Épilogue

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On est début décembre et les vacances de Noël sont dans deux semaines. Nous n'avons pas de neige, juste une petite pluie de temps en temps qui tombe sans qu'on la remarque. Je suis bien installée dans ma nouvelle vie. Enfin, presque, parce qu'une partie de moi est restée à Omaha, dans une chambre surmontée d'un tableau noir, dans une petite voiture jaune citron, dans un casier du lycée Victory, dans un magnifique éclat de rire.

Il n'y a pas un jour où Audrey ne me manque pas. Pas rire que je n'aie envie de partager avec elle. Mais ce manque n'a rien à voir avec l'étau qui étouffait mon cœur les premiers temps. Je sais que je ne serai plus jamais la même mais je me suis bricolé une nouvelle vie avec des moments de bonheur et une vraie foi dans l'amitié. Une vraie foi en la vie. Que je dois à Audrey. Alors au lieu de pleurer lorsque je pense à elle, je lui parle, je lui fais des playlists, j'écris sur mon mur tableau noir tout ce que j'aimais chez elle. Et pour lui rendre hommage, j'ai même liké Jake Gyllenhaal sur Facebook, son acteur favori. Mais je me suis aussi fait de nouveaux amis. Pas des virtuels mais des amis de chair et d'os. Parce que de tous les moments partagés avec elle et parce qu'elle me l'a écrit dans sa dernière lettre, j'ai retenu ça : ne pas s'enfermer dans le chagrin, avancer quoi qu'il arrive.

Matt aussi me manque. On s'est débrouillé pour rester en contact malgré les deux mille kilomètres qui nous séparent. On se parle tous les jours, soit par téléphone, soit par texto ou mail, et parfois en combinant les trois. Le week-end, on se voit par webcam interposée. Il m'a écrit plusieurs lettres très émouvantes et pourtant, ma hantise, c'est qu'il rencontre quelqu'un d'autre.

Elsie c'est donné comme mission de me détacher de lui.
- Tu as besoin d'un homme, me dit-elle un lundi midi, à la cafétéria du lycée. Tu es tellement jolie, tu ressembles à un top model, pourquoi restes-tu accrochée à un type du Kansas ?
- Du Nebraska, lui dis-je. Parce qu'il en vaut la peine. Tu verras par toi-même, il arrive dans deux semaines.
- Peut-être que le nouveau va réussir à te fair changer d'avis.
- Quel nouveau ?
- Il est en maths avec Sarah, dit-elle en baissant la voix. Son casier est juste à côté du sien.
- Il est comment ?
- Immense. Cheveux courts, précise-t-elle en passant le réfectoire au scanner. Attends... non, je ne le vois pas. Il mange peut-être à l'extérieur. En tout cas, il est canon.

Tout en avalant quelques grains de raisin, je marmonne :
- Comment il s'appelle ?
- Je ne sais pas. Personne n'ose lui parler.
La sonnerie retentit. Je me lève en faisant une bise à Elsie. En chemin vers mon cours de maths, un peu stressée par l'interro qui m'attend, j'envoie un texto à Matt. Je connais son emploi du temps par coeur et, à l'heure qu'il est, il est sûrement en cours de littérature.
T ?
En littérature. Pourquoi ?
Désolée de te déranger. On se parle ce soir.
D'acc. Je t'm.
Moi aussi.

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