20 juin 1882

798 90 0
                                    

Le soleil perçait mes paupières, je les ouvris, le corps ankylosé et découvris que Marlène n'était plus dans mes bras. La couverture était rabattue contre moi, j'en déduisis avec espoir qu'elle fût non-loin de la charrette. Mon épuisement s'était fait ressentir durant mon sommeil, je ne l'avais pas sentie quitter mes bras.

̶ Bonjour, Jonah, saluait-elle derrière moi.

̶ Bonjour.

Je descendis de la charrette devant elle, j'ajustais brièvement mon costume froissé puisque je m'étais assoupis dedans et je frottais automatiquement mes yeux avant de gratter ma nuque légèrement douloureuse.

Isaac se tenait près d'elle et s'amusait à mettre sa bouche près de son visage. Un rire franc s'échappa de sa gorge et j'en fus tout étonné de la voir et l'entendre aussi joyeuse. C'était la première fois que je l'entendais rire et la première fois que je n'hésitais pas à m'approcher pour l'embrasser si rapidement.

Elle se laissait prendre à cette étreinte furtive, je plaçais mes mains de part et d'autre de son visage et elle gardait ses mains ballantes contre son corps couvert d'une jolie robe. Elle avait dû se changer pendant que je dormais.

̶ Vous êtes énergétique ce matin, monsieur Donovan, susurrait-elle contre mes lèvres.

Isaac donnait des coups de tête contre son dos pour qu'elle se rapproche de moi, un sourire me prit en concluant que ce pur sang était vraiment intelligent et je sentis légèrement sa taille houleuse contre la mienne dès que je déposais un dernier baiser sur ses lèvres.

̶ Je suis permise de me baigner dans l'eau, ajoutait-elle.

La robe qu'elle portait la veille pendait sur une branche et j'embrassais brièvement son front en tenant ses hanches près de moi.

̶ Je suis ravi de voir que vous prenez vos libertés.

Et je l'étais réellement. Marlène s'interdisait de beaucoup trop de choses puisqu'elle entrait dans les préjugés communs qui régnaient autour d'elle, je voulais absolument qu'elle se libère de cela, qu'elle s'envole et devienne un grand oiseau, qu'elle suive mes conseils pour la laisser voler progressivement.

̶ L'étendue d'eau est loin ?

̶ Non. Venez.

Je la suivais sans discuter avec Isaac qui trottait derrière moi. Elle prenait enfin les devants, j'ignorais si c'était le fait de comprendre que j'avais fui ma famille -ou ce qu'il en restait- pour pouvoir vivre avec celle qui embellissait mon monde, celle qui représentait ma seconde vie. J'étais persuadé que c'était elle.

Elle paraissait si heureuse de m'emmener à la source d'eau que je la laissais s'exprimer avec le petit vent qui s'installait autour de nous, je l'admirais sans m'en lasser, il ne fallait pas que je l'interroge sur ses agissements soudainement plus osés, elle était susceptible de se faire engloutir par la timidité.

̶ L'eau était claire et peu profonde, expliquait-elle. Il buvait quand je me suis levée, dit-elle en désignant Isaac.

̶ Isaac. C'est Isaac.

̶ Je l'ignorais, m'apprit-elle.

Le visage rincé, j'attachais délicatement ses cheveux emmêlés avec un morceau de tissu propre et détachais sa robe de la branche pour la laisser pendre sur les bagages.

Nous repartîmes vers la charrette pour arriver à l'auberge de la ville avant quinze heures. J'attachais Isaac qui ne bronchait étonnement pas, Marlène voulu s'asseoir à mes côtés et nous quittions les lieux avec quelques abricots mûrs et des framboises trouvées dans des buissons. Je les avais rincés avant de les déguster avec Marlène durant le trajet.

Les Amants InterditsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant