L'automne est définitivement ma saison préférée. J'ai démarré les cours depuis un mois et demi, tout est passé si vite. Le rythme est très intense, une demi-journée par matière, et les fameuses khôles, petits contrôles hebdomadaires pour vérifier notre niveau dans chaque discipline. Mes journées se suivent et se ressemblent, heureusement, je n'habite qu'à quinze minutes à pied de l'établissement. Je me suis même fait une amie. Ce n'est pas beaucoup, mais c'est largement suffisant pour l'introvertie que je suis. Tout d'abord, May. Cette pétillante franco-marocaine aux grands yeux en amande a été la première belle découverte parisienne. Comble de bonheur, nous nous sommes rendues compte que nous habitions le même immeuble, du coup, nous sommes inséparables. May est tout mon contraire : ouverte aux autres, bavarde et toujours souriante. Je me suis très vite sentie à l'aise à ses côtés. Et puis, elle est toujours force de proposition pour visiter de nouveaux quartiers, aller au cinéma, voir des expos...elle me change de ma routine casanière habituelle. Enfin, nous sommes toutes les deux célibataires, ce qui nous a rapproché. En plus, je lui ai raconté mon histoire avec Sam. May a été la première personne à ne pas me juger, mais plutôt comprendre les risques que je prenais. Elle avait conclu notre discussion en disant : "Au moins, tu n'auras pas eu de regrets". Je n'avais pas un avis aussi tranché sur la question, mais c'est vrai, j'étais vraiment prête à m'investir. Je me sentais bien aux côtés de May, nous ne nous connaissions que depuis un mois mais une forte complicité s'était déjà installée entre nous. May était aussi très différente de Marion, peut-être que je me sentais moins complexée par rapport à elle. Ma meilleure amie avait toujours été au centre de tous les regards et conversations, je m'étais habituée à être la fille de l'ombre. En revanche, May me "laissait" la place pour briller un peu. Et puis, je ne vois presque plus Marion, elle passe son temps avec Matthieu, ils préparent d'ailleurs leur emménagement dans un nouvel appartement. Enfin, c'est horrible à dire mais Marion me rappelle beaucoup cet été, et je pense que j'ai besoin de mettre tout cela entre parenthèses et profiter de mes premiers instants d'étudiante parisienne...
Me voilà dans l'immense bibliothèque du lycée où j'effectue ma prépa. C'est un établissement du dix-neuvième siècle qui est classé monument historique, et qui ressemble par moment à Poudlard ! La bibliothèque est au dernier étage d'un bâtiment, elle s'étend sur deux étages où s'accumulent des rayons interminables d'ouvrages. Au milieu de tout cela, les étudiants révisent sur des longues tables, rangées impeccablement, et parsemées d'anciennes lampes de banquier vertes. J'adore le silence religieux qui règne dans ce lieu. Je me tourne vers la fenêtre et contemple le paysage : dehors, la cour est balayée par des vents très forts, les vieux arbres semblent plier sous la puissance de la nature. J'aime l'automne, car il y règne une douce mélancolie. C'est aussi la saison de la rentrée, la promesse d'une nouvelle vie ainsi que de nouvelles résolutions. Je jette un oeil à May, assise à côté de moi : elle est visiblement plongée dans son problème d'algèbre. Autour de nous, quelques étudiants tentent de retrouver des livres, ou lisent paisiblement. Il fait bon, le chauffage central ainsi que la lumière tamisée créent une atmosphère cosy. Soudain, je reçois une notification de mail. Je laisse échapper un cri, abasourdie par le nom qui s'affiche : Sam Lester. May se tourne brutalement vers moi, puis jette un oeil à mon écran. J'ai le souffle coupé, je viens de recevoir une énorme claque. Sam m'avais envoyé exactement deux messages depuis le dernier incident. Le premier contenait vaguement des excuses, le deuxième disait : "PRINCESSE ?". Tout cela en l'espace de presque deux mois. Sous le choc, ma vision se brouille, je n'arrive pas à lire l'intégralité du message. May me prend l'ordinateur d'entre les mains et commence à lire. Elle fait les gros yeux, puis elle soupire et se retourne vers moi :
- Tu n'as pas menti quand tu as dit que c'était un psychopathe Lou. Ce mec est COMPLETEMENT BARRE ! C'est le message le plus insensé que j'ai jamais lu !!
