Partie sans titre 14

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Dans la cohue et les embrassades qui ont suivis la fin du spectacle, Castiel et moi avons été séparés. Je croisais à un moment Elisa et Marc qui me félicitèrent chaleureusement. D'autres parents d'élève nous félicitaient. Les professeurs aussi ont été remerciés pour leur excellent travail. Bientôt, la foule se dispersa. Un feu d'artifice était prévu à l'extérieur pour clore la kermesse. Je m'y rendais accompagnée d'Ambre qui m'avait rejoint quand Dake lui fit signe.

Elle jeta un regard derrière moi.

-Bonne chance et encore félicitations, tu as été géniale.

Puis partit rejoindre son beau macho. Une première fusée s'élança, éclata en une gigantesque boule rouge sous les wouahous des spectateurs, bientôt suivie par une autre dorée cette fois. Je lève les yeux pour profiter du spectacle. Des mains se posent sur ma taille, je me retourne, légèrement rougissante.

Castiel est là, lui aussi encore dans sa tenue de scène.

-Le costume de pingouin te va comme un gant !

Avec mes talons, je fais presque la même taille que lui.

- Tais-toi...

Ses bras m'enveloppent, collent mon corps contre le sien. Je passe mes bras autour de son cou, glisse mes mains dans ses cheveux alors que son visage se rapproche du mien, goute ce premier baiser d'amour doux comme une caresse. Dans le ciel, les feux d'artifices atteignent leur apogée entrainant mon cœur dans leurs explosions, mon esprit aussi est propulsé vers les étoiles.

Jamais encore je n'avais ressentie tant de choses avec un simple baiser. J'avais l'impression que le temps s'était arrêté, que l'univers avait cessé de bouger, qu'un moment clef de mon existence venait d'être scellé.

C'était ce que j'avais toujours si avidement recherché au point de me perdre.

C'était ça, l'amour.

Quand son corps s'écarta du mien, le retour à la réalité me sembla trop brutal. Ses mains emprisonnaient encore les miennes.

-Je t'ai attendu tellement longtemps.

Des larmes perlèrent aux coins de mes yeux, je n'arrivais pas à les contenir, pas plus que je n'arrivais à prononcer un mot. Submergée par ce raz de marré de sentiments confus, je baissais la tête, me mordant la lèvre inférieur pour pas éclater en sanglot.

Il m'attira alors à lui, écrasant mon visage contre son torse. Je passais mes bras autour de son corps et le serrais à l'étouffer, serrant entre mes doigts le tissus de son smoking.

-Ne te retiens pas Thémis, pleure si tu en a envie...

La petite fille se cachait derrière le buisson, elle voulait dissimuler aux yeux du monde la marque rouge qui brulait son visage.
Le petit garçon qui l'avait suivi s'assit à côté d'elle. Elle ne prenait pas garde de salir le tutu bleu ciel qu'elle portait.

-Je la déteste !

Silencieux, il prenait une poignée de sable et le faisait glisser entre ses doigts comme si rien n'était plus important que ça.

Bientôt, de grosses larmes coulèrent de ses joues alors qu'elle regardait le petit garçon.

-Pourquoi ma maman elle m'aime pas ?

Il leva ses yeux gris vers elle.

-On s'en fiche. Je t'aime moi.

Aveux facile quand on a 5 ans.

-Tu m'aimeras toujours ?

-Oui.

Elle sécha ses larmes sur ses manches, renifla un bon coup puis attrapa à son tour une poignée de sable....

Je laissais mes larmes couler inondant sa chemise. Toute la tension accumulée durant tant d'années se libéra d'un coup. Le barrage que j'avais péniblement édifié autour de ce besoin d'amour venait de céder.

Quand enfin les larmes se tarirent, je me sentais vidée, épuisée. Les yeux rougis, je laissais Castiel me passer sa veste sur les épaules et m'accompagner jusqu'à chez nous. Devant la porte, je prenais une grande inspiration puis entrait.

-Ah ! On se demandait où vous étiez passés ! Vous étiez géniaux ! Marc et moi on est super fiers !

La mère de Castiel s'approchait de nous.

-qu'est-ce...

Castiel lui fit signe de se taire d'un signe de la main.

-Je vais me coucher. Bonn nuit.

Je tendais sa veste à Castiel puis montais comme un zombi les marches de l'escalier, prenait une longue douche chaude pour effacer les traces de mascara qui avait coulés.
Castiel était resté au salon en bas avec ses parents. Le marmonnement de leur discussion me parvenait à peine. Je montais dans ma chambre, me glissais sous les draps, les yeux grands ouverts, je fixais le plafond. Je ne pensais pas être capable d'éprouver encore tant de choses.

Aussi loin que je me souvienne, mes parents ne m'ont jamais aimés. Ma mère voulait une jolie poupée à exposer, j'étais une chipie turbulente et bornée. Mon père voulait un fils. Je n'étais rien de ce qu'ils avaient espérés, et jamais ils n'ont fait l'effort de m'accepter pour ce que je suis.

J'avais appris peu à peu à enfermer mes sentiments à double tour, enfermant l'amour que j'éprouvais malgré moi puisqu'il était sans retour.

Je ruminais mes pensées, incapable de fermer l'œil malgré la fatigue.

Quand pour la quinzième fois je me retournais dans mon lit, je m'assis brusquement.

Castiel m'avait embrassé !

Je jetais un œil à mon réveil, il était trois heures du matin.

Je descendais silencieusement les marches, pas un bruit ne s'élevait dans la maison.

Il y avait ici quelqu'un qui était prêt à me rendre mon amour, qui l'avait toujours été. Je me glissais dans la chambre, refermait précautionneusement la porte. Je me glissais dans le lit tout chaud.

-Ça va mieux ?

Je sursautais, je croyais qu'il dormait déjà. Il se retourna pour me faire face. Le peu de lumière qui passait à travers les volets clos éclairait son visage.

-Oui.

-Je croyais t'avoir dit de ne plus squatter mon lit.

Il me dévisageait, imperturbable, sans même essayer de me toucher. Je tendais ma main vers sa joue, déposais un baiser léger sur ses lèvres.

-Tu m'avais dit « sauf si tu as une très bonne raison »... J'en ai une maintenant.

-Tu es sure ? Rien ne sera plus pareil après....

-Rien n'est pareil, tu l'as dit toi-même, on a grandi, je ne suis plus une petite fille.

Je l'embrassais de nouveau, plus profondément, glissais mes mains sur son torse nu effleurait l'élastique de son boxer. Il me fit basculer sur lui, enlevant fébrilement mon débardeur, m'embrassant à pleine bouche. Nous nous explorions l'un l'autre, redécouvrions sous un nouveau jour.

Jamais exploration n'aura été si douce.

Elle s'appellera Lilly.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant