Louis-Gustave Valette parvint à s'introduire au cœur du domaine de Mademoiselle de Touchet sans trop de problèmes. Avec son air propre sur lui et son costume trois-pièces toujours parfaitement brossé, il ne collait guère à l'image que l'on se faisait du vagabond ou du danger public. Il avait l'intention de retrouver Domitille et Calixte et de discuter de l'affaire plus en détail avec elles, maintenant qu'il avait eu l'occasion de prendre connaissance du dossier ; pour ce faire, il lui fallait toutefois mettre la main sur la gracieuse Mademoiselle de Touchet, qu'il espérait trouver dans l'internat des filles, ou alors dans son pavillon personnel, au bout de l'allée – les jumelles racontaient qu'elle y conservait une quantité d'armes à feu impressionnante, rumeur que Louis-Gustave n'avait jamais prise au sérieux, mais qu'il aurait tout de même été curieux de vérifier.
Quoi qu'il en soit, l'honorable bâtiment de pierre qui hébergeait les jeunes filles se trouvait plus proche sur le chemin, aussi le jeune avocat commença-t-il ses recherches par-là. Il toqua à la porte, et eut la surprise de voir Stéphane Lande d'Aussac lui ouvrir, tirée à quatre épingles dans son uniforme d'agent des forces de l'ordre. Stéphane et Louis-Gustave avaient été à l'école ensemble, et quand leurs chemins s'étaient séparés, c'était pour mieux se retrouver dans leur vie professionnelle : l'avocat et la policière se croisaient bien souvent en salle d'interrogatoire, elle chargée de faire avouer à des petites frappes locales que oui, c'était bien elles qui avaient volé le vélo du maire, tandis que lui-même s'efforçait d'empêcher lesdites petites frappes locales d'avouer quelques méfaits supplémentaires – suspendre les caniches des petites vieilles aux platanes, repeindre les chats en vert, voler des pommes et les accrocher par paire sous l'entrejambe de la statue de Napoléon, ce genre de choses. Jusqu'au meurtre de Valmont Desmiers, les délinquants rencontrés par Louis-Gustave s'étaient toujours montrés terriblement décevants.
– Salut Louis ! lui sourit-elle en s'effaçant pour le laisser entrer. Tu cherches la vieille de Touchet ? Elle est en haut avec notre très compétent lieutenant Fondement.
Louis-Gustave lâcha un soupir.
– Ah, j'ai eu l'occasion de le rencontrer, ton lieutenant. Tu te rends compte qu'il a eu le culot de mettre mes deux frangines en garde à vue ? Elles ne sont même pas majeures !
– Il a ses bons et ses mauvais côtés, reconnut Stéphane. Bon, tu rentres ou tu sors ? Je dois finir d'examiner la collection de thé de Ceylan de ces demoiselles – sait-on jamais, l'empoisonneur pourrait avoir planqué sa réserve par là-dedans.
– Quel empoisonneur ?
Louis-Gustave demeura encore un moment sur le pas de la porte, interdit. Il fallut que Stéphane lui résume l'affaire pour qu'il se sorte de sa transe, clairement sur les nerfs.
– Muguette de Vauchaussade, à l'hôpital ? Et personne ne prévient les représentants légaux ? Ah je te jure, c'est le bordel par ici... Tu ferais bien de garder un œil sur ton frère !
Il s'engouffra dans la maison sur cette déclaration, laissant à peine à Stéphane le temps de répliquer qu'elle ne s'inquiétait pas trop pour Adélaïd. Elle ajouta encore autre chose, mais Louis-Gustave était déjà loin. Il débarqua ainsi au premier étage, et retrouva Mademoiselle de Touchet et ses visiteurs en suivant le son de leur voix, qui provenait d'ailleurs de la seule chambre dont la porte était ouverte, à l'étage.
– Bonjour ? hésita-t-il.
Il jeta un œil dans la chambre concernée, pour tomber nez à nez – ou nez à fesses plutôt – avec le charmant derrière du lieutenant Patrick Fondement, dont la tête et les bras disparaissaient sous une montagne de dentelle et autres indécences vestimentaires.
– Vous ! s'exclama le membre des forces de police d'une voix virile, dont l'effet fut fortement gâché par le soutien-gorge fuchsia qui lui pendait au nez.
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Le cadavre sexy du monsieur tout nu sur la peau d'ours dans la bibliothèque
Tajemnica / Thriller« Qu'est-ce qui avait bien pu lui prendre, à ce jeune homme de bonne composition, pour venir mourir sur la somptueuse peau d'ours polaire de la bibliothèque ? » Au pensionnat de Touchet, une étrange apparition vient troubler la quiétude des demoisel...