Avant la douzième lettre

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Jersey était à la bibliothèque, sillonnant les rayons. Elle touchait les reliures des livres du bout de ses doigts, n'osant pas les tirer pour les abîmer. Elle était dans la partie, au fond de l'immeuble, qui abritait les livres anciens et d'antan. Son index, son majeur et son annulaire, du bout des extrémités mêmes, s'entrechoquaient avec les reliures, les unes après les autres. Ils montaient et descendaient doucement, jusqu'à ce que l'étagère soit finie et qu'il n'y ait plus que le vide que touchait la main droite de la belle brune irlandaise.

Jersey releva la tête parce qu'elle était, auparavant, baissée. Elle écarquilla les yeux et tourna son faciès sur la droite. Il y avait un couloir et l'étagère où étaient entreposés tous les bouquins étaient juste derrière elle, en oblique. Elle ne l'avait pas encore réalisé et croyait que l'étagère était infinie. Elle était tellement longue qu'on n'en voyait presque pas le bout. Elle ne s'y attendait clairement pas à ce que ce contact entre sa peau et les livres se coupe ainsi soudainement, ainsi maladroitement, ainsi douloureusement. Elle ne s'y attendait pas et elle resta figée pendant 5 bonnes minutes avant de réaliser le tout mais surtout qu'elle était plantée au milieu du couloir central.

Jersey se retourna, faisant volte-face et refit la même chose, sur la même rangée, sur le même étage mais avec sa main gauche cette fois. Les extrémités de son annulaire, de son index et de son majeur tapaient contre les reliures, glissaient dessus. Elle souriait intérieurement alors que de l'extérieur, ses lèvres formaient une barre plate ; elle ne souriait point. Elle n'était ni heureuse ni mal. Elle était dans rien du tout même. Son esprit était ailleurs, pensant à diverses choses qui impactaient plus ou moins fortement la vie de la belle. Elle pensait à Niall, à leur relation, à ces sourires, à Nina, à ses parents, à tout ce qui peut bien encore rester de concret dans sa famille. Elle pensait à tout cela et à rien en même temps parce qu'en fin de compte, cela n'avait pas plus d'importance que cela au milieu de tous ces livres et de toutes ces histoires.

Jersey s'arrêta au moment même où elle ne sentait plus le doux contact entre sa peau et les livres. Elle avait envie de faire volte-face et de recommencer encore et encore des allers-retours devant cette étagère mais elle savait qu'elle abîmerait les bouquins de cette façon et puis, la bibliothèque allait bientôt fermer. Elle besoin de retrouver l'un de ces bons vieux livres qu'elles aimaient tant, plusieurs de ses favoris alors elle était venue les chercher. Elle avait besoin de les retrouver, de les relire une nouvelle fois alors qu'elle décidait du sort de manuscrits qui finiront peut-être pas être des classiques de la littérature jeunesse dans quelques temps, du moins c'était ce qu'elle souhaitait même si elle serait la seule à savoir les mérites qui lui reviennent de droit.

Au final, Jersey savait que personne n'était au courant de la personne qui faisait son boulot, qui autorisait un livre à avoir la chance de peut-être se faire publier. Elle le savait et y apportait beaucoup d'importance parce que finalement, sans cette personne, le livre ne serait sûrement jamais éditer et ne serait jamais arrivé jusqu'au magasin et ne serait pas devenu un classique. Elle se demandait toujours qui était cette personne derrière les bouquins qu'elle lisait, qu'elle achetait et encore plus envers ces favoris. Elle serait capable de vénérer chacune de ses personnes. Elle ferma les yeux et se donna le courage de quitter ce rayon pour aller se rendre dans celui que la littérature pour jeunes adultes, la catégorie dans laquelle elle trouvait, parce qu'au fond, elle était toujours un peu adolescente dans sa tête.

Jersey avait toujours eu peur de grandir, de l'avenir, même quand elle était dans les bras de l'irlandais aux cheveux teintés. C'était juste que la peur fût plus minime, qu'elle fût logée autre part dans son corps et que sa tête fût bien trop occupée à penser à autre chose. Mais cette peur était quand même présente, moins envahissante mais elle était quand même là et c'était ce qui importait le plus, parce qu'une peur, peu importe sa force et son intensité est quand même là et c'est là le véritable de cette crainte qu'on aimerait le plus souvent étouffer et faire taire pour l'amour de Dieu.

Dear Niall//n.hOù les histoires vivent. Découvrez maintenant