One shot - Arsenic et vieilles bagnoles

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Jacques était couché sur la table d'auscultation, torse nu, le tensiomètre autour du bras.


- Je ne vois rien de très probant au niveau diagnostic, dit le médecin. Peut-être tout simplement une bonne gastro qui vous a mis à plat... Ce qu'il y a de sûr, c'est que vous paraissez fatigué. Depuis quand vous êtes-vous installé à votre compte avec ce garage, maintenant ?

- Cela va faire bientôt 6 mois, docteur.

- Il faudrait lever un peu le pied, Monsieur Leroux. Vous travaillez seul, je crois ?

- Oui, il le faut bien quand on débute, ce n'est pas facile. Ma femme s'occupe de la gestion et de la comptabilité, heureusement...

- En tout cas, seul ou pas seul, je vous conseille de prendre quelques jours de repos. Ce n'est pas parce qu'on a 32 ans qu'il ne faut pas se reposer de temps en temps, vous savez. Vous faites quoi exactement, de la tôlerie non ?

- De la tôlerie, en partie, mais pas seulement. En fait, je suis spécialisé dans la restauration des véhicules anciens, c'est-à-dire que presque l'essentiel de mon métier tourne autour de la remise en état de voitures dites « de collection ». Pour le reste, ce sont des motos, anciennes également.

- Et ça marche bien ? Je veux dire, pour que vous soyez crevé de la sorte, vous devez avoir du travail !

- Oh, ça oui, ce n'est pas le boulot qui manque, mais je n'ai pas quatre bras et compte tenu des charges, je ne peux pas encore me permettre d'embaucher quelqu'un.

- Hum, je vois. Vous pouvez vous rhabiller, dit le médecin en se lavant les mains.


Il retourna s'assoir à son bureau et prit son carnet à ordonnances.

- Vous ne manipulez pas de produits dangereux, Monsieur Leroux, je veux dire pas d'arsenic ou de choses comme ça ?

- Euh non, pas à ma connaissance. Pourquoi me demandez vous cela docteur ?

- Votre état pourrait vaguement suggérer une sorte d'intoxication à l'arsenic ou à l'un de ses dérivés. Ou encore à un autre produit toxique. Mais si vous n'en manipulez pas et que vous ne soupçonnez pas votre épouse de vouloir toucher l'assurance vie...


Jacques finissait de reboutonner sa chemise.

- Surtout qu'elle est grosse, dit Jacques pensivement.

- Qui donc ? demanda le docteur en soulevant les sourcils.

- Eh bien, l'assurance-vie.

- Ah ! Je plaisantais, bien sûr, Monsieur Leroux, dit le médecin en souriant. Je vais cependant vous prescrire des analyses, il faudrait qu'on en sache un peu plus sur cette asthénie et vos céphalées.

- Des analyses de sang ?

- Sang, urine, la totale. Et surtout, vous vous reposez. Je vais aussi vous mettre des antalgiques à prendre en cas de maux de tête. Vous me faites faire ces analyses le plus vite possible, nous sommes d'accord ?


Jacques sortit du cabinet.

Se reposer, se reposer, il en avait de bonnes, ce toubib !

Le boulot n'attendait pas ! Il avait promis de terminer la restauration de la carrosserie de cette vieille Cadillac Séville pour la fin du mois.

A prévoir encore sur cette voiture, pensa-t-il : peinture bleu ciel neuve, exactement comme la teinte d'origine, réfection des chromes. Et tout le reste...

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