Quel bonheur d'enfiler le jogging du lycée et un sweat-shirt informe pour se retrouver perdue au milieu des bois à trois heures de l'après-midi.
Comme d'habitude, la prof nous avait demandé de récupérer le numéro d'un maximum de balises indiquées sur la liste en un temps record avant de revenir au point de ralliement.
Sauf que j'avais égaré la carte qui me permettait de me repérer et le chronomètre me rappelait depuis cinq minutes qu'il faudrait bien un jour ou l'autre que je me lève de ce vieux banc près du lac.
Aujourd'hui, j'avais discuté avec mon équipe pour que je puisse aller chercher le dernier numéro à l'autre bout de la forêt pendant qu'ils m'attendaient en un point fixe d'où on repartirait ensemble.
Et j'avais perdu non seulement ma carte, mais aussi toute mon énergie et ma motivation.
Si ça ne tenait qu'à moi, j'aurais sorti mes écouteurs et lancé une playlist au hasard jusqu'à ce que quelqu'un me tombe dessus.
Sauf que ça ne se passait pas comme ça. J'avais maintenant dépassé le temps limite et Mme Quenil avait horreur des retardataires.Et puis, je savais au fond que je n'étais pas capable de me tourner tranquillement les pouces. J'angoissais au moindre petit problème et craignais trop d'avoir une sale appréciation sur mon bulletin pour me moquer des règles.
Je me faisais un sang d'encre, sûrement plus que la prof et tous les élèves réunis.
J'imaginais déjà la tête de Mme Quenil, râlant et pestant sur mon cas désespéré en voyant mes coéquipiers revenir sans moi.Eux se fichaient d'ailleurs éperdument de ma cause, du moment qu'ils pouvaient avoir une bonne note grâce à moi sans trop se fouler. Ils n'avaient pas demandé à se retrouver en ma compagnie, et je tiens à préciser que c'était réciproque.
Je respirai l'odeur d'humus et de feuilles vertes en me grattant lles mollets à travers mon vêtement. Je revenais chaque lundi soir chez moi avec une série de piqûres de moustiques ou de marques laissées par des ronces un peu trop collantes.
J'adorais la forêt pourtant, c'était même mon endroit préféré de toute la ville. Je n'y venais pas tous les dimanches comme Julia pour y faire mon jogging matinal, mais j'y avais passé mon enfance à jouer dans la partie réservée aux structures gonflables pour les enfants.
Jamais jusqu'ici je n'avais abordé ce coin sombre et touffu. De hauts chênes barraient l'accès de mes yeux au soleil, et plusieurs rochers couverts de mousse formaient un terrain d'escalade risqué. Aucune plaque d'égout, aucun panneau d'indication ou même de grillage dans un rayon de dix mètres.
Rien qui puisse me permettre de me ramener sur le chemin du retour.
Comment faisait-on pour être aussi étourdie que moi ? J'avais effectué trois fois au moins un tour complet pour me rappeler par où j'étais venue, mais j'étais rapidement devenue prisonnière de la nature sauvage.
Le pire restait la chaleur. J'avais oublié d'emporter une bouteille d'eau et ma gorge m'irritait.
-On dirait que quelqu'un s'est perdu dans les bois.
Je sursautai en entendant la voix de Zack dans mon dos.
Après avoir retrouvé un rythme cardiaque à peu près correct, je me retournai lentement et le fixai sans trop comprendre.
Est-ce qu'il est venu pour moi ?
Il avait dû lire dans mes pensées car il passa nonchalamment sa main dans ses cheveux et vint s'asseoir à côté de moi.
Je me décalai par réflexe, ce qui le fit sourire. Jamais quelqu'un ne m'avait autant agacé.
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Vie d'une Fille Compliquée
Fiksi RemajaLola Mandaro est une adolescente sans histoire. Un physique banal, une passion pour la lecture et la musique, une souris hyperactive comme animal de compagnie... voilà ce qui rythme sa vie de lycéenne. C'est une jeune fille sérieuse qui travaille én...