21 juillet 1882

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J'avais confié Marlène à monsieur Paterson lorsque je dus rendre visite à père. Il était alité et n'espérais plus me voir apparaître puisque j'avais soudainement fuis avec July. Il ignorait encore que j'étais responsable de la fuite de l'esclave qui avait fait hurler le manoir.

Marlène s'occupait des fleurs au comptoir, je l'entendais communiquer avec les clients et je discutais avec Richard à l'arrière-boutique pour pouvoir réaliser ce qui me traversait l'esprit depuis cinq jours, lors de ma visite au domaine des Donovan.

J'avais réussis à convaincre Marlène de m'accompagner au manoir depuis, même si cela lui rappelait de mauvais souvenirs. De plus, je lui avais proposé de nous rendre au village que j'avais indiqué aux esclaves avant de fuir chez Edwin. Je souhaitais de tout cœur qu'ils soient en vie.

̶ V'z'êtes certain qu'ça va lui plaire ? interrogeait Richard en rangeant les fleurs par catégorie.

̶ Assurément. Les fleurs ont une signification et ensemble, celles-ci en auront deux.

Il m'adressa un sourire avant de m'annoncer qu'il comptait tenir la boutique lors de notre absence. Je m'inquiétais assez puisqu'il y avait beaucoup de monde qui remplissait quotidiennement la boutique, ça allait être difficile de gérer autant de clients en une journée.

Je nouais les fleurs sur la planche, mes doigts s'étaient abîmés avec le temps, ils étaient plus râpeux et des cicatrices apparaissaient, dues aux épines des roses qui avaient un véritable succès pour les amants. Il m'était arrivé d'en offrir une à Marlène lorsqu'elle se sentit triste en pleine journée.

̶ Marlène ?

̶ Jonah ? répondit-elle en écho.

Je sortis de l'arrière-boutique pour attraper sa petite main métissée, un client régulier me fit la remarque de voler la dulcinée des fleurs, je riais brièvement avec elle et m'éloignais du regard des autres, y comprit celui de monsieur Paterson qui devint curieux.

̶ Il y a un problème ? questionnait-elle soucieuse.

̶ Restez assise, ignorais-je en gardant ses mains dans les miennes.

Je n'avais encore jamais fais cela, et encore moins dans une arrière-boutique de fleuriste, mais j'étais certain que c'était la première et dernière fois que je franchissais ce pas. Il fallait donc faire les choses en bonnes et dues formes, qu'elle s'en souvienne et surtout que ça lui plaise autant que l'idée me paraissait originale.

̶ Vous m'écoutez ?

̶ Pour sûr.

Mon regard hésita cinq secondes puis il revenait rapidement vers elle.

̶ La rose rose pastel est la fleur de la féminité par excellence, symbole de la beauté, débutais-je sérieusement. La lavande, elle, exprime la plénitude et la protection.

Ses lèvres se pincèrent et elle m'observait franchement. Je la flattais et elle savait où cela menait. Ses mains se joignirent nerveusement, le tissu de sa robe était tiré par ses doigts tremblants et je continuais ma prise de parole dans le but de l'achever au plus vite. J'étais nerveux et anxieux, moi aussi.

̶ L'œillet rouge est une fleur que vous aimez beaucoup, Marlène ; elle nous relate puisqu'elle est annonciatrice d'une relation brillante d'honnêteté et de durabilité.

Ses yeux devinrent humides sur le coup, je l'incitais à se lever pour éviter de m'agenouiller sur le sol humide et sale et nous nous regardions tous les deux dans les yeux.

Les Amants InterditsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant