Cela faisait trois jours que Nevra était parti. Eweleïn avait consenti à donner du travail à l'Elfe après l'avoir ausculté et s'être assurée qu'il était en forme. Satisfaite de l'état de l'alchimiste, elle n'avait pas lésiné sur l'ampleur de la tâche. Elle l'avait carrément surchargé de boulot. Lui qui voulait des occupations, il était servi.
Ezarel était donc chargé de la taille et de la pollinisation artificielle des Orchidées Caramel, une plante tombante dont suintait une sève de caramel à l'automne. Il fallait donc s'assurer qu'elles soient en parfaite condition pour la fin de l'été.
Cela faisait donc trois jours complets qu'Ezarel passait la journée entière les bras tendus vers le haut, la tête relevée vers le plafond de la serre et les doigts ankylosés à force de cisailler, cisailler et cisailler encore. Il ne dut pas attendre longtemps avant de sentir ses épaules le tirailler. Mais c'était arrivé au soir, quand il s'était allongé sur son lit que sa colonne s'était défigée. Ses reins s'étaient enflammés tandis que sa nuque lui lançait de violents coups de jus. Et ça, ce n'était que le premier jour.
Ezarel avait réclamé des tâches physiques et fatigantes à Eweleïn. Il voulait être occupé à ruminer et rouspéter pour ne pas penser à Nevra. Et bien, c'était réussi. Toutes ses idées de meurtres s'étaient finalement tournées vers la gentille infirmière. Et stoïque comme il était, Ezarel s'était interdit d'aller la voir pour obtenir de quoi soulager la douleur. Il ne voulait pas lui donner la satisfaction d'avoir été maîtrisé.
En cette fin de troisième jour, Ezarel était rentré dans sa chambre, complètement crevé. Il était lessivé, au bout du rouleau. Ses mains étaient abîmées, striées de griffures à force de gratter la terre et ses ongles étaient crasseux. Oui, Ezarel était à deux doigts de rendre l'âme. Mais un étrange sourire étirait ses lèvres fines et mordillées. Il avait enfin terminé l'entretien des Orchidées. Il avait terminé de les préparer pour l'automne qui ne tarderait plus trop à arriver maintenant. Mine de rien, l'Elfe était sacrément fier de lui. Il avait abattu un travail considérable tout seul et en peu de temps. Il souffrait physiquement, mais il s'était convaincu que c'était une bonne souffrance. La preuve qu'il avait été performant.
A peine entré dans sa chambre, Ezarel s'était rué dans sa petite salle de bain pour se doucher. Il s'était dépêché de se défaire de ses vêtements sales et même nu comme un ver, il ne voyait plus la couleur de sa peau dans le miroir. Lui qui avait l'habitude de se voir pâlichon, il contemplait un vrai petit sagouin dans le reflet. La sueur et la terre s'étaient agglutinées dans les plis de sa peau, à ses articulations, autour de son cou et sur le bas de son visage. Il se frotta le menton, imaginant que cette crasse soit une barbe naissance. Lui qui était imberbe n'avait jamais connu les désagréments de la pilosité. Il tira la langue dans une grimace de mépris envers les barbus et sourit, satisfait de sa peau de Kiampu.
Il régla alors la température de l'eau et la laissa couler sur son corps meurtri. Il ne prit cependant pas le temps d'en savourer le massage délicat et préféra d'abord se savonner. Il pourrait se prélasser autant qu'il voudrait une fois propre.
Il prit grand plaisir à faire mousser le petit carré de savon dans son gant de crin doux avant de se frotter énergiquement. Soudain, un bruit effroyable se fit entendre tout près, comme si un Ogre s'était coincé dans les canalisations et qu'il poussait un hurlement plaintif. Redoutant ce que cela signifiait, Ezarel se dépêcha de se rincer.
Quand les mitigeurs et la pomme de douche se mirent à vibrer, l'Elfe bondit en dehors du renfoncement du mur pour s'échapper du jet d'eau, qui brusquement, devint boueux.
Écœuré, c'est en étouffant des jurons qu'Ezarel parvint à fermer le débit. Il inspecta son corps, complètement affolé pour être certain qu'il n'avait pas été souillé par la boue immonde. L'Oracle fut louée, Ezarel était immaculé. Il n'osa même pas ouvrir le robinet du lavabo de peur d'avoir la même surprise. Des gargouillis de fond d'estomac en pleine digestion s'extirpaient du siphon de la douche. Sans parler de l'odeur.
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Respire-Moi [BxB]
RomanceCela faisait des années qu'Ezarel avait vaincu son haptophobie. Du moins, il le pensait. A la réfréner en tout cas. Il a fallu d'un contact. D'un malheureux contact à même la peau pour le faire replonger dans les affres de son passé, régressant sur...