Chapitre 3

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J'étais dans mon lit. Je m'étais réveillée une heure avant mon alarme. J'avais mal au ventre. Une attitude tout à fait normale. Un poil paranoïaque, mais normale. Qui n'avait jamais stressé avant une rentrée où il ne connaissait personne ?

Je me redressai et d'un mouvement de la main, j'allumai ma lampe à reconnaissance gestuelle posée sur ma table de chevet, sans pour autant me lever.

Depuis deux semaines, plus aucun carton ne traînait au sol, ma machine à coudre avait trouvé sa nouvelle place et mes tubes de peinture, ainsi que mes pinceaux, étaient soigneusement rangés sur une étagère, à côté de mes livres sur l'Art. Une jolie collection qui relatait son évolution au fil des époques. J'avais laissé de la place en dessous pour mes cahiers et livres de cours.

Et si tout allait bien, j'irais à l'université l'année prochaine. Mais ne mettons pas la charrue avant les bœufs. D'abord ma dernière année de lycée. Même si la rentrée me mettait dans un état que je qualifierais d'insupportable, j'étais ravie d'être aux Balconniers. Finalement, on s'y habituait à la grande ville. La principale raison était que j'avais un choix d'avenir à portée de main.

Revenons en arrière : mon village, le nord, le froid. Alors comment dynamiser une région assez stérile – excepté pour les plantes coriaces – qui ne pouvait pas produire autant qu'une région du sud ? En se trouvant un autre secteur d'activité. Et quel secteur. Simsé était réputé pour sa création d'étoffes et par extension, des vêtements qui y étaient confectionnés. Bon, j'exagérais un peu, pratiquement tous les villages du nord dominaient dans l'industrie textile. Mais si je pouvais me permettre, l'entreprise de ma grand-mère s'était imposée comme une référence parmi les références. Bien qu'elle ne travaille plus aujourd'hui, l'entreprise était toujours aussi lucrative. Ainsi donc, j'aurais fini par travailler moi aussi dans le textile. Et même si je connaissais toutes les ficelles du métier grâce à ma grand-mère, j'étais soulagée quelque part, d'avoir le choix.

Je filai prendre ma douche. Jon n'étant pas encore levé, le champ était libre. En revenant dans ma chambre, je mis des vêtements que j'avais justement cousus. Une tradition pour tout habitant du nord qui se respectait. Malheur à celui qui n'avait pas cousu un jean dans sa vie. Je n'étais clairement pas une créatrice de mode dans le vent et au style original mais ça me plaisait d'assembler des bouts de tissus pour en faire une pièce unique. Je laissais donc la créativité aux personnes qualifiées et me contentais de coudre des classiques : jean, haut, jupe et robe.

Donc pour cette rentrée, rien de bien folichon : une jupe en jean, un top fait d'un tissu fluide et aérien car il allait faire chaud et le tour était joué. J'attachais mes cheveux châtain clair, j'attrapai mon sac et j'allais m'asseoir à la table de la cuisine pour tenter de manger quelque chose. Ce fut un échec.

Heureusement, mon frère et moi allions dans le même lycée ce qui limitait quelque peu l'exacerbation de mon stress. Après le petit-déjeuner, nous partîmes sous les encouragements de nos parents.

— Ne t'inquiète pas Ellis, dit mon père, ce soir quand tu rentreras tu nous feras un bon bilan de ta journée, j'en suis sûr.

— Je suis pressée d'être ce soir alors, marmonnai-je.

Sur le chemin du lycée, nous circulions côte à côte sur nos vélos. Je devais être très crispée sur le mien car mon frère me le fit remarquer.

— Ça va le faire Ellis, détends-toi, je suis avec toi donc qu'est-ce qu'il pourrait t'arriver hein ?

— Tout, justement, lui lançai-je.

— Sérieux, on dirait que tu vas te faire dessus !

Tu paries ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant