Il clignait des yeux aussi souvent qu’il le pouvait pour que les mirages n'aient pas le temps de s’installer. Ahvi refusait que ses insomnies obsédées par lui impactent sa quête de justice. Le guerrier suprême n’avait même pas baissé le regard sur son dromadaire quand celui-ci s’était couché. Les grains de sable s’imprégnaient de l’odeur de l’animal, désirant une identité. Le désert arrachait chaque parcelle de ce qui le traversait. Le voleur de mots, de sang et d’or. Une terre souhaitant atteindre tout aspect de vie.
Ce parfum aride était le jumeau de l’amertume que le chaos de l’océan sécrétait.Courageux ou stupide ? Qu’était-il ? Lui, l’homme des dagues, le soldat, enfant du soleil et frère des étoiles. Qu’était-il ?
Ahvi était la main écarlate qui répondait à tous les désirs capricieux de ce désert. Pourtant il attendait quelque chose en retour, une offrande. Le guerrier suprême avait agit à chaque appel du sable et maintenant il devait obtenir sa récompense.
Ahvi avait perdu une chose irrécupérable. Un fils.
Dans les méandres de son esprit, il cherchait l’assassin de son fils et derrière chaque brouillard sableux, il attendait l'apparition d'une lame ensanglantée. Où était le diable qui s’était emparé de son enfant sans remords ?
Ahvi ne savait même plus depuis combien de temps son fils n’était plus qu'un souvenir. Peut-être depuis hier ou peut-être depuis un an ? Il ne le savait pas.
Son visage ne lui apparaissait plus. Des silhouettes dansantes, une voix d’adolescent étaient tout ce que sa mémoire était capable de reconstruire.Ils avaient pris son corps de jeune homme et l'avaient brûlé. Ahvi n’osait pas penser aux tortures que les démons de Maradak lui avaient fait subir avant de faire de sa chair des cendres.
Ahvi était un être tragique, serviteur du désert et martyre des dieux.
Pourtant il était fidèle à ses racines, son visage ne transmettait rien, aucune émotion dramatique. Ses lèvres ne s’étiraient pas et sa mâchoire aussi dure que la pierre était tendue. Le guerrier s’imaginait attraper le diable narquois qui avait assassiné son enfant. Il pouvait entendre le son de sa lame perçant sa chair et l’arôme du sang faisait déjà son chemin vers ses narines.
Le monde pouvait s’écrouler, il grimperait chaque ruine, chaque vestige si cela voulait dire que le bourreau aurait son châtiment.
Son esprit essayerait toujours de le convaincre que sa vie valait encore quelque chose.Un petit couinement le sortit de ses pensées et automatiquement ses yeux trouvèrent le sable sous lui. Les loutres des sables étaient des créatures vicieuses, se cachant sous des couches de sable jusqu'à pouvoir aveugler leurs prédateurs avec leur salive. Elles sortaient d’un coup et à peine les avaient-ils vu qu’elles étaient déjà ensevelies sous des milliards de grains de sable.
Ce son signifiait qu'elles allaient bientôt passer à l’attaque. Tout d’un coup, une légère explosion de sable se produisit juste devant lui. Ahvi ferma directement les yeux presque épuisé par l’entêtement de l’univers contre lui. La seule chose qu’il capta fut le bruit d’une flèche qu’on décochait. Le soldat n’entendit plus les couinements et rouvrit les yeux.
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Seraphine
FantasiaPour la plupart des hommes, les Seraphines étaient un mythe, un fantasme ou encore des paroles envolées. La légende racontait qu'elles avaient un lien directe avec l'espace et le temps et que le bandeau qui masquait leurs yeux leur permettait de voi...