Chapitre 38

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Je ne peux m'empêcher de lui rire au nez.

- Vous pensez vraiment pouvoir me faire avaler ça ? Laissez-moi partir maintenant. Laissez-moi retrouver ma mère et mon frère. Si vous ne l'avez pas déjà tué.

- Non, nous ne l'avons pas tué.

J'écarquille les yeux.

- Mon frère est toujours vivant ?

Je ne peux m'empêcher de pleurer. Mes joues se crispent et mes lèvres se tordent de chagrin.

- Il est vivant ? Je redemande, inlassablement.

- Oui, répond-elle, émue.

- Laissez-moi le voir, je vous en prie.

- Dès que nous aurons fini, tu es d'accord ?

Je ne peux pas refuser un tel compromis. Je me tais et me concentre difficilement. Je trépigne.

- J'ai besoin que tu assimiles ce que j'essaye de te montrer depuis tout à l'heure.

- Vous parlez des vidéos ? Elles sont insignifiantes pour moi. Ce n'est pas ce qui s'est passé.

Elle ne perd pas patience et continue de les faire défiler. Je me vois au poste de police, face à Carl et près de Beth.

Où est ma mère ? Questionné-je.

Elle reste muette.

Dans le village abandonné, je suis seul. Je prends la fuite, me réfugie dans une maison et me cache. Je repense au corps de l'enfant dans le placard et à mes amis qui n'ont pas été pourchassés. Cela paraît logique d'après les vidéos, puisqu'ils ne sont pas là, avec moi. Je sais ce que nous avons vécu ensemble et personne ne pourra me prouver le contraire.

Me voilà seul dans la seconde ville. Je suis au milieu de l'arène, face à Barry. Il me jette de l'essence sur le visage et cela ravive en moi ce souvenir terrifiant. Il n'y a toujours pas de signe de vie de mes amis. Je suis solitaire sur chacune des séquences.

« Pourquoi ne pas parler à la première personne et assumer vos choix ? » Les paroles du Caïd prennent un sens. Il savait que j'étais seul... Il se moquait de moi.

- Qu'essayez-vous de me faire croire ? Votre technologie vous permet de faire des miracles audiovisuels. Vous avez sûrement truqué ces vidéos.

Je me relève brusquement et m'assois. Je garde mon sang-froid. Je repense à Claire et à ses mises en garde «  N'écoute surtout pas ce qu'ils te diront. Tu ne peux pas leur faire confiance. » Ont-il essayé de la troubler, elle aussi ? Est-elle revenue dans cet état à cause d'eux ? Je revois son corps décharné se jeter sur moi.

L'inspecteur Carl fait son retour dans la pièce.

- Comment cela s'annonce-t-il ? Demande-t-il.

- Cela pourrait être plus mauvais, dit-elle.

- Tu pourrais essayer une injection, encore une fois ?

- Je peux... oui. Mais son efficacité s'amoindrit à chaque fois.

- Combien de temps penses-tu que cela puisse le soigner ?

- Jusqu'à la fin de l'année... tout au plus, répond la femme.

Ils semblent oublier ma présence.

- Je n'ai pas besoin d'être soigné. C'est vous qui êtes fous, pas moi.

- Puis-je passer un accord avec toi ? Me demande-t-elle.

- Je ne sais pas si je peux vous faire confiance, plus maintenant.

- Laisse-moi te prouver le contraire. Si tu me laisses faire mon travail, je te promets et t'assure que tu retrouveras ton frère. Je l'amènerai dans cette pièce, ici-même, dans une dizaine de minutes.

J'émets une légère hésitation mais ne peux pas résister.

- J'accepte.

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