Ezarel se réveilla aux aurores. Cette nuit-là, il avait très mal dormi. Impossible pour lui de retourner dans sa chambre tant que les réparations n'étaient pas faites, il avait dû se retrancher dans un coin du laboratoire. Il gardait toujours une couverture et quelques bricoles de survie dans une malle en cas de siège. Ezarel était du genre prévoyant dans sa vision pessimiste du monde. Pour le coup, il était parvenu à trouver le sommeil après bien des heures à cogiter et enrager sur tout ce qui s'était passé dernièrement dans sa vie. Et plus encore sur les évènements de la nuit.
Cependant, étant donné qu'Eweleïn lui confiait des missions d'extérieur depuis quelques temps, il ne doutait pas un instant que des Absynthes occupaient son bunker la journée. Cette idée l'irritait au plus haut point. Il n'aimait pas qu'on puisse violer sa propriété. Le laboratoire, c'était sa pièce à lui, son petit cocon, l'endroit où ses idées prenaient vie. Ça le répugnait de se dire que des mains sales touchaient à ses affaires, tripotaient son matériel et laissaient des traces de doigts grasses sur sa vaisselle d'alchimie. Imaginer son bunker ainsi envahi par une bande d'abrutis sans cervelle lui donnait mal à la tête. Mais il n'y pouvait rien. Pas tant qu'il n'aurait pas retrouvé son rang de chef suprême.
Dans tous les cas, le soleil se levait et les plus matinaux des alchimistes ne tarderaient pas à débouler dans la petite pièce. Ezarel ne tenait pas à être découvert à dormir en position latérale, recroquevillé sur lui-même, à même le sol. Il se leva donc, étira ses membres douloureux un à un pour se dégourdir et s'éclipsa discrètement de la pièce.
Ce jour-là, il fut surpris de constater que les tâches qu'Eweleïn lui avait confié pouvaient être abattues en très peu de temps. Il n'avait simplement qu'à arroser les plants de la serre et nourrir les familiers. L'Elfe pensait donc terminer sa journée de travail dans le milieu de la matinée. Il aurait donc tout le reste de la journée pour lui.
Enchanté à l'idée d'avoir la paix et de pouvoir vaquer à ses propres occupations par la suite, Ezarel s'attela à la tâche dès qu'il eut terminé son petit déjeuner. Il avait même rendu son plateau avant que les premières têtes n'arrivent. Ezarel aimait ne pas croiser trop de monde. Il aimait travailler dans son coin, sans que personne ne le dérange. Même si la solitude lui pesait par moment, il restait un solitaire. Ce jour-là, Ezarel avait vraiment besoin de rester seul.
Le soleil n'était pas encore au zénith quand il versa le dernier seau de grains d'orge en sucre aux Moogliz, cependant, il s'autorisa quelques instants de repos. Il s'allongea dans l'herbe près de l'enclos et observa les nuages glisser sur la toile bleue du ciel. Il faisait beau, vraiment beau. Un vent léger soufflait sur la côte, tout juste de quoi rafraîchir un peu l'atmosphère. Midi approchait mais l'Elfe n'avait franchement pas envie d'aller s'enfermer dans la cantine pour déjeuner. Et il ne voulait pas croiser Nevra. Il ne se sentait pas capable de sentir son regard sur lui.
Ezarel culpabilisait de la souffrance qu'il avait pu infliger à son camarade la nuit dernière, mais c'était nécessaire. Cette proximité le rongeait et le faisait changer. Ezarel n'était pas d'une nature tactile. C'était Nevra qui le poussait à changer, il lui déteignait dessus. C'était pourquoi il était nécessaire à l'Elfe de s'en détacher. Il ne voulait pas être changé par Nevra. Il ne voulait pas être contaminé par Nevra. Non, il ne voulait pas.
Secouant la tête pour faire le vide dans ses idées, Ezarel se releva, alla ranger les outils qu'il avait utilisé ce matin et se dirigea vers le quartier général. Il voulait se décrasser un peu avant de prendre de quoi manger. Il se faufila dans la salle de bain commune et souffla de soulagement en constatant qu'à cette heure-ci, la pièce était déserte. Tout le monde était déjà affairé dehors et à travailler.
Il se pressa tout de même de se laver, ne tenant pas à augmenter les risques de croiser quelqu'un. Il ne voulait pas être surpris comme il l'avait été cette nuit. Il se rappela la sensation des mains de Nevra sur sa peau. Il se souvenait des vagues de chaleur qui se dispersaient sous son épiderme sous la pulpe des doigts du Vampire. Et son souffle sur sa peau, la douceur de ses lèvres. Ezarel grogna d'agacement quand son ventre s'échauffa et il se sentit obligé de tourner le robinet d'eau froide à fond pour calmer ses ardeurs. Une certaine partie de son corps s'éveilla de nouveau, attestant du désir que Nevra suscitait chez lui, et ce fut dans un juron elfique qu'Ezarel donna un coup de poing dans le mur. Son corps n'avait pas le droit de réagir ainsi à la simple pensée du Vampire !
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Respire-Moi [BxB]
RomantizmCela faisait des années qu'Ezarel avait vaincu son haptophobie. Du moins, il le pensait. A la réfréner en tout cas. Il a fallu d'un contact. D'un malheureux contact à même la peau pour le faire replonger dans les affres de son passé, régressant sur...