L'année de mes huit ans, mes parents m'ont offert le meilleur anniversaire possible, un voyage à Disneyland comme en rêvent toutes les petites filles. Un week-end entier pendant lequel ils ont accédé à toutes mes demandes, la robe de princesse, les glaces, boissons et bonbons. Je me revois courir en tirant mon père par la main pour entrer dans les attractions en riant. Je n'ai jamais autant tournoyé que ces deux jours-là. Ces moments n'ont jamais été détrônés comme étant les plus heureux de ma vie.
La fin de ce week-end a été marquée par deux évènements. Le premier a été un dernier cadeau de la part de mon père quand nous avons quitté l'hôtel, une magnifique peluche Winnie l'ourson avec des poils roux et d'une douceur incroyable, la Rolls des peluches.
Le second a été notre accident de voiture sur la route du retour chez nous.
De ce week-end, il ne me reste que mes souvenirs et ma peluche Winnie que j'ai serrée si fort, étant devenue mon seul repère, qu'elle ne m'a pas quitté pendant des jours.
Ce n'est pas grand-chose une peluche, et encore moins face au vide que laissent deux parents qui n'ont pas survécu.
Parfois, je me dis que j'ai eu deux vies dont l'une n'a duré que huit années. Ensuite, j'en ai démarré une autre, je suis à nouveau venue au monde, sans rien de ma première vie. Sauf une peluche.
Cette nouvelle naissance a embarrassé beaucoup de personnes ce soir-là. Le personnel de l'hôpital se retrouvait avec une petite fille dont les parents étaient présents, mais au sous-sol, qui est l'étage de la morgue. Une petite fille apeurée, perdue et en larmes qui réclamait ses parents toute la journée. Et surtout, aucune famille proche, mes grands-parents n'étaient plus de ce monde.
En effet, mes parents m'ont eue très tard, je suis une enfant improbable et merveilleuse disait mon père, car ma mère avait quarante-cinq ans lorsqu'elle est tombée enceinte, et lui cinquante-cinq ans. Après des années de traitements pour avoir un enfant, ils avaient abandonné tout espoir. Et me voilà qui arrive dans leur vie, puisque malgré leur âge, autant dire qu'il n'était pas envisageable pour eux de mettre un terme à cette grossesse miraculeuse.
Donc, pas de famille connue. Il leur a fallu des jours de recherches pour finalement mettre la main sur un cousin de mon père qui était encore en vie et aux États-Unis. Cela a pris encore quelques jours pour le contacter, lui apprendre la merveilleuse nouvelle, c'est-à-dire que ce vieil homme célibataire de soixante-deux ans se retrouvait papa par adoption d'une petite fille de huit ans. Félicitations, Monsieur Quinn, vous avez gagné à la loterie des emmerdes à vie.
Quelques jours plus tard, je suis arrivée chez mon oncle Robert Quinn, dans la petite ville de Burlington dans l'état du Kansas, deux mille six cents habitants, parce que contre toute attente, il a accepté de me faire une place dans sa vie.
Si mon oncle a toujours vécu seul, je dois avouer qu'il m'a accueillie aussi bien qu'il le pouvait, et avec gentillesse. Il s'avère que nous étions tous les deux esseulés, alors finalement, nous étions plutôt contents de l'être un peu moins en étant ensemble. Si mon oncle ne s'est jamais mis en couple, c'est parce qu'il n'a vécu que pour son travail et ses passions. Le temps passant, il est devenu un homme mûr, puis un vieil homme, et il ne trouvait plus la motivation, ou le courage, de partir à la quête d'une femme. Alors il s'est encore plus consacré à ses passions.
Quand je repense à nos débuts de vie commune, je ne peux m'empêcher de sourire tant c'était folklorique, malgré la tristesse et mes larmes des premiers temps. Mon oncle n'avait aucune idée de ce que mange une petite fille ni de ce qu'elle doit faire de ses journées. Il était bien démuni face à moi qui le regardais en attendant qu'il me dise quoi faire, encore traumatisée par la perte de mes parents. Je pleurais souvent et il n'arrivait pas à sécher mes larmes. Il n'a pas fallu plus de deux jours pour qu'il demande de l'aide à notre couple de voisins retraités dont les enfants étaient à l'université.
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En secret (Terminée)
RomanceShaun et Lila. Deux prénoms jamais prononcés dans la même phrase, et pour cause. Ces deux-là sont à l'opposé l'un de l'autre et n'ont aucune raison de se fréquenter. Ni l'envie. Ça, c'est ce que tout le monde pense. Mais ils ont un secret. Depuis...