11 juillet 1882

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Monsieur Paterson possédait désormais une boutique connue dans la ville entière et ses voisines. Je lui avais proposé de faire du porte à porte la première semaine de travail avec l'adresse de la boutique et un splendide bouquet de fleurs que Marlène tenait entre ses mains.

Les gens étaient conquis, ils adoraient Marlène et cela me rendis souvent jaloux de la voir s'exprimer avec d'autres hommes que moi. La boutique arrivait souvent en pénurie en fin de semaine tant le succès était grand, Richard ne savait pas de quelle manière il fallait nous remercier.

̶ Elle est vraiment très jolie, celle-ci, disait-elle en faisant tourner le dahlia rouge entre ses doigts.

̶ En effet.

Je faisais les comptes à mon bureau pendant que Marlène me faisait la conversation en s'y accoudant près de ma machine à écrire, ma bourse était presque épuisée puisque nous avions profités pour faire l'achat de nouveaux vêtements ainsi que d'objets indispensables.

̶ Vous devriez vous reposer, me conseillait-elle en touchant ma main.

̶ Je peux tenir encore un peu.

Je déclinais rapidement mon regard du sien pour noter à la main ce qu'il nous fallait encore pour arriver à nos fins.

Marlène posa le dahlia du marchand de fleurs dans le pot avec un fond d'eau juste à ma droite et son impatience de me savoir libre se faisait ressentir. Je fis semblant de ne pas le remarquer, je devais absolument gérer nos sous puisque je ne l'avais pas fait depuis deux semaines.

̶ Que se passe-t-il ? réagis-je en sentant sa main se crisper puis se retirer.

̶ Rien, je vous laisse.

̶ Marlène. Restez.

Elle se rassit en silence, je posais la plume sans fin dans l'encrier pour saisir ses mains qu'elle triturait nerveusement et mes doigts soutinrent son menton affaissé au préalable.

̶ Dîtes-moi.

Je m'approchais d'elle sans la quitter des yeux et défis le corset qui l'avait serrée toute la journée.

̶ Votre père... Vous manque-t-il ?

La question m'a surprise sur le coup, nous n'avions jamais abordé ce sujet mais j'avais conscience qu'elle comptait me quémander. J'avais fuis le domaine des Donovan puisque l'oppression et la folie m'oppressaient et m'empêchaient de vouloir vivre librement avec elle, alors il m'arrivait de ressentir ce manque de la vie familiale.

̶ Parfois, répondis-je simplement.

̶ Il pourrait nous retrouver ?

Elle était craintive.

̶ Il est peut-être en train de le faire, mais le mal de Naples coure dans ses veines et l'empêchera de bouger dans l'excès. Marlène, écoutez-moi, si jamais il nous retrouve, sachez que je ne compte pas le laisser vous approcher.

Ma paume cajolait à présent sa joue humidifiée par des larmes de terreur, je la fis s'asseoir sur une de mes jambes et son visage reposait sur mon vêtement de nuit blanc.

̶ Calmez-vous, il n'y pas de raison d'être si inquiète, chuchotais-je en caressant son faciès.

Les secondes s'écoulèrent, interrompues par ses sanglots qui se faisaient plus lents, relatant notre complicité qui nous rapprochait chaque jour l'un de l'autre.

Les Amants InterditsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant