Recueil de textes

Torture cérébrale

« Écoute, écoute-moi bien pauvre conne, histoire que ça rentre dans ton cerveau une fois pour toutes. Ouais, c'est à toi qu'je parle, tu vois quelqu'un d'autre ici? N'essaie même pas de lutter, ici c'est moi qui décide. Tu pourras pas m'empêcher de parler et de te balancer toute la vérité au visage. Pourquoi est-ce que t'es encore là? T'as pas encore compris? C'était pas suffisant les regards dévisageants des personnes dans la rue, et la pitié constante des gens autour de toi? Personne veut de toi, ici. C'est pas un monde pour toi. Vas-y, saute, personne t'en empêche. Regarde, on t'encourage, même. Et regarde ta famille. T'as pas honte? Tu fais mal à ta pauvre mère, qui se force à t'aimer depuis que t'es venue au monde, c'est ça que tu veux? Et puis ton père, c'est à cause de toi qu'il est parti, tu comprends ça? T'es conne ou quoi? Ça imprime pas encore dans ton mini-cerveau? Tu veux qu'on te fasse un dessin? Tu sers à rien, ici. Barre-toi.
- Mmh.
- Apparemment t'as pas compris. Enfin, au fond de toi, de toute façon tu le sais. T'es rien. Juste rien. Un mini-rien né pour détruire d'autres plus grands rien. Parce que oui, on aura beau être que des rien, les autres rien seront toujours meilleurs que toi. Bouge d'ici.
- Pardo...
- Bouge d'ici, de ce monde. Oh, pauvre petite, elle pleure. Tss... T'en a assez reçu de la pitié, tu crois pas? Arrête ton cinéma deux secondes. Deux secondes, ok? Putain mais tu comprends rien ma parole. En plus d'avoir un corps de baleine, des poches sous les yeux aussi grande que des valises et un cœur aussi cramé que tes poumons par la cigarette, t'as un cerveau grand comme un caillou. Tu parles d'une grande perte. Barre-toi. »
Et j'écoute et j'encaisse le tonnerre de cette petite voix dans ma tête qui, dans l'ombre d'un cauchemar, grossit de plus en plus.
Et j'écoute et j'encaisse la vérité de ce qui dégage du simple reflet de ma personne dans un miroir.
« Barre-toi. »