16.Sortir

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Aujourd'hui, c'est lundi six Juin. Il fait beau dehors. Le soleil éclaire le parking. Je regarde les voitures entrer, sortir. J'attends que Camille ouvre les yeux. Elle a passé une échographie et une radio de son ventre hier. Aujourd'hui, c'est le jour de son opération. Elle stresse un peu.

-Coucou toi, la saluai-je.
-Bonjour, répondit-elle, toujours en souriant.
-J'attendais que tu te réveilles.

Elle se remémore la journée d'avant hier, à son réveil. Elle sourit, et se place en position assise.

J'ai décidé de voir le docteur Morel pendant que Camille irait se faire opérer, à treize heure. J'ai pris rendez-vous à midi et demie.
Comme elle ne reste pas là longtemps, je prends son numéro de téléphone pour lui parler encore. J'ai envie d'en savoir plus.

Elle me regarde manger mon déjeuner, de la même façon qu'elle regardait mon petit déjeuner. Elle doit rester à jeun, pour son opération.

-T'as intérêt à tout manger, dit-elle.
-Sinon quoi? Nathalie t'as bien formé à ce que je vois, j'ai deux gardes du corps maintenant.
-Sinon je change de chambre.
-Tu le feras pas!
-Bah mange alors.

Je sais très bien qu'elle restera là, mais dans tout les cas, je lui ai promis de tout manger. Je l'ai promis au docteur Bernard, je l'ai promis à Nathalie, et je me le suis promis à moi même.
Je leur ai promis à tous de remonter la pente.
Cette fois je vais y arriver. Sans trébucher, sans tomber. Et si je tombe je me relèverai. La chute n'est pas un échec. L'échec c'est de rester là où on est tombé.
C'est comme ça que le docteur Morel me l'a expliqué.

Il trouve que je vais mieux. Il en est content. Je pense aussi que c'est en bonne voie.
Mes bras ont cicatrisé. Il reste quelques marques, mais Nathalie dit que dans quelques jours ça aura disparu.

Quand je suis retourné dans ma chambre, le cahier de Camille était ouvert, posé sur mon lit.
Je me suis allongé, je l'ai pris, et j'ai commencé à lire:
''Coucou Polo. Polo avec un ''O'', j'ai retenu que tu préfères comme ça. Voilà, je dois être en train de me faire charcuter, et je pense fort à toi. Tu es vraiment un garçon génial. Ça fait du bien de passer du temps avec toi, de s'évader, rêver, rire. Merci, pour ces petits moments, on se revoit à mon retour, en espérant te voir dans la chambre! "

C'est adorable. En dessous de ça, un de ses dessins, en noir et blanc. Il représente la chambre 255. On voit son lit, le mien, la fenêtre, les deux fauteuils, les appareils, et les rideaux. La chambre est inocupée.
Juste en dessous du dessin, elle a écrit quelques mots:
"En espérant que tu sortes au plus vite. On laisse cette chambre vide derrière nous, et j'espère qu'on se reverra bientôt".

Le docteur Bernard frappe à ma porte et entre dans ma chambre. Je m'attends à des complications, à un problème par rapport à Camille. J'ai peur.

-Paul? Demanda-t-il.
-OUI ?
-Bonne nouvelle !

Bon, je relativise. J'imagine que tout se passe bien pour Camille.

-Dites moi tout ? Demandai-je
-Tu as réussi à reprendre cinq kilos, en quatres jours, c'est mieux que ce que je pensais. J'ai eu ta mère au téléphone, elle va prendre le relai. Tu vas pouvoir sortir aujourd'hui.
-C'EST VRAI ? Aujourd'hui ! C'est quand même passé vite.
-En effet, tu as l'air d'aller mieux.

Il sourit

-Merci pour tout, dis-je
-Mais derien, je suis content pour toi. Aller, je te souhaite un bon rétablissement. Essaye de pas revenir me voir!

On riait.

-D'accord, j'essaierai, plaisantais-je.

Il s'en est allé sur ces quelques paroles, les deux mains liées derrière le dos.

Alors j'ai détaché une page vierge, et commencé à gratter quelques lignes. Une réponse à l'attention que Camille m'a porté.
J'étais persuadé qu'elle sortirait avant moi. C'est aussi ce qu'elle doit penser.
Je plie la page en trois, et la garde pour plus tard. J'écris ''lu'' au bas de sa lettre et repose le carnet sur son lit. Je pense qu'elle en attend une réponse. Elle sera donc bien plus contente de la recevoir après l'avoir désirée.

Camille est revenue dans la chambre à seize heure, soit vingt minutes plus tard.
Je dois lui annoncer la nouvelle. Il aurait dû nous rester encore un jour.
Elle me regarde avec son grand sourire habituel.

-Tout s'est bien passé? Demandais-je
-Oui oui, ne t'inquiète pas, répondit-elle.

Elle a remarqué que son carnet avait changé de place, ce qui la fit sourire à nouveaux.
Elle n'en dit rien.
Ensuite son regard s'est tourné sur moi. Habillé, débranché. Elle a aussi vu le sac noir fermé sur le fauteuil vert de droite.
Elle me regarde dans les yeux.

-Alors ça y est, tu m'abandonne plus tôt que prévu, tu pars?
-Oui, je l'ai su pendant que tu te faisais opérer.
-C'est nul. Enfin non, c'est cool pour toi. Sois heureux.
-Merci... Ma mère va arriver bientôt.
-On se retrouve bientôt, tu promets?
-Je te le promets.

J'ai préféré lui dire au-revoir avant que ma mère arrive. Je m'approche alors d'elle, dépose un bisou sur son front, la serre dans mes bras et lui tend ma lettre.

Je suis pas très doué pour les au revoirs, j'aime pas ça. Je regarde une dernière fois Camille, les larmes aux yeux.

-Prends soins de toi ma belle. À bientôt, dis-je avant de prendre mon sac, et de partir.

J'ai croisé Nathalie dans le couloir. Je lui ai dit merci, encore une fois. Puis je lui ai dit au revoir et j'ai rejoint ma mère qui sortait de l'ascenseur et commençait à traverser le couloir, pour la prendre à son tour dans mes bras.

A Jamais Le BonheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant