Elle réfléchissait à une possibilité, une possibilité tellement saugrenue qu'elle s'était interdit d'y penser. Elle ne possédait pas son téléphone, impossible donc de la suivre avec un traceur basique.
Et si elle avait été un des hôtes test de MCP ? Et si ces microscopiques nano-puces se baladaient tranquillement dans son organisme ?
Cette pensée la fit frissonner d'horreur.
Jawaad la regardait passer par tous les stades ; l'incompréhension, la frustration, la colère et maintenant la panique. Elle faisait les cents pas, soufflant de mécontentement.
-Tu penses à ce que je pense, fit-elle en s'arrêtant soudainement.
Elle le fixait intensément, les yeux brillants, le visage crispé d'angoisse.
-Oui, et si c'est la réalité, on est dans la merde.
Tant que le traceur serait en elle, peu importait où elle irait, il serait toujours possible de la retrouver.
-Je connais une personne qui me doit un service, et qui pourra m'aider, il va falloir faire de la route par contre.
Trois heures plus tard, après avoir acheté une carte prépayée, et appelé son pilote, elle attendait à l'aéroport John Fitzgerald Kennedy avec Jawaad.
Elle était titulaire de la carte gold, alors ils patientaient à l'abri des regards dans un salon privé, où une ribambelle de serveur déambulait, plateau d'amuse-gueule en main.
Ici –comme partout quand votre compte en banque possédait plus de sept chiffres- vous pouviez tout faire, une armée de masseuses disponibles vingt-quatre heures sur vingt-quatre se déployait à vos mollets afin d'améliorer le retour veineux mis à rude épreuve lors de vols prolongés. Une fontaine de champagne dégoulinait sur un lion taillé dans la glace, Angel s'en servit une coupe.
Il leur faudrait au moins huit heures de vol avant d'arriver dans la capitale française, où l'attendait le Pr. Durand.
Ils n'attendirent qu'une trentaine de minutes avant de voir le jet atterrir. Sa minuscule carlingue tranchait face aux énormes Boeing qui l'entouraient, mais c'était une vraie petite maison volante avec salon, salle de bain, salle de jeux, salle de réunion...
Même si sa notoriété lui aurait permit d'embarquer sans problème, elle tint à effectuer la vérification par empreinte digitale de son identité –Angel ne détenait aucun papier d'identité. L'équipage, constitué du pilote, Carlos Sanchez, du copilote et de deux hôtesses les accueillirent.
Jawaad discutait avec le pilote de données de vol et autres tandis qu'Angel prenait place sur la banquette en carré qui faisait le tour du salon. Les deux hôtesses tirées à quatre épingles ne cessaient de lancer des sourires à Jawaad. Elle ne put empêcher le petit gloussement de s'échapper de sa gorge à la vue des deux poulettes qui caquetaient et cambraient du dos au moindre regard. Ses ongles manucurés claquaient sur le cuir avec amusement, elle finit par détourner le regard et ses yeux fixèrent un point imaginaire.
Le professeur Pierre-Eric Durand était un hématologue doué, ce fut lui qui prit en charge Catherine Rockwell, la mère d'Angel pendant sa leucémie. Son père l'estimait malgré son impuissance à la sauver.
Jawaad vint s'asseoir près d'elle, un sourire étrange collé au visage.
-Ça va, tu t'amuses bien ? lui lança-t-elle le ton rieur.
Il lui lança un regard en biais.
-Ne rage pas, tu sais que tu es la seule pour moi, ricana-t-il.
Elle rit légèrement.
-Ne te méprends pas sur mes intentions, ce petit spectacle me distrait plus qu'il ne m'agace.
Il lui répondit par un clin d'œil.
Le reste du trajet se déroula sans encombre, mises à part quelques habituelles turbulences lorsque qu'ils approchèrent les côtes bretonnes. Angel avait enfilé la tenue que sa secrétaire personnelle s'était chargée d'apporter à bord du jet. Une jupe crayon, une chemise fluide blanche aux fins liserés dorés, une pochette de la marque aux C entrecroisés ainsi qu'une paire de sandales à talons.
Elle avait intégré à sa tenue un trench beige, une écharpe ainsi qu'une paire de collant épais et sombre pour se protéger du froid.
Angel portait quotidiennement des talons, elle aimait le cliquetis qu'ils produisaient et qui annonçaient toujours son arrivée. Mais par dessus tout, elle aimait être à hauteur de ses interlocuteurs masculins ; ne pas être obligé de lever les yeux mais les dominer de toute sa hauteur.
Elle avait également pris le soin de se maquiller, ses yeux étaient délicatement travaillés de manière à faire ressortir les deux perles grises héritées de sa mère.
Jawaad l'avait scrutée en détail quand elle fut sortie de la salle de bain. Il rit silencieusement, elle portait bien son nom.
***
Irina Spolitz marchait activement, son café à la main, slalomant entre deux touristes chinois complètement perdus quand elle fut recouverte d'un liquide bouillant.
Quelqu'un l'avait violemment bousculé et son café s'était déversé sur elle. Elle se retourna, furieuse, mais fut surprise de voir une troupe d'hommes en noir prendre possession du terminal 1.
-Madame, si vous ne possédez pas de badge d'accès veuillez nous suivre.
L'un d'entre eux l'avait saisie par le biceps sans ménagement et l'extirpait hors de cette partie de l'aéroport sans même attendre une quelconque réponse de sa part.
En dix-sept années de carrière de contrôleur aérien elle n'avait jamais vu un tel dispositif déployé, même pour le président de la République. Mais elle fut d'autant plus intriguée de ne pas voir d'écusson cousu sur les équipements de ces messieurs.
Il y en avait pourtant toujours, avec l'acronyme du groupe d'intervention en question, les CRS en avait par exemple un rouge, de forme conique, avec en caractère majuscules POLICE NATIONALE et CRS.
Elle se laissa traîner, trop déboussolée pour protester, et fut bientôt entourée par des centaines de voyageurs furibonds à l'idée de rater leurs avions.
Mais que se passait-t-il ?

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CONSPIRATION
Mistério / SuspenseLa fortune, le pouvoir... Que chercheriez-vous, si vous possédiez déjà tout? Seriez-vous prêt à pactiser avec le diable pour le pouvoir suprême ? For One World Order.