CONSPIRATION

Chapitre 5

Elle pouvait l'entendre sourire. Une vague de rage déferla à travers ses veines. Elle ne bougea pas d'un pouce, lui tournant le dos. Alors qu'elle le pensait mort, il était là, à deux mètres d'elle. Elle le savait, il l'avait manipulée, pendant tout ce temps, il s'était joué d'elle. Sa mâchoire se serra instinctivement, elle bouillonnait. Elle était Angel Rockwell, elle était intouchable. Comment avait-t-il pu organiser ça, sûrement pas tout seul. Ils devaient être une équipe organisée, et avoir de puissants contacts.

Le piège à miel s'était refermé sur elle. C'était une coutume depuis bien longtemps maintenant : on détourne l'attention du sujet d'une quelconque manière pour lui soutirer des informations. Mata Hari en était une de ses plus célèbres ambassadrices, la double espionne franco-allemande, qui séduisit des dirigeants pour recueillir des informations stratégiques. Mais plus récemment, des cas comme l'affaire Sage –Robin Sage spécialiste en sécurité informatique-, qui, dans le cadre d'une expérience, piégea divers hommes politiques et militaires. Il se fit passer pour une jeune et jolie chercheuse sur les réseaux sociaux et réussit ainsi à arracher des informations ultrasecrètes à ses sujets.

Les Rockwell étaient réputés pour leur égo presque aussi colossale que leur fortune. Rien ne les affectaient plus que le sentiment de trahison.

Elle le sentit se mouvoir derrière elle, et perçut le froissement du tissu au moment où il s'asseyait.

-Et bien, Corps Industrie aurait dû me prévenir qu'ils avaient changé de Directeur des finances, fit-elle d'une froideur inouïe.

Assam émit un petit rire.

-Je pensais que tu allais être un peu plus contente de me voir.

Ce fut à son tour de rire, il était toujours aussi arrogant.

-Qui suis-je censée avoir en face ? elle fit une pause, le laissant se questionner, Liam ou Jawaad.

Elle pivota lentement en sa direction, jaugeant sa réaction. Il avait baissé les yeux sur ses mains jointes, et son éternel sourire en coin était flanqué sur son visage.

Elle profita qu'il ne la regardait pas pour l'observer minutieusement. Ses cheveux bruns lui arrivaient au niveau de la mandibule et encadraient sa mâchoire barbue. Ses yeux foncés étaient surmontaient de longs cils recourbés, typiquement arabe ajouta-t-elle intérieurement. Il n'avait plus rien à voir avec l'anglo-saxon aux yeux verts pour qui il s'était fait passer.

Si elle l'avait croisé dans la rue, elle ne l'aurait pas reconnu. Tout de lui était différent.

Alors que Franklin était toujours classe et distingué dans un costume trois pièces, Assam portait un ensemble entièrement noir, Jean, tee-shirt, veste en cuir et chaussure militaire. Même son attitude différait, il était avachi nonchalamment dans son fauteuil, ce qui aurait été impensable pour Liam.

Angel tentait de ne rien faire paraître, mais elle était subjuguée, avec une minuscule pointe d'ébahissement pour sa prouesse. Il l'avait berné comme une bleue, elle se mordit violement l'intérieur de la joue pour ne pas exploser. Elle décida de jouer à son propre jeu.

Elle s'avança lentement vers son énorme fauteuil, tel un félin, elle le fixa droit dans les yeux. Son visage était impassible, elle se contenta de cet échange du regard. Comme la première fois.

Elle finit par rompre le lourd silence.

-Que me vaut l'honneur de cette visite, questionna-t-elle, un sourire dédaigneux scotché au visage.

-Je dois te parler, fit-il en haussant avec nonchalance les épaules.

-J'ignorai que les morts pouvaient parler, elle le fixait toujours, il prit un air presque gêné.