Le voyage touche à sa fin, mais avant de rentrer définitivement chez eux, Clara et Éliott décidèrent de faire une dernière halte. Un lieu à la fois intime et familier : Séville. Cette ville, qu'ils avaient visitée à l'aube de leur aventure, semblait être le point de départ et la conclusion naturelle de leur périple andalou. Séville, avec ses rues vivantes, son ambiance chaleureuse et ses souvenirs partagés, leur apparaissait comme le fil conducteur de ce voyage initiatique. C'était ici qu'ils avaient commencé à écrire leur histoire, et c'était ici qu'ils allaient, d'une certaine manière, la refermer... avant de l'ouvrir à un autre chapitre, encore inconnu.
Ils prenaient le train tôt le matin depuis Cadix, traversant de nouveau les paysages andalous, les champs de blé et d'oliviers se déployant sous le ciel bleu, à peine perturbé par les nuages légers qui glissaient doucement au-dessus des collines. L'air était encore frais, un peu humide, avant que le soleil, implacable, ne chauffe les terres d'Espagne.
Le trajet, bien qu'assez court, leur offrit un dernier regard sur cette région qu'ils avaient explorée avec tant de curiosité. Mais au fur et à mesure que le train s'approchait de Séville, l'émotion de retrouver la ville les envahissait doucement. Le bruit du train, les secousses légères, semblaient créer une sorte de rythme apaisant qui les préparait à l'ultime étape de leur périple.
Séville, vue depuis le train, apparut comme un mirage dans la lumière du matin, les hautes tours de la Giralda se dessinant à l'horizon, des toits d'azulejos éclatants reflétant la lumière du soleil, des ruelles encore paisibles avant l'agitation du jour. Lorsqu'ils descendirent à la gare Santa Justa, une chaleur douce les accueillit, familière, presque réconfortante, comme un vieux souvenir d'enfance.
Ils se rendirent à leur hôtel, un charmant établissement niché dans le quartier historique de Santa Cruz, à quelques pas de la Place d'Espagne. L'hôtel, une bâtisse ancienne au charme andalou, était décoré de céramiques bleues et de moulures délicates. Les couloirs étaient ombragés, les murs tapissés de vieux portraits et de photographies en noir et blanc montrant la ville dans ses années passées. Clara et Éliott montèrent rapidement dans leur chambre, impatients de poser leurs valises avant de se lancer à la découverte de cette ville qui leur était désormais familière.
Le premier après-midi fut consacré à flâner dans les ruelles étroites du quartier juif de Santa Cruz, là où les murs blancs des maisons se mêlaient aux fleurs éclatantes des balcons. Les senteurs d'herbes fraîches, de jasmin et d'agrumes flottaient dans l'air, ajoutant à la magie de l'endroit. Les passants, principalement des touristes, se déplaçaient avec nonchalance, mais Clara et Éliott avaient cette impression que la ville leur appartenait encore un peu, qu'ils y avaient laissé une part d'eux-mêmes.
Ils s'arrêtèrent dans un petit café de quartier, un lieu discret qui ne payait pas de mine, mais où l'on servait les meilleures tapas de la ville. Le serveur, un homme âgé au sourire bienveillant, leur apporta des petites assiettes garnies de jamón ibérico, de tortillas espagnoles et de gambas al ajillo. Tout autour d'eux, les conversations s'élevaient en une douce mélodie, une cacophonie de langues et d'accent, typique de l'Andalousie.
— Tu te souviens de notre premier déjeuner ici ? dit Clara, la voix teintée de nostalgie. Il y avait tellement de monde, de bruit... je n'avais jamais vu une ville aussi vivante.
Éliott sourit, son regard se perdant dans la foule qui passait devant. Oui, je me souviens. Mais aujourd'hui, c'est différent. C'est comme si la ville avait pris un autre sens pour nous, comme si elle nous disait au revoir. Ou peut-être nous disait de rester.
Leurs mains se frôlèrent sous la table, une tension douce et familière, comme un signe qu'il n'était plus question de repartir seuls dans le monde. Le temps passé ensemble leur avait permis de comprendre que leur histoire ne s'arrêterait pas avec ce voyage, mais qu'elle se prolongerait, ici ou ailleurs, où les vents les mèneraient.
Après ce moment de calme, ils se rendirent directement à la Giralda, la majestueuse tour de la cathédrale de Séville. Ils montèrent les escaliers sinueux, les pierres anciennes sous leurs pieds, jusqu'au sommet. La vue qui s'offrit à eux était à couper le souffle : Séville s'étendait à perte de vue, ses toits de tuiles rougeâtres ondulant sous la chaleur, les jardins du Alcazar serpentant dans un vert éclatant. Le fleuve Guadalquivir glissait lentement à travers la ville, reflétant les couleurs du ciel crépusculaire. L'air était doux, presque magique, et tout semblait suspendu, dans un équilibre parfait.
— C'est beau, n'est-ce pas ? dit Clara, la voix presque un murmure, comme si elle redoutait briser la magie de l'instant.
Éliott la regarda longuement, ses yeux emplis d'une tendresse infinie. C'est plus que beau. C'est comme si la ville tout entière nous parlait. Comme un livre dont chaque page aurait été écrite pour nous.
Leurs regards se croisèrent et un long silence s'installa entre eux, un silence plein de tout ce qu'ils avaient partagé, de tout ce qu'ils avaient vécu. Il y avait, dans cet instant suspendu, une paix infinie, une certitude douce et rassurante : quoi qu'il arrive, rien ne pourrait effacer ce qu'ils étaient devenus l'un pour l'autre.
Lorsque la lumière du jour commença à décliner, ils redescendirent lentement, appréciant chaque pas. En arrivant à la place, ils décidèrent de se rendre sur le Parvis de la Cathédrale, pour regarder le soleil se coucher, baignées par les teintes orangées qui envahissaient la ville.
La soirée s'annonça tranquille et douce. Clara et Éliott se promenèrent lentement le long du Guadalquivir, observant les bateaux qui passaient, illuminés par les réverbères. Un léger vent soufflait, emportant avec lui les derniers vestiges de chaleur de la journée. Ils s'arrêtèrent un instant, admirant les torres de la ville, qui se dressaient dans la lumière déclinante.
— C'est comme si tout cela était écrit, tu ne trouves pas ? dit Clara, les yeux plongés dans le fleuve.
Éliott la prit dans ses bras, et dans ce geste simple, mais empli de tendresse, il lui répondit : Je crois que certaines histoires sont faites pour se raconter. Et nous, Clara, nous avons encore beaucoup à écrire.
Ils restèrent là un long moment, simplement à observer la ville, l'eau et les étoiles qui commençaient à apparaître dans le ciel. Séville, comme un dernier souffle d'Andalousie, semblait leur offrir un adieu à la fois doux et inoubliable. Mais Clara savait, au fond d'elle, que leur aventure venait juste de commencer. Et dans le cœur de Séville, au bord du Guadalquivir, elle savait aussi que ce voyage resterait gravé en elle, comme la promesse d'une histoire qui continuerait à s'écrire, peu importe où le vent les mènerait.
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Sous un Ciel d'Orages
RomanceDans la petite ville de Rivemont, deux adolescents aux vies très différentes vont se rencontrer lors d'un été mouvementé. Clara, 17 ans, rêve de quitter la ville pour explorer le monde. Passionnée de dessin, elle se perd souvent dans ses esquisses...