Chapitre 26 (partie 1)

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Après le premier jour de tests sur Megan, on va se promener autour de Pike Place Market. Habituée désormais aux petites villes, la foule me paraît immense mais je me sens bien. On s'achète nous traditionnels caramels au beurre salé qu'on savoure en regardant les pêcheurs près du pont. Parmi nos rituels, on aime bien finir la soirée dans un restaurant de crabe à volonté.
- On peut éviter le crabe ce soir ? dis-je. Je suis un peu barbouillée.
Megan me prend par le bras pour m'emmener vers le premier Starbuck.
- C'est la première fois que tu veux éviter le crabe, commence-t-elle, que se passe-t-il ?
- Matt m'a demandé de voler du sérum pour Audrey.
Elle manque de s'en décrocher la mâchoire.
- Et tu vas le faire ?
- Megan !
- Ben pourquoi pas ?
- Mais est contraire au règlement ! Je risque la prison !
- Mais non, dit-elle en sirotant son latte. Ils auraient trop peur que tu ne fasses foirer tout le programme.
- Je n'avais pas vu les choses comme ça.
- Écoute, Daisy, on a beau leur être reconnaissantes, on ne peut pas tout accepter. Ils n'ont pas le droit de contrôler toute notre vie.

Je la fixe intensément. Sans se troubler, elle poursuit :
- Et tu devrais penser la même chose !
- Donc quoi ? Tu crois que je devrais en voler ?
- Je crois que tu devrais faire ce que tu sens, pas ce que Dieu attend de toi.
Le nom de Dieu me rappelle instantanément le nouveau labo, le projet d'expansion, et le dossier n°22.
- Tu sais, je dois te dire quelque chose.
- C'est un scoop, j'espère !
L'instant d'après, elle sait tout.
- On doir retrouver ce dossier, dit-elle, et la seule façon de le faire, c'est de nous adresser aux Convertis.
- Ah oui? Et comment tu comptes faire ça ? dis-je en vidant mon café.
- Prends-en un autre, c'est les vacances !
Je pars commander un autre café et un scone.
- Alors, tu as réfléchi ? On fait comment ?
- Qu'es-ce qu'il y avait dans ce dossier ? Essaie de te rappeler.
- Je ne sais plus. J'étais tellement scotchée, je n'arrivais même pas à comprendre ce que je lisais. Si, attends, on parlait de la ville de Franklin, dans le Nevada. Tu connais ?
Megan cherche sur son téléphone.
- Pas étonnant qu'on ne connaisse pas, c'est un bled paumé, dit-elle, le pauvre gamin s'est retrouvé dans un trou de trois mille habitants. Mais d'un autre côté, c'est une chance. Une nouvelle famille ne passe pas inaperçue dans un endroit pareil. On doit interroger les gens.

En quelques minutes, elle fomente un plan génial : appeler le journal local. Elle dira qu'elle enquête pour le compte du site de l'école au sujet de la nouvelle famille. Elle s'exécute aussitôt devant moi. Comme elle ne connaît même pas le nom de la famille en question, elle patauge un peu mais c'est tellement énorme que ça marche.
- Oui, c'est ça, les Emerson, s'écrie-t-elle au téléphone. Bill, merci beaucoup. Très bonne soirée à vous.
- Alors ? On fait quoi avec ce nom ?
- On va sur Facebook ! dit-elle avec évidence.
- Tu devrais devenir agent.
- Je sais, David n'arrête pas de me le dire.
- Ok, allons-y.

Facebook ne trouve personne au nom d'Emerson à Franklin mais l'état du Nevada en compte pourtant des dizaines. C'est peine perdue, me dis-je, quand Megan appelle David, son tuteur.
- Tu me rendrais un petit service ? lui demande-t-elle d'une voix suave. Voilà, j'ai rencontré quelqu'un la semaine dernière, on s'est bien entendus et on a prévu de se retrouver sur Facebook mais je ne me rappelle pas son prénom.
Pause.
- Oui, absolument. Son nom de famille, c'est Emerson, cette personne habite Franklin, dans le Nevada.
Pause.
- Ah bon ? Mais tu sais toujours tout. Ils viennent de s'installer à Franklin, ils ont sûrement pris un abonnement Internet, tu devrais pouvoir retrouver ça, non ?
Pause.
- Tu es génial !
Pause. Gloussements.
- Bien sûr, bien sûr, tu es débordé, mais je te revaudrai ça et...
Pause.
- Tu sais quoi ? Je n'en suis même pas certaine ! dit-elle en éclatant de rire.
J'entends également le rire de David.
- Génial ! Merci pour ton aide.
Pause.
- Toi aussi. Au revoir.
- Alors qu'y avait-il de si drôle ? dis-je aussitôt.
Elle me sourit à pleines dents.
- Il a bien senti que je ne savais même pas si c'était un garçon ou une fille que je cherchais mais comme la soirée dont j'ai parlé était une soirée de transsexuels, il n'a pas bronché.
- Tu es trop forte.
- Je sais, miss D.

[...]

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