Chapitre 33

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Quelques heures plus tard, je franchis les portes du lycée. Je ne suis plus la même personne. Je n'ai pas pris de douche et je porte le t-shirt dans lequel j'ai dormi. J'ai juste attaché vite fait ma tignasse de boucles. Je ne me suis pas maquillée, de peur de tout abîmer en pleurant. J'ai avalé trois morceaux de banane et un coca au petit déjeuner. Je ne sais même plus si je me suis brossé les dents.

À l'intérieur, c'est bruyant, trop éclairé et plein de gens qui me regardent en murmurant dans mon dos. On dirait des figurants sur une photo de groupe. Ils sont là pour meubler mais c'est tout. Je monte au deuxième étage et roseau et rejoint mon casier. Des filles sont en train de papoter devant le casier d'à côté. En me voyant, elles s'arrêtent et me laissent passer.
- Salut, Daisy, dit l'une d'elles
- Salut, dis-je, incapable de me rappeler son prénom.

Je prends mes livres et je me force à ne pas regarder le casier d'Audrey, mais c'est raté. Je la revois devant, le premier jour, tout sourire, en train de me complimenter sur mes chaussures, puis de m'inviter à déjeuner. Elle respirait, elle vivait.
Comme victime d'un empoisonnement, je suis soudain prise de spasmes et de sanglots qui me plient en deux. Tout le monde se fige et me dévisage. Je fonce à l'infirmerie.

Je suis restée enfermée dans ma chambre pendant deux jours. Enfin, jusqu'à ce que Mason en ait assez et me confisque la clé.
- Tu as de la visite, me lance-t-il tandis que j'ai la tête enfouie sous l'oreiller.
- Qui que ce soit, dis que je ne peux pas.
- Tu le lui diras toi-même, dit-il en s'éloignant.
Je sens quelqu'un entrer et s'asseoir au bout de mon lit. Je reste la tête dans l'oreiller, à chercher l'air, comme dans un sauna. Finalement, ce silence me pèse et je jette l'oreiller par terre. Et là, je découvre une personne que je m'attendais plus à revoir.
- Sydney ?
- Salut, trésor, dit-elle de sa voix douce. J'ai entendu dire que tu traversais une sale période.

Cette seule mention remue le couteau dans la plaie. J'éclate en sanglots. Sydney se rapproche et me prend dans ses bras. Son pull gris doit être tout souillé par mes larmes et ce qui coule de mon nez mais elle ne se formalise pas. On reste ainsi un long moment, elle à me caresser les cheveux, moi, à déverser mon chagrin sur son épaule. Puis les mots sortent enfin. Je lui raconte tout au sujet d'Audrey, dans les moindres détails, une partie de l'histoire avec Matt. Comme je m'en veux d'avoir été auprès de Megan et non d'Audrey, au moment de sa mort. Comme Mason a l'air inquiet ces temps-ci. Comme il semble se passer quelque chose d'étrange autour du programme.
- Arrête de porter le monde sur tes épaules, me dit Sydney.
- Si seulement Mason était comme toi.
- Sois un peu indulgente avec lui, il ne sait peut-être pas y faire mais il a quand même eu l'idée de m'appeler. Et je suis sûr qu'au fond, il est plus sensible que tu le crois.
- Peut-être, dis-je à moitié convaincue car pour moi, Mason restera toujours un scientifique imperméable aux sentiments. Je ne sais pas quoi faire depuis qu'Audrey n'est plus , je suis perdue.
- Daisy, j'aimerais t'aider, mais la seule chose qui apaise un cœur brisé, c'est le temps.

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