Chapitre 3

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Elles appelaient toujours à l'aide, soudain, Eden sentit deux mains agripper ses épaules par derrière. Elle poussa un cri strident et se retourna.

Un jeune homme d'environ vingt, vingt cinq ans leur faisait face, l'air furieux :
"Mais vous êtes vraiment connes ! Pourquoi est ce que vous criez ? Vous voulez tous les rameuter ?"

-Rameuter qui, enfoiré ? lança Eden, d'un ton insolent, à la fois honteuse et énervée d'avoir eu peur.

Le jeune homme serra sa mâchoire et tourna les talons. Céleste le suivit, trop heureuse d'avoir trouvé une autre personne "normale". Eden, de mauvaise grâce, se mit en marche. La jeune femme trottina un peu pour se retrouver à la hauteur de leur sauveur.

"Ne marche pas à côté de moi, reste derrière, sinon on risque de se perdre."
-Hein ? Comment ça ?
-Je ne sais pas si tu as remarqué, mais il n'y a pas de moyen pour s'orienter ici. Alors je marche toujours en ligne droite. C'est ma technique afin de ne pas me perdre.

Elle s'exécuta, mais tapota légèrement sur son épaule.

"Qu'est ce que tu veux ? demanda t-il d'une voix froide."

-Qui es tu ? Où est ce que tu vas ? Comment est ce que tu t'es retrouvé ici ? Qui sont ces gens que nous allions rameuter ? le pressa t-elle.

-Je vais à la base. Pour le reste, j'ai pas envie d'en parler.

Elle leva les yeux et le regarda. Un garçon quelconque, avec des cheveux bruns en bataille. De ce qu'elle avait pu apercevoir tout à l'heure, il était plus laid que beau, et comme elle, il portait une lampe à pétrole.

-Vous pourriez au moins répondre à ma dernière question, dit-elle à nouveau, on est tous dans la même galère, alors, si vous saviez quelque chose, ce serait bien de me le dire.

Il soupira, agacé.

-Je ne sais pas qui ils sont, mais la lumière et le bruit les attirent. Sinon, ils sont plutôt amorphes. A hurler comme ça, vous alliez tous les ramener chez nous.

-Chez vous ?

-J'ai rencontré cinq autres personnes, en errant comme vous deux. Nous nous sommes rassemblés dans une maison.

-Il y a des maisons ? s'écria Céleste toute excitée.

-Pas si fort ! souffla t-il, oui mais c'est vraiment étrange, on les trouve aléatoirement. C'est facile de se perdre ici. Elles apparaissent, parfois par deux ou trois. Je n'ai aucune idée de la manière dont ça fonctionne.

-On ne sera plus toute seule, c'est génial, dit Céleste en souriant largement. Comment est ce que tu nous a trouvé ?

-Au bruit. répondit-il, cynique.

Elle n'ajouta rien de plus, songeuse.

-Aurélius, dit-il, tout à coup.

-Quoi ? Qu'est ce que tu veux dire ?

-C'est mon nom.

Elle sourit.

-Je m'appelle Céleste.

Ils continuèrent leur marche, en silence. Bientôt, une forme immense et menaçante se dressait devant eux.

"C'est là où nous sommes, dit Aurélius, d'une voix mal assuré."

-J'ai si froid, se plaignit Céleste.

Ils entrèrent, à la fois inquiets, mais rassurés de ne plus rester vulnérables à l'extérieur. La lumière leur brûla les yeux, et tous trois s'arrêtèrent un instant, aveuglés. Eden battit les paupières et laissa échapper un sifflement :"Bah putain !"

Céleste comprit pourquoi. La pièce, malgré la clarté, était complètement grise. Tout semblait fade, comme issu d'un autre temps. Cependant, les gens qui les attendaient détonnaient avec leurs couleurs. Les cinq personnes présentes les regardaient fixement, inquiets, surpris.

-Quoi ? aboya Eden.

-Voici Io, Sisyphe, Titane, Orion et Callisto, énonça Aurélius en désignant tour à tour une très jeune fille, trois hommes et une femme.

Io devait avoir seize ans, Sisyphe était un homme d'à peu près quarante ans, Titane semblait bien plus jeune, vingt cinq ans peut être, ainsi qu'Orion et Callisto. Céleste ne put s'empêcher de remarquer les cinq petites lampes à pétrole, toutes identiques.

Devant ce silence gêné, elle prit les devants et sourit : "Je m'appelle Céleste, et voici Eden."

Les autres ne répondirent pas.

Cette dernière s'énerva :" Bordel, où est ce qu'on est, putain ? C'est une caméra cachée, c'est ça ? Hein, c'est ça ? Merde, répondez !"

-Non.

Aurélius venait de parler.

-On est tous aussi perdu que toi, personne ne sait rien sur cet endroit. Tout ce qu'on peut faire, ce sont des théories.

Sisyphe prit la parole :"Peut être sommes nous dans le coma ?"

Io rétorqua :
"Je n'ai jamais entendu une personne dire que durant son coma, elle s'était retrouvée sous terre et qu'elle avait rencontré d'autres personnes. C'est surréaliste !"

Elle éclata en sanglot. Titane passa un bras autour de ses épaules. "On s'est peut être tous fumé un joint bien chargé ? Et là, on plane..." ajouta t-il.

Aurélius lui jeta un regard mi-outré, mi-coléreux :

-Je n'ai jamais touché à la drogue, ce n'est pas demain que ça commencera.

La petite voix de Céleste s'éleva : "D'autant plus que je ne vous ai jamais vu."

Les huit personnes réunies se regardèrent avec méfiance. Aucun n'avait de souvenirs des autres, pouvaient-ils se faire confiance ? Est ce qu'il y avait des menteurs ? Quel serait le but d'une telle manœuvre, si c'était une manigance ? Pour Céleste, chacun était digne de confiance. Elle était si heureuse de ne plus être seule qu'elle aurait placé sa vie entre les mains de n'importe qui.

Avant les AsphodèlesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant