Âmes Étoilées Tome II

15-Ecouter aux Portes

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Sad Girl - Lana Del Rey

Eugénie quatre mois auparavant

Eugénie observait la scène, le cœur partagé entre un étrange sentiment d'appréhension et de fascination. Cela faisait des jours qu'ils préparaient leur plan, esquissant des stratégies et des issues possibles, chacun absorbé par une détermination féroce. Mais cette nuit-là, alors qu'ils discutaient encore des détails dans l'intimité feutrée de la salle, la reine Constance entra, d'un pas si silencieux qu'aucun d'eux ne l'entendit arriver.

La Reine s'approcha d'un mouvement fluide, posant sa main avec une tendresse inattendue sur les cheveux de Rills, puis sur ceux de Kaspiel, comme si elle touchait des enfants endormis. Ses gestes étaient doux, presque maternels, mais ses yeux, eux, brûlaient d'une colère contenue. Les deux jeunes hommes se laissèrent aller vers la main de la reine comme en quête de réconfort dans ce geste habituel. Eugénie sentit son souffle se figer, captivée par la beauté de cette femme, par la force de sa présence qui semblait commander le silence autour d'eux.

Elle semblait contempler, dans le silence, les visages de ceux qui l'entouraient comme s'ils étaient, pour elle, des êtres précieux à protéger, à aimer. Eugénie sentit son cœur battre un peu plus fort en regardant cette scène. La reine incarnait cette douleur résolue que seules les mères semblaient comprendre, cette force silencieuse prête à s'abattre avec toute la rage contenue qu'elle tenait en elle.

Lorsque Constance s'assit, le silence pesant dans la salle ne laissait place qu'à l'écho des respirations retenues. La rousse ne savait pas dans quel camp était la reine, vouait-elle une allégeance au roi ? Ou était-elle prête à garder le secret pour qu'ils puissent sauver le second prince ? Elle scrutait les visages de ceux qui l'entouraient, lisant en eux les vérités inavouées sans avoir besoin de mots. Puis, d'une voix ferme, elle posa la question :

– Vous allez libérer mon fils, n'est-ce pas ?

Un silence glacé s'installa, et aucun d'eux n'osa répondre. La reine ne sembla pas se formaliser de leur mutisme. Elle n'avait pas besoin de confirmation, elle savait. Une lueur déterminée s'alluma dans ses yeux, brillant dans la pénombre, et sa voix s'éleva à nouveau, douce mais brûlante de colère.

– Je veux en être, déclara-t-elle, chaque mot chargé de volonté. Je veux récupérer mon fils, je veux qu'il le laisse tranquille. Elle marqua une pause, laissant le poids de ses paroles imprégner l'espace autour d'eux. Ses yeux semblaient jeter des flammes alors qu'elle ajouta : Je lui ferai payer ce qu'il a fait à mon enfant.

Eugénie, qui observait la scène avec une admiration presque révérencieuse, sentit son estomac se nouer. Elle était captivée par cette femme qui, malgré sa douleur, se tenait droite, inébranlable. Dans la salle, tous retenaient leur souffle, émus par la force de Constance. Dans ses paroles, il y avait une promesse, une détermination silencieuse qui ne laissait aucun doute sur ce qu'elle était prête à faire pour Naëlion. Et c'était justement cette intensité qui laissait Eugénie avec tant de questions sans réponses.

Alors que la Reine poursuivait ses préparatifs, le groupe décida de leur plan pour le lendemain. Kaspiel mènerait Lilianna et la Reine Constance jusqu'à Naëlion pour examiner discrètement la salle du trône et planifier la suite de l'opération. Mais alors que tout le monde commençait à se disperser, l'atmosphère s'alourdissant sous le poids des événements à venir, Eugénie resta en arrière, incapable de quitter la pièce sans obtenir des réponses à ses interrogations brûlantes.

Elle regarda Kaspiel et Lilianna quitter la salle dans un silence tendu, comme si des non-dits s'étaient créés entre eux, tandis que Rills et Zorcha prenaient la direction de la sortie en se jetant des regards curieux. La Reine semblait perdue dans ses pensées, ses yeux plongés dans une contemplation silencieuse. Profitant de ce moment, Eugénie s'avança timidement, s'arrêtant à quelques pas de la souveraine. Elle hésita un instant, cherchant les mots justes, puis finit par rompre le silence avec douceur.