L'envers des ombres

Chapitre 13 - Reflets de Terreur

    Gabriel pénétra dans l'épaisseur de la forêt, ses bottes s'enfonçant dans la terre humide, qui semblait absorber chaque pas avec une voracité silencieuse. Les branches, tel un ballet de griffes invisibles, le griffaient doucement, comme si elles cherchaient à le retenir, à le dissuader de s'enfoncer davantage dans cet antre obscur. Les arbres, majestueux et impassibles, se resserraient autour de lui, formant une voûte de verdure épaisse qui étouffait le peu de lumière du jour. L'air devenait de plus en plus oppressant, lourd d'une humidité palpable, chargé d'une odeur de bois pourri et de mousse froide. Chaque pas en avant semblait l'éloigner un peu plus de la sécurité, comme s'il pénétrait dans le ventre d'une bête immense et affamée, prête à le dévorer.

À mesure qu'il progressait, il se mit à chercher les traces des crimes passés, les souvenirs macabres laissés par cet assassin qui hantait encore les cauchemars des villageois. Cependant, la nature, impitoyable et indifférente, avait effacé tous les signes visibles, avalant chaque indice dans un silence feutré. La brise, presque complice, murmurait des secrets oubliés, tandis que Gabriel se sentait tiraillé entre l’angoisse et la détermination.

Les ombres s'étiraient de plus en plus alors que le soleil commençait à disparaître derrière les collines, peignant la forêt de nuances rougeâtres et noires. Une tension étrange emplissait l'air, un malaise collant à sa peau comme un frisson persistant. Il serrait sa lampe de poche, son seul éclat de lumière dans cet univers étranger et menaçant. C'est alors qu'il aperçut, au loin, à travers le filtre des branchages et des buissons, une forme étrange, à moitié engloutie par la végétation : une cabane.

Gabriel s'arrêta, le cœur battant, chaque pulsation résonnant dans son crâne. La structure semblait prête à s'effondrer sous son propre poids, engoncée dans des lianes et des ronces, mais il discernait des signes d'une présence récente. Avec précaution, il avança, jetant des coups d'œil rapides autour de lui, chaque craquement sous ses pieds le faisant sursauter. Alors qu'il approchait de la cabane, une sensation d'être observé lui traversa l'esprit comme une décharge électrique, une alerte instinctive.

Il ouvrit la porte, qui grinça sur ses gonds, se mêlant aux bruissements de la forêt. À l'intérieur, une odeur de moisissure et de bois humide le saisit à la gorge, comme une main glacée. La pièce était dans un état de désordre total. Un lit en fer rouillé trônait dans un coin, son matelas recouvert de taches anciennes, témoin d'une vie autrefois habitée. Des boîtes de conserve vides étaient empilées négligemment, comme autant de vestiges d'une existence oubliée. Gabriel scruta l'endroit, chaque fibre de son être en alerte, en quête d’un indice révélateur.

Puis, il remarqua une bougie éteinte, dont la cire encore molle indiquait qu'elle avait brûlé il n'y a pas si longtemps. L'angoisse montait en lui, poisseuse et collante, comme une toile d'araignée l'enveloppant. Quelqu'un vivait ici, ou du moins y venait assez souvent. Un bruit derrière lui le glaça sur place : un craquement distinct, suivi d'un souffle.

Gabriel pivota rapidement, sortant son couteau, les doigts crispés autour du manche, le cœur tambourinant dans sa poitrine. À cet instant, la vitre de la petite fenêtre éclata soudainement, envoyant des éclats de verre dans la pièce, comme un cri de désespoir. Un homme, grand et massif, le visage dissimulé par l'ombre, venait d'entrer, et l’odeur âcre qui émanait de lui rappelait quelque chose de trouble à Gabriel, un souvenir enfoui qui refaisait surface.

Une sensation de dégoût et de peur le traversa, acide. Gabriel n'attendit pas. Il se rua vers la porte, plongeant dans la nuit noire et froide, avec la seule lumière de la lune comme guide. Derrière lui, il entendit l'homme se lancer à sa poursuite, ses pas lourds et rapides fracassant le sol sous ses pieds comme un tonnerre à l'ombre des arbres.