Vie d'une Fille Compliquée

Chapitre 7

La journée du lendemain avait été particulièrement longue. Le ciel était resté gris toute la matinée, et on avait bien failli avoir droit à un orage après la pause déjeuner. Bref, les cours s'étaient une fois de plus suivis les uns après les autres sans que rien d'extraordinaire n'arrive, mis à part peut-être le fait que Mme Troyens avait décidé de constituer des binômes en ce début d'année.

Des BINÔMES. La pire chose au monde lorsque votre meilleure amie n'était pas là pour vous servir de bouée de sauvetage. Si je n'aimais personne en particulier dans la classe, je savais au moins qui je ne pouvais pas supporter.

Et devinez quoi ?

Ce bourreau quinquagénaire qui se disait prof de physique-chimie m'avait flanqué Zack, alors que tous les autres élèves s'étaient retrouvés avec leur voisin de table avec qui ils s'entendaient très bien.

-Votre niveau est tout juste acceptable, mademoiselle Mandaro, m'avait-elle avertie. Cela va de soi que vous ne survivrez pas aux travaux pratiques en continuant à manipuler des éprouvettes seule dans votre coin. M. Carter vous aidera à redresser la barre.

J'avais soutenu son regard insistant sans fléchir, imaginant une lumière rouge pile entre ses deux yeux de crocodile. Elle exagérait. Un douze à chaque contrôle, ce n'était pas si dramatique. N'empêche, j'avais envie de m'arracher les cheveux.

Celui que je considérais désormais comme mon pire ennemi avait posé ses affaires sur la table voisine en me dévisageant sans aucune discrétion. Au bout d'un instant, il avait tendu une main dans ma direction, son faux sourire toujours collé sur le visage.

-J'ai hâte qu'on commence.

Javais six heures à tuer avec notre prof principale par semaine. Je doutais de pouvoir tenir le coup. Le petit air satisfait que Zack affichait constamment me tapait sur les nerfs.

J'avais ignoré son geste et fait comme s'il n'existait pas jusqu'à la fin du cours pour enfin quitter la salle sans me retourner. Je pouvais me débrouiller toute seule, j'allais redoubler d'efforts. Plutôt mourir que de m'avouer en détresse.

Dans tous les cas, on était mercredi midi, et Julia m'attendait devant le lycée avec sa nouvelle mobylette rouge flambant neuve. Je la retrouvai sur le parking, ses ray-ban sur le bout du nez. Elle portait un top blanc à pois bleus et une jupe délavée.

-Plage, nous voici ! s'exclama-t-elle alors qu'un groupe d'élèves se retournait pour la dévisager.

-Une jupe ? T'as pas trouvé plus pratique pour conduire ce genre d'engin ?

Elle me fixa d'un air contrit.

-Rhô, ça va ! Alors, tu l'aimes ou pas ? Monte, dépêche-toi. Le soleil va se coucher avant nous si ça continue.

Elle parlait tellement vite que je me demandais comment j'arrivais à toujours saisir le sens de ses phrases. Je grimpai sur la selle arrière et resserrai mon emprise sur mon sac.

-Tiens, je te prête mon casque. Ça serait dommage que tu meures dans un accident de la route par ce bel après-midi.

Toujours le mot pour rire, je vous dis.

-Avoue que tu adorerais engloutir le pique-nique à toi toute seule ! la taquinai-je.

Nous avions fait un saut par la maison pour enfiler nos maillots de bain et préparer de quoi manger. La glacière était pleine à ras-bord une fois remplie, et j'avais été obligée de prendre un melon sous le bras en plus du petit parasol. Heureusement que nous n'avions que quelques mètres à parcourir avant de pouvoir profiter du sable chaud.