Je lui reprend l'ordinateur d'entre les mains, inspire profondément et commence à lire son mail, tremblante. Arrivée à la fin, je ne contrôle plus du tout mes tremblements, j'ai le souffle coupé et ma vision se brouille. Je fixe le vide devant moi, interdite. Je vois May s'agiter et ranger nos affaires, je la suis comme un zombie. Puis, peu à peu, la douleur s'installe, chaque mot est une dague qu'on enfonce au plus profond de mon coeur.
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Arrivées chez moi, May me regarde et commence :
- Je m'en fous, je vais prendre ma brosse à dents et descendre passer la nuit avec toi. Ce p***** de connard !!!! Je veux le tuer !!!
En guise de réponse, je lui demande dix minutes de solitude et rentre dans mon appartement. Elle me prend dans ses bras et me promet de passer me voir vers 21h. Je jette mes affaires de cours sur le canapé, enlève mon jean et ma chemise, me met en pyjama et me glisse dans mon lit. Bizarrement, je n'arrive pas à pleurer. Ce mail était d'une telle violence, que je suis encore à peine en train de digérer les horreurs qu'il m'a écrite. J'avais réussi à mettre Sam entre parenthèses ces dernières semaines, mais je n'avais pas encore totalement tourné la page. Ce n'était pas une rupture car nous n'étions pas ensemble, j'étais restée sur un grand point d'interrogation : pourquoi ? Ce soir, je recevais enfin toutes les réponses. Je me sens à bout de force, je n'ai pas envie de pleurer mais mon coeur est vidé, j'ai un mal de crâne énorme. J'ai besoin que ça sorte. Sans réfléchir, je prend mon téléphone et compose un message pour May, en lui demandant de venir.
Quinze minutes plus tard, May est à ma porte, un pack de bières à la main.
- On va analyser cela au calme, ma Lou. Mais d'abord, j'ai l'impression que tu ne m'as pas tout dit. On ne peut avoir ta réaction que lorsqu'on est amoureux. J'en déduit que c'est le cas.
- Oui, avouais-je d'une petite voix brisée.
- Parfait, alors je veux que tu me racontes tout. Cette fois-ci, je ne veux pas que tu me racontes les faits, mais plutôt ce que tu ressens.
J'ouvre une bouteille de bière, en boit près de la moitié pour me donner du courage, et commence un long monologue. Je raconte à May toutes mes angoisses inavouées, le sentiment permanent d'insécurité que je ressens avec Sam, mais aussi l'impression que tout est parfait quand je me retrouve dans ses bras. Je lui avoue aussi que je n'ai jamais réellement cessé de penser à lui, que son silence me bouffait petit à petit. Je finis par lui avouer l'inavouable : je pense qu'il a raison sur toute la ligne, et une petite voix en moi me dit d'accepter ses conditions. May me fixe, la tête de côté et les sourcils froncés. Elle ne me juge pas, je le sais, mais elle se prépare juste au pire.
- J'ai besoin de le voir...je crois que je vais le voir. Je veux juste une réponse à mes questions.
- Lou...tu atteins un point de non-retour avec ce mec. Tu es en train de t'embarquer dans une relation un peu trop tumultueuse à mon goût.
- Je sais...mais si c'est la seule façon d'être heureuse, je suis au moins prête à écouter ce qu'il a à me dire.
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Coucou à tous et à toutes !
Tout d'abord, je tiens à vous remercier du fond du coeur pour votre fidélité, on approche des 1000 vues !!!!!!!!!!!! J'ai pas mal de boulot en ce moment, et ces chapitres sont très durs à écrire, donc je m'excuse sincèrement du retard. C'est difficile de se mettre dans la tête d'une personne qui s'embarque dans une relation abusive. Pourtant, Lou n'y voit aucun danger...Que pensez-vous de la tournure que prend l'histoire ?
Merci ! Bises, Lou.
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Love me Lou : Tome 1
Roman d'amourLou a dix-huit ans, elle vient d'avoir son Bac. L'été commence, une parenthèse floue où l'on quitte le cocon de l'adolescence pour des premiers pas incertains dans la vie adulte. Une parenthèse dont Lou compte bien profiter pour rattraper des années